samedi 23 mars 2024

La "fatigue de printemps", une pathologie de langue allemande

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"La Sieste ou Le Rocking-chair, Jeanne", Henri Manguin, 1905.

Une grande fatigue envahit les Allemands le printemps venu, sorte de veisalgie post-hivernale… Si bien qu'ils lui consacrent un mot : la Frühjahrsmüdigkeit. Une curiosité linguistique et culturelle.

Il est de ces mots qui n'existent que dans une seule langue et dont la traduction, parfois hasardeuse, nous amuse tout en nous révélant une idée bien précise sur laquelle nous ne pouvions justement mettre un terme. Parmi eux, le doux nom de "Frühjahrsmüdigkeit". Composé de "Frühjahr" (qui signifie printemps) et "Müdigkeit" (fatigue), il désigne cette lassitude ou épuisement que l'on peut ressentir avec l'arrivée des beaux jours, au sortir de l'hiver. Le terme a même sa déclinaison verbale : on dira "ich bin frühjahrsmüde", littéralement "je suis fatigué du printemps" ou plutôt "j'ai la fatigue du printemps".

En quoi consiste cette étrange maladie ? Les Allemands sont-ils si épuisés qu'il leur fallait dédier un mot de leur langue, réputée propice à la création de concepts, à ce mal printanier ? Pourquoi n'avons-nous pas un mot français pour le désigner ? La Frühjahrsmüdigkeit s'arrêterait-elle, tel un nuage radioactif, à la frontière franco-allemande ? Ou comment d'un phénomène mi-pathologique mi-linguistique que nous voyons comme une curiosité d'un côté de la frontière, révèle de l'autre une réalité culturelle… De quoi mêler ici conseils contre la fatigue saisonnière dignes d'un magazine pour salle d'attente, goût des "intraduisibles" et réflexions sur l'hypothèse linguistique de Sapir-Whorf, laquelle voudrait que la langue influe sur la façon dont on conçoit la réalité.

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