vendredi 9 décembre 2022

Infections . Quand la guérison tarde à venir

Infections Quand la guérison tarde à venir

Après une maladie infectieuse (Covid, maladie de Lyme, grippe...), la récupération est parfois longue et complexe. Le point sur un syndrome mal connu mais plus fréquent qu’on ne le pense.

La convalescence, voilà un terme qui paraît un peu désuet… Pourtant, la réalité médicale qu’il recouvre existe toujours. En effet, ce terme désigne l’étape de récupération nécessaire après une maladie pour retrouver son état de santé antérieur aux symptômes aigus causés par l’infection.

Face à une convalescence longue et complexe, les médecins parlent de syndrome post-infectieux suivant un épisode infectieux sévère (Covid, grippe, pneumo­pathie, mononucléose, hépatite…). Ce syndrome se caractérise par des symptômes tels qu’une fatigue intense, des douleurs diverses, des diffi­cultés de concentration, entre autres. Toutefois, chaque infection peut entraîner d’autres symptômes, plus spécifiques. L’apparition du Covid long a relancé ces deux dernières années le débat autour de ces convalescences mystérieuses.

COMPRENDRE

De très nombreuses maladies infectieuses sont concernées par ce syndrome, telles que la grippe, la pneumopathie aiguë, la poliomyélite, la varicelle, la mononucléose, la gastroentérite sévère, le SRAS et le Covid, mais aussi le zika ou la dengue. Par exemple, 3 mois après une pneumopathie, la moitié des patients signalent une fatigue intense persistante. Par ailleurs, des infections d’origine bactérienne peuvent aussi se compliquer d’un syndrome post-infectieux, comme la maladie de Lyme (voir ci-dessous) et la salmonellose.

Quels sont les signes communs ?

Les syndromes se manifestent par un état général de faiblesse, un épuisement rapide à l’effort, une sensation de brouillard mental (problèmes de concentration, pertes de mémoire…), des douleurs articulaires et musculaires, de l’irritabilité, voire un état dépressif. Peuvent s’y ajouter d’autres symptômes plus caractéristiques : une perte du goût après un Covid, un syndrome du côlon irritable après une gastroentérite sévère ou encore des trous de mémoire après une encéphalite.

Combien de personnes sont concernées ?

Après une mononucléose, la longue convalescence concernerait 30 à 40 % des personnes après quelques semaines, puis 8 à 14 % après 6 mois et 4 % après 2 ans. Pour le Covid long (voir encadré ci-dessous), des séquelles persistent pendant 4 à 12 semaines pour 20 % des personnes, et pendant plus de 3 mois pour 10 % d’entre elles. Pour les autres infections, on ne dispose pas de chiffres aussi précis.

Quelles sont les causes ?

Les causes précises ne sont pas encore élucidées par les scientifiques. Toutefois, certaines hypothèses sont jugées plus crédibles que d’autres : la persistance de traces de l’agent pathogène initial ; la persistance d’auto-anticorps après la phase aiguë de la maladie, cette réaction immune excessive pouvant perturber certains mécanismes vasculaires et neuronaux ; une dérégulation du microbiote intestinal ; des mécanismes inflammatoires qui pourraient activer certaines zones cérébrales et créer un état de fatigue chronique ressenti même après la phase aiguë de l’infection.

CONSULTER

« Les symptômes post-infectieux sont souvent d’intensité modérée et il est suffisant d’identifier le syndrome et de l’expliquer au patient, tout en lui donnant si nécessaire un traitement symptomatique », soulignent des recommandations internationales publiées en 2021. Voilà un point rassurant. Néanmoins, quelques  préconisations existent pour les personnes qui souffrent de symptômes plus sévères.

En parler avec son médecin

Il est essentiel de commencer par une consultation longue avec un praticien qui prendra le temps d’évaluer votre état de santé de façon globale. Votre médecin traitant est très bien placé pour effectuer ce premier bilan. Le diagnostic est clinique (basé sur les symptômes). Il évaluera votre fatigue et vos douleurs à l’aide d’échelles adéquates, recherchera d’éventuels signes de comorbidités et de troubles anxiodépressifs. En fonction des résultats et s’il le juge nécessaire, votre médecin vous adressera à d’autres spécia­listes, comme l’indique le Pr Jean-Paul Stahl, infectiologue au CHU de Grenoble : « Si la personne est inhabituellement fatiguée et essoufflée, elle sera orientée vers un spécialiste de la réadaptation à l’effort, qui peut être soit un médecin de rééducation, soit un kinésithérapeute. »

 Bon à savoir  Les examens de biologie ne sont pas toujours significatifs, car des niveaux normaux de marqueurs inflammatoires n’excluent pas un syndrome post-infectieux.

