dimanche 10 décembre 2023

« Se retrouver de l’autre côté de la barrière est difficile à accepter » : une médecin malade témoigne


 


Christophe Gattuso  7 décembre 2023

À l’occasion de la parution de notre nouvelle enquête sur le vécu et le ressenti des médecins lorsqu'ils sont malades, la Dre Brigitte G*, anesthésiste-réanimatrice dans le Sud-Est de la France, a accepté de témoigner auprès de Medscape du burn-out qu’elle a subi il y a plusieurs années, et du cancer du sein contre lequel elle se bat actuellement. 


Burnout : « Je ne disais jamais non »

« J’ai été arrêtée en janvier 2015, cela faisait trois ou quatre ans que la situation s’était dégradée au travail. Mais j’étais dans le déni, et au moment où je me suis rendu compte que ça n’allait pas, il était déjà trop tard. J’ai dit à mon chef de service que j’étais sur le fil du rasoir. Il m’a répondu : « Fais-toi aider ». Dix-huit jours après, j’étais en arrêt… J’avais craqué à la fin d’une réunion au cours de laquelle on me demandait d’assumer une procédure supplémentaire. Il était évident pour tout le monde que cette tâche me revenait. Je ne disais jamais non. Mais là, j’ai refusé, je ne pouvais plus. Personne n’est venu me voir à la fin de cette réunion. Je travaillais dans un CHU au sein d’une grande équipe, avec des anesthésistes répartis dans des pavillons. Un seul chef chapeautait tout le monde. Il fallait dire oui à tout ce que voulait ce mandarin. J’ai été en arrêt pendant plusieurs mois. Beaucoup de gens ont été surpris quand ils l’ont appris, sauf une amie de longue date qui m’invitait à lâcher prise.

"Je partais du principe qu’un médecin ne peut pas être malade, c’est impossible ! "

Cela a été très difficile pour moi. Je partais du principe qu’un médecin ne peut pas être malade, c’est impossible ! Dès les études, on nous inculque qu’on est là pour soigner, pas pour se faire soigner. On se prend un peu pour les sauveurs et se retrouver de l’autre côté de la barrière est difficile à accepter, surtout lorsque c’est pour un problème d’ordre psychologique. J’ai longtemps fait un déni de mon épuisement psychologique, je ressentais de la culpabilité en me disant que mon absence se répercuterait sur mes confrères ! Je ne refusais jamais, j’assistais à des réunions, je faisais des gardes en plus, j’étais surinvestie à 300%. Quand je suis revenue au boulot après plusieurs mois, j’avais mené un travail pour apprendre à dire « non ». Un jour, un collègue m’a demandé si je pouvais échanger une garde et comme cela ne m’arrangeait pas, alors j’ai dit non. Ce jour-là a été une victoire.

Un psychologue trouvé dans les pages jaunes

Être médecin a été neutre pour la prise en charge de mon burn-out. Je devais initialement aller voir un psychologue dans l’hôpital dans lequel j’exerçais mais je n’en ai pas eu la force. J’avais une boule au ventre dès que j’approchais de l’hôpital.

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