lundi 31 juillet 2023

La France en plein baby crash


Paris, le lundi 10 juillet 2023 

Le nombre de naissances a baissé de 7 % sur les cinq premiers mois de l’année 2023 par rapport à 2022, année qui était déjà historiquement basse en termes de naissances.

La France est peut-être en train de s’enfoncer dans un hiver démographique. Depuis 2014, à l’exception d’un léger rebond en 2021, le nombre de naissances est en chute libre, passant de 832 000 naissances en 2014 à seulement 723 000 naissances en 2022, soit 13 % de moins. L’année 2022 est ainsi l’année qui a compté le moins de naissances en France depuis 1946, époque où la France ne comptait pourtant que 40 millions d’habitants. Et les premiers chiffres de l’année 2023 ne sont guère encourageants.

Sur les mois de janvier à mai 2023, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) comptabilise ainsi 20 000 naissances de moins que sur la même période en 2022, soit une baisse de 6,7 %. Seulement 1 842 enfants sont nés en moyenne chaque jour en mai 2023 (environ 57 000 naissances sur l’ensemble du mois), soit 7,9 % de moins qu’en mai 2022. Depuis 1994, quand l’Insee a commencé à comptabiliser le nombre de naissances par mois, les cinq premiers mois de l’année 2023 sont ceux avec le taux de natalité les plus bas, à l’exception des mois de janvier et février 2021, où la natalité s’était effondrée à cause du premier confinement du printemps 2020.

Un solde naturel quasiment nul

L’épidémie de Covid-19 a d’ailleurs eu des effets contrastés sur la natalité. Le nombre de naissances a donc d’abord fortement baissé à partir de décembre 2020 (premier confinement), est reparti à la hausse à compter de mars 2021 (déconfinement) avant de rebaisser en janvier 2022 (troisième confinement) puis en octobre 2022 (vague Omicron). Le recul de l’épidémie de Covid-19 et l’abandon des mesures restrictives de liberté à partir du printemps 2022 ne semble donc pas avoir fait remonter le nombre de naissances neuf mois plus tard, bien au contraire. C’est en Ile-de-France et en Provence-Alpes-Côte d’Azur que la baisse du nombre de naissances est la plus importante (- 10 % en mai 2023 par rapport à mai 2020), tandis que les naissances augmentent en Corse (+ 11 %).

A cette baisse constante des naissances s’ajoute une hausse continue des décès ces dernières années, qui n’a pas été ralentie avec le recul de l’épidémie de Covid-19, avec 613 000 morts en 2019, 669 000 en 2020 et 673 000 en 2022. L’an dernier, le solde naturel n’était ainsi que de 56 000 personnes supplémentaires, au plus bas depuis la Seconde guerre mondiale et la population n’avait augmenté que de 0,3 %, en grande partie grâce à l’immigration.

Une crise profonde ou une baisse passagère ?

Les démographes sont divisés sur le point de savoir si la France est définitivement entrée dans une crise démographique. Avec un taux de natalité d’environ 1,8 enfants par femme, la situation reste encore acceptable selon le démographe Gilles Pison et ce malgré une baisse du nombre de femmes en âge de procréer. « Il est un peu tôt pour dire si la baisse du taux de natalité en France observée ces derniers temps inaugure vraiment une nouvelle ère où les femmes auraient nettement moins d’enfants que celles des générations précédentes ; il y a des périodes tantôt à la hausse, comme entre 1994 et 2010 et des périodes tantôt à la baisse comme c’est le cas depuis 2010, il est donc possible qu’actuellement nous soyons toujours dans cette alternance entre de légères hausses et de légères baisses » explique le démographe. Le nombre de naissances avait en effet fortement chuté entre 1986 et 1994, avant de repartir à la hausse.

Le débat est également ouvert pour connaitre les causes de ce recul de la natalité. Pour le démographe Gérard-François Dumont, le responsable est tout trouvé : ce sont les réformes de la politique familiale menée à compter de 2014 (baisse du quotient familial, suppression de l’universalité des allocations…) qui sont la cause de cette baisse des naissances.

En tous les cas, si le phénomène persiste et que la France s’enfonce dans une crise démographique, les conséquences sociales et sanitaires, notamment liés au vieillissement de la population, seront considérables.

Quentin Haroche


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