Démêler les causes de la fatigue

Les états de fatigue prolongés après une infection virale sont très fréquents, mais très peu spécifiques. En effet, tout le monde peut se sentir fatigué pour des raisons très diverses. C’est pourquoi le Pr Stahl insiste sur le fait qu’« il est fonda­mental d’identifier les causes de cette fatigue pour adresser la personne au bon soignant ». Et il ajoute: « Souvent, on retrouve des troubles dépressifs derrière une fatigue qui dure. Les patients n’aiment pas quand le médecin évoque une dépression, mais c’est une maladie comme une autre, qui n’a rien d’infamant. » Dans sa pratique clinique, il propose souvent un suivi psychologique à ses patients qui doivent faire face à une convalescence longue et complexe. Plusieurs études confirment que le niveau d’anxiété ou de dépression avant l’épisode viral a un impact sur la sévérité du syndrome post-infectieux. 

SE TRAITER

Une alimentation équilibrée suffit. Aucune vitamine ni complément n’ont fait la preuve de leur efficacité pour raccourcir le temps de convalescence. L’organisme a surtout besoin de protéines en cette période. La reprise d’une activité physique doit être encadrée par un kinésithérapeute si votre médecin vous a prescrit une rééducation musculaire ou cardiorespiratoire. Dans le cas contraire, vous pouvez reprendre seul, mais faites-le très progressivement. Intensité modérée et courte durée sont les maîtres mots. Des sessions de marche de 10-15 minutes suffisent les premiers jours et la durée est augmentée peu à peu. « C’est la fatigue qui dicte le rythme : dès que vous vous sentez essoufflé et sans force, il faut s’arrêter », précise le Pr Stahl. Il n’existe pas de médicament spécifique de ces états de convalescence. Si cela est nécessaire, le médecin pourra prescrire du paracétamol en cas de douleurs, des antidépresseurs en cas de troubles dépressifs ou un autre traitement adapté à vos symptômes.

COVID LONG : LA MARCHE À SUIVRE

Parcours
Le suivi global est assuré par votre médecin traitant. Si votre situation médicale est complexe, il peut vous adresser à une « cellule de coordination post-Covid ». Des médecins internistes, pneumologues, neuro­logues, mais aussi des kinés et ergo­thérapeutes seront associés à votre prise en charge si besoin.

Mode de vie
Adaptez votre quotidien : repos et sommeil autant que nécessaire, alimentation équilibrée (sans régime d’exclusion), diminution de la caféine et de l’alcool, arrêt du tabac, reprise d’une activité physique quotidienne (marche, jardinage, ménage…). 

Médicaments
Les seuls traitements préconisés visent à soulager les symptômes : antalgiques, lavages de nez, traitements des troubles anxieux ou dépressif si nécessaire. Dans certains cas (diabète, problèmes cardiaques…), des traitements spécifiques seront prescrits.

GUILLAIN-BARRÉ, UN CAS TYPIQUE

Le syndrome de Guillain-Barré est une atteinte rare des nerfs qui se manifeste par une grande faiblesse musculaire et des pertes de sensibilité. Il est le plus souvent déclenché par une infection comme une mononucléose, une gastroentérite ou même une forme légère de Covid. Ce syndrome neurologique nécessite une hospitalisation rapide.

MALADIE DE LYME • UN SYNDROME COMPLEXE

La maladie de Lyme est consécutive à une infection par la bactérie Borrelia, après une piqûre de tique. Elle se traite le plus souvent avec des antibiotiques durant 2 à 4 semaines, ce qui suffit généralement à régler le problème. Mais dans certains cas, des douleurs musculosquelettiques, un déficit cognitif et une arthrite s’installent. Les personnes peuvent alors se voir prolonger leur traitement antibiotique, parfois pendant des mois, alors que cela n’a pas de bénéfice démontré. « Le Lyme chronique existe – mais j’appelle ça des séquelles – et les cas sont beaucoup moins fréquents que ce que l’on veut bien dire », estime le Pr Stahl, infectiologue. Il n’y a pas de chiffres consolidés pour les formes chroniques. 

« Il faut consulter un infectiologue ou un généraliste qui réalisera un vrai bilan. En cas de profond mal-être, il adressera le patient à un psychologue. Faites attention aux charlatans qui vont demander des analyses biologiques absurdes et vous faire perdre du temps », met en garde le spécialiste.

Il n’y a, à ce jour, aucun traitement spécifique pour ces formes qui s’installent dans le temps et restent assez mystérieuses. Il existe cinq centres de référence des maladies vectorielles à tiques (CRMVT) en France, qui sont chargés d’informer les patients et de faire de la recherche sur les formes prolongées de la maladie. 

La liste est disponible sur le site https://crmvt.fr.


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