vendredi 26 mai 2023

Les maladies nosocomiales touchent un patient hospitalisé sur dix-huit


 



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Le Covid-19 a participé à l’augmentation des pathologies contractées à l’hôpital, selon une enquête réalisée par Santé publique France en mai-juin 2022.

Des infirmières au chevet d’une patiente souffrant du Covid-19 à l’hôpital de la Timone à Marseille, le 31 décembre 2021. Le recours à des dispositifs invasifs, comme l’assistance respiratoire, augmente le risque de survenue d’une maladie nosocomiale.

Quel est le risque d’attraper une maladie à l’hôpital ? En mai-juin 2022, un patient hospitalisé sur dix-huit présentait au moins une infection nosocomiale, c’est-à-dire contractée au cours d’un séjour dans un établissement de santé, qu’elle soit directement liée aux soins ou survienne simplement durant l’hospitalisation. C’est le résultat d’une enquête opérée tous les cinq ans par Santé publique France (SPF) dans le cadre du Réseau de prévention des infections associées aux soins, et rendue publique vendredi 26 mai.

La part de patients concernés par ces maladies de l’hôpital est en hausse par rapport à 2017 (+ 14,7 %), avec une prévalence de patients infectés de 5,71 %. En cause, sans grande surprise, le virus responsable du Covid-19, le SARS-CoV-2, qui représente la moitié de cette augmentation. Si l’on exclut les cas de Covid-19 attrapé lors d’une hospitalisation, la hausse est en effet d’un peu moins de 5 %, une variation que les auteurs du rapport estiment non significative.

Il n’en reste pas moins que la part d’infections nosocomiales stagne plus ou moins depuis 2012, alors que les enquêtes antérieures avaient montré une baisse régulière entre 2001 et 2012 (− 11 % de 2001 à 2006 et − 11 % de 2006 à 2012). Des tendances à interpréter avec précaution.

Des disparités régionales

« Aujourd’hui, il y a de plus en plus de patients pris en charge en ambulatoire, et les patients qui sont hospitalisés sont ceux qui ont plus de facteurs de risque ; par ailleurs, pendant la période Covid, les patients pris en charge dans les établissements de santé étaient probablement plus fragiles qu’en 2017 », explique Anne Berger-Carbonne, responsable de l’unité infections associées aux soins et résistance aux antibiotiques de SPF. « L’enquête montre d’ailleurs que les patients avaient plus de dispositifs invasifs et présentaient des pathologies fragilisantes, ce qui peut expliquer cette évolution. Vu le contexte hospitalier, on aurait même pu s’attendre à une hausse plus nette des chiffres », conclut la médecin.

Certaines régions sont plus concernées que d’autres. En métropole, ce sont la Corse (8 %) et le Grand-Est (6 %) qui comptaient la plus grande prévalence de personnes infectées, tandis que le Centre-Val de Loire et la Bretagne étaient en queue de peloton (respectivement 4,60 % et 4,25 %). Une fois les cas de Covid-19 exclus, la Provence-Alpes-Côte d’Azur (+ 38 %) et la Bourgogne-Franche-Comté (+ 33 %) présentaient toutefois les plus fortes augmentations.

De quels types d’infections parle-t-on ? Quatre d’entre elles se partagent 71 % des cas : les infections urinaires (28 %), suivies des pneumonies (16 %), puis des infections du site opératoire (14 %), dues à des bactéries qui s’introduisent au cours des incisions faites pendant l’intervention, et enfin des bactériémies (12 %), c’est-à-dire lorsqu’on retrouve des bactéries dans la circulation sanguine. « Depuis de nombreuses années, ce sont toujours à peu près les mêmes infections qui ont la plus grande prévalence, commente Anne Berger-Carbonne. Les infections urinaires sont très fréquentes, y compris hors établissements de santé, mais pas très graves, tandis que les infections du site opératoire peuvent entraîner des séquelles graves, et les pneumonies et bactériémies peuvent être mortelles. »

Les personnes âgées plus touchées

Les responsables sont connues. Dans la moitié des cas, il s’agit d’un quartet de bactéries : Escherichia coli (E. coli), qui réside dans le tube digestif des humains et des animaux à sang chaud, le staphylocoque doré, repéré dans le nez d’environ 30 % des adultes sains et sur la peau d’environ 20 % d’entre eux, l’entérocoque Enterococcus faecalis, identifié dans la flore intestinale normale, et enfin la Pseudomonas aeruginosa, présente dans le sol et l’eau.

Elles ciblent plus particulièrement certains profils à risque. Tout d’abord, les personnes âgées (58 %), celles qui présentent une affection engageant leur pronostic vital à un ou cinq ans (31 %), et plus généralement les personnes immunodéprimées (14 %). Des facteurs déterminants sont aussi les actes médicaux ou chirurgicaux auxquels ces patients avaient été exposés : 36 % avaient eu au moins un dispositif invasif tel qu’un cathéter vasculaire, une sonde urinaire ou une assistance respiratoire.

Résultat, plus d’un quart (28 %) des antibiotiques prescrits à l’hôpital l’étaient pour le traitement curatif de ces infections nosocomiales. Par ailleurs, l’enquête menée par SPF montre qu’en 2022 la prévalence des patients traités par antibiotiques était plus élevée (+ 7,5 %) que celle qui avait été estimée en 2017. Et ce quel que soit l’âge, le sexe ou l’état de santé des patients. Un signal qui doit inciter à un meilleur usage des antibiotiques. « Les choix d’antibiotiques prescrits aux patients semblent conformes aux recommandations des sociétés savantes, mais la quantité a clairement augmenté, souligne Anne Berger-Carbonne. Des études complémentaires vont être nécessaires ces prochaines années pour en comprendre les raisons. »

Un projet européen piloté par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies évalue la place de la France en Europe. « Les enquêtes précédentes avaient montré que la prévalence des patients avec une infection nosocomiale en France se situait dans la moyenne européenne, passant de 12e sur 33 en 2012 à 17e sur 31 en 2017 », commente Côme Daniau, chargé de projets scientifiques à SPF. Il faudra attendre 2024, et que tous les pays aient rendu leurs travaux, pour savoir comment la France se situait par rapport à ses voisins en 2022.


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