mardi 13 juin 2023

Attractivité Pour séduire les élèves en médecine générale, le ministre de la Santé sort le portefeuille

par Nathalie Raulin   publié le 12 juin 2023

François Braun annonce ce lundi assortir l’allongement d’un an du cursus de médecine générale de conditions financièrement attractives. Particulièrement en cas de stages dans les déserts médicaux, qui pourront être payés jusqu’à 4 500 euros net par mois.

La quatrième année d’internat de médecine générale sera rémunératrice. Telle est en substance la promesse faite ce lundi par le ministre de la Santé, François Braun, aux étudiants qui essuieront les plâtres de la réforme à compter de l’automne.

Engagement de campagne du candidat Macron, voté dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, l’alignement de la durée de l’internat des médecins généralistes sur celui des spécialistes avait été accueilli à l’automne à boulets rouges par des carabins révoltés à l’idée d’être ravalé au rang de bouche-trous «sous payés» dans les déserts médicaux. Des craintes non dénuées de fondements, les ministres de la Santé et de l’Enseignement supérieur ayant alors indiqué que «cette année de consolidation aura vocation à se dérouler en priorité en zone sous-dense», mais sans évoquer la moindre compensation.

Retour progressif des gardes obligatoires

Alors que la grogne gagne toutes les professions médicales, il était temps pour le gouvernement d’apaiser celles des jeunes. Cette fois, le ministre met l’accent sur le renforcement de la professionnalisation qui découlera de ce surcroît d’étude. La quatrième année d’internat ne sera «pas juste une année de plus», a insisté Braun, relevant que l’absence actuelle de «phase de consolidation» retarde l’installation des jeunes généralistes en sortie de cursus. Pour remédier à cette «faiblesse», les apprentis généralistes devront faire deux stages supplémentaires de six mois «dans le même cabinet médical» sous l’autorité soit d’un praticien maître de stage universitaire soit d’un médecin généraliste expérimenté susceptible de leur expliquer toutes les facettes de l’exercice libéral. La mesure doit concerner les futurs généralistes qui débuteront leur internat en septembre, et donc leur quatrième année à l’automne 2026.

Braun ne perd néanmoins pas de vue son objectif : «Il s’agit de répondre aux besoins de santé croissants de la population, en particulier dans les territoires plus isolés et moins dotés en termes de ressources médicales», admet-il. Signe annonciateur d’un retour progressif des gardes obligatoires le soir et le week-end, les internes de quatrième année seront désormais tenus de participer à la permanence des soins ambulatoires sur leur territoire de santé, en«autonomie supervisée».

Mais conscient de l’effort réclamé aux jeunes générations, le ministre n’omet pas cette fois de parler gros sous. Tout comme leurs homologues spécialistes, les internes en quatrième année de médecine générale vont accéder au statut de «docteur junior» et à la rémunération afférente (de l’ordre de 1 900 euros net par mois). Ce n’est pas tout : «Ils percevront une rétrocession d’honoraires de 20 % du montant des actes réalisés à partir de dix et jusqu’à trente consultations quotidiennes», indique le ministre, qui satisfait là une revendication historique de l’InterSyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG). Aux dires de son entourage du ministre, la rétrocession vaudra aussi pour les actes effectués dans le cadre de la permanence des soins ambulatoires.

Faute de maîtres de stage

Cerise sur le gâteau, les internes qui réaliseront leurs stages dans les déserts médicaux, soit les 40 % du territoire classé en zone d’intervention prioritaire, recevront de surcroît une prime de l’ordre de 400 euros. «L’ensemble de ces rémunérations pourront s’additionner jusqu’à 4 500 euros net par mois», précise l’entourage du ministre. Un plafond que le ministère veut indépassable pour«laisser une marge de progression» à la rémunération du médecin après installation.

De quoi emporter l’adhésion des jeunes ? Pas si sûr. Lundi, l’ISNAR-IMG s’est inquiété du «flou qui règne encore sur l’encadrement des étudiants et sur le risque d’être contraints de travailler dans des structures de soins non fonctionnelles», faute de maîtres de stage en suffisance. Une inquiétude balayée par l’entourage de Braun, qui se fait fort d’avoir formé 16 000 maîtres de stage fin 2026. Mais dans un contexte de dégradation de l’attractivité de la filière médecine générale, ces annonces risquent d’être insuffisantes pour convaincre à l’avenir les étudiants de choisir cette voie.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire