mardi 25 octobre 2022

« Une vraie radio de malade ! » : sur Radio Pinpon, les patients tiennent le micro

Par   Publié le 24 octobre 2022

Il a 14 ans, une bouille ronde encore enfantine, un grand sourire avec des bagues. Autour de lui, les murs du petit local sont recouverts de pochettes de disques multicolores, d’affiches de concert – The Police, ZZ Top, Bob Dylan, Barbara, Iggy Pop, Jacques Dutronc, Amy Winehouse… Des barquettes d’œufs collées au plafond assurent l’isolation phonique.

Lukas (certains patients n’ont pas donné leur nom de famille) met son casque sur les oreilles, approche son visage du micro : « Bonjour et bienvenue dans votre nouvelle émission “C’est très facile 2.0”, une émission de jardinage sur Radio Pinpon. » Pour ce mercredi matin, Lukas a préparé quatre thèmes, « le pommier, le framboisier, le pêcher, le myrtillier », énumère-t-il d’un ton joyeux.

Ses émissions durent trois minutes, pendant lesquelles il distille ses conseils d’horticulture et d’arboriculture. « Ma passion, précise-t-il. Transmise par mon père. » Il a préenregistré les bandes-son chez lui, car il aime « prendre de l’avance ». Penché sur la console de réglages, Eric Lotterie, qui cumule les fonctions de technicien radio et d’infirmier psychiatrique, l’aide à les monter, à les mixer, puis à les mettre en ligne et à les programmer pour diffusion. Devant l’impatience de l’ado, il fait semblant de râler. « Votre génération, avec les réseaux sociaux, vous voulez tout, tout de suite. Moi, petit, je n’avais même pas de téléphone fixe. » Lukas le regarde, hilare : « Tu as connu aussi les pigeons voyageurs et la diligence ? »

Une indispensable soupape

Eric Lotterie, 59 ans, est soignant au pôle psychiatrie de l’hôpital de Niort depuis trente ans. Le 25 septembre 2018, il a lancé Radio Pinpon, webradio thérapeutique animée par des patients. « Une vraie radio de malade ! », clame son slogan. L’idée avait germé trois ans plus tôt dans la tête d’un autre Eric, Eric Bard, lui aussi infirmier psychiatrique à Niort, aujourd’hui à la retraite.

« On n’a pas de grille des programmes fixe. On estime qu’il y a déjà suffisamment de choses qui enferment à l’hôpital. » Eric Lotterie, infirmier psychiatrique

A l’époque, les deux Eric gèrent ensemble La P’tite Cafète, une cafétéria hospitalière où les patients travaillent comme serveurs et à laquelle se greffent des activités sociales (soirées cinéma, repas festifs…). Eric Bard, qui sait que son collègue anime une émission sur une FM associative, lui suggère : pourquoi pas une radio à l’hôpital ?

« On se tirait un peu une balle dans le pied, en faisant ça, sourit Eric Bard rétrospectivement, car on créait une activité supplémentaire sans poste d’infirmier en plus. Mais ce qui marche, en psychiatrie, c’est lorsque le patient est acteur de sa prise en charge, qu’il se l’approprie. Ça a davantage d’impact que si un médecin lui dit : “Tu feras ça de telle heure à telle heure.” Donc il faut qu’il y ait du choix, différentes offres de soins. Or l’hôpital, qui proposait par le passé de nombreux ateliers thérapeutiques, en propose aujourd’hui beaucoup moins. »

Le décor de Radio Pinpon a été réalisé par les patients. A Niort, le 30 mai 2022.

Il faut franchir les anciens porches d’entrée de l’hôpital, en pierre calcaire blonde, traverser les bâtiments en forme de « X » du pôle psychiatrie, puis contourner la rotonde vitrée de La P’tite Cafète : là, juste derrière, dans un ancien local technique qui autrefois servait de débarras, se cache le studio de Radio Pinpon, diffusée en continu sur le Web et réécoutable en replay.

A l’intérieur, du meuble à CD bariolé en carton aux poèmes encadrés pendus au plafond, tout a été fait maison, par les patients. « La preuve, sourit Eric Lotterie, qu’avec le peu qu’on a on peut encore faire des choses. » Et ce malgré la crise de l’hôpital et de la psychiatrie, à laquelle le centre hospitalier de Niort n’échappe pas.

L’augmentation des besoins de soins psychiatriques depuis la pandémie et la pénurie de personnel se font sentir ici comme ailleurs. « On nous envoie faire des remplacements à droite, à gauche, en urgence, alors qu’on est censé occuper un poste fixe dans un service, décrit un infirmier psy niortais. On perd ainsi le lien avec les patients, ils en souffrent. »

Nathalie, soignée à Niort depuis presque trente ans, confirme : « Il y a vingt ans, les infirmiers et les médecins étaient beaucoup plus nombreux, donc plus détendus, chaleureux. Depuis dix ans, ils ont fermé les activités. Il reste des temps d’accueil où, comme il n’y a rien à faire, les gens parlent en boucle de la maladie. »

Dans ce contexte, Radio Pinpon offre une soupape. Emissions de cuisine et de poésie, magazine rock ou musique classique, reportages, débats avec invités, théâtre radiophonique… Au sein de l’antenne, les possibilités sont aussi nombreuses que les idées qui naissent dans l’imagination des patients. Participent à la fois des personnes hospitalisées en continu et d’autres suivies en hôpital de jour ou en consultation.

« Ils créent leurs émissions, seuls ou à plusieurs, récurrentes ou non, explique Eric Lotterie. On n’a pas de grille des programmes fixe. On estime qu’il y a déjà suffisamment de choses qui enferment à l’hôpital. Chacun participe selon son envie, certains simplement en apportant des musiques, d’autres en enregistrant des jingles. Ces petites phrases courtes diffusées aux tops horaires permettent d’impliquer des personnes plus en difficulté avec la parole. J’ai été surpris de voir frapper à la porte du studio des patients psychotiques très handicapés. »

Recommandée par les médecins

Lukas a décidé que son émission serait programmée tous les samedis et dimanches. L’adolescent prévoit déjà un prochain format sur l’écologie, lorsqu’il aura fait le tour des plantes du jardin. « Venir ici, ça me permet de m’apaiser, de m’évader psychologiquement du collège, explique-t-il, le casque toujours sur les oreilles. Parce que je m’entends bien avec les adultes, mais avec les gens de mon âge, c’est la catastrophe. Ils me traitent de barjot, à cause de mes troubles dyslexiques. Je suis suivi à l’hôpital depuis tout petit. Au collège, tout le monde le sait et je suis sans arrêt jugé. Comme je n’aime pas le rap, le foot, les jeux vidéo, ça me rend encore plus bizarre à leurs yeux. Radio Pinpon, c’est un abri. Je fais ce que j’aime et personne ne me dit : “Toi, tu es taré.” »

« A notre époque, il faut être dans le faire et, là, j’y suis, à ma façon. Ça m’ouvre la possibilité d’une vie sans alcool que je n’imaginais pas. » Olivier, 49 ans

Olivier entre dans le studio au moment où Lukas s’en va. Lui aussi est un régulier du mercredi matin. Depuis plusieurs mois, à raison de deux heures par semaine, il monte avec Eric une émission sur la chanteuse Barbara. C’est la médecin alcoologue qui le suivait au Csapa, le centre de soins d’accompagnement et de prévention en addictologie, rattaché à l’hôpital, qui lui a conseillé Radio Pinpon.

Rien dans l’allure de ce beau garçon mince, brun, à l’air juvénile, en jeans brut et sweat marine à capuche, ne trahit les années d’alcoolisme qui ont détruit son foie et son œsophage et l’ont conduit en réanimation. A 49 ans, il en paraît quinze de moins. « J’ai fait un burn-out en 2008, raconte-t-il. Je travaillais à Paris pour une mutuelle, j’étais très isolé. Je suis revenu à Niort et c’est là que j’ai connu le Csapa. »

Dans les locaux de Radio Pinpon, à Niort, le 31 mai 2022.

Olivier est abstinent depuis sa dernière hospitalisation en psychiatrie, en juillet 2021. « Grâce à Radio Pinpon, je tiens. Ça me donne la sensation de produire quelque chose. A notre époque, il faut être dans le faire et, là, j’y suis, à ma façon. Ça m’ouvre la possibilité d’une vie sans alcool que je n’imaginais pas. »

Olivier a découvert Barbara à l’âge de 8 ans, en entendant L’Aigle noir, sur RTL. « Je me souviens du lieu, du jour… J’ai ressenti un choc. J’ai demandé à ma mère qui chantait, et j’ai voulu tout écouter d’elle. Quand j’étais ado, cette artiste me transportait. Je pensais : je ne suis plus tout seul. Ce que je ressens, la tristesse, la colère, si c’est mis comme ça en musique et en paroles, c’est que ça vaut quelque chose. Pourtant, quand j’ai entendu L’Aigle noir, je n’ai pas compris le lien avec l’inceste. » Olivier a été victime d’agression sexuelle dans son enfance. Il a retrouvé une vieille ordonnance : à l’âge de 10 ans, un médecin lui prescrivait déjà des somnifères pour adulte.

L’émission d’Olivier sera une suite de rendez-vous hebdomadaires, thématisés. « Barbara et l’enfermement, pour commencer, car elle a beaucoup écrit sur l’hôpital et la prison, explique-t-il. Puis Barbara et son public, ses compositeurs, Paris, la colère, les états d’âme… » Pour chacune, la liste des chansons à diffuser est prête. Ce mercredi, Olivier s’entraîne avec Eric sur « Barbara et Paris ». Leurs voix se font feutrées, Eric allume son micro, présente Olivier par son nom de radio : « Bonjour, l’homme en habit rouge. — Bonjour, Eric… »

Mieux qu’un anxiolytique

« Une patiente m’a dit un jour : “Une heure de Radio Pinpon, c’est meilleur qu’un Xanax”, relate Eric Lotterie. C’est un outil de soin. L’expression – au sens de “sortir de soi ce qui est ressenti intérieurement” – est ce qui manque le plus à l’institution psychiatrique, centrée sur le repérage du symptôme. On accueille des gens délirants. Les médicaments abrasent le délire, parce que ce n’est pas possible de laisser quelqu’un crier toute la journée ou se mettre en danger… Le problème, c’est que ce délire a une fonction. Il est le monde dans lequel les patients se réfugient parce que celui dans lequel ils vivent est insupportable. Une fois qu’on est enfermé, sédaté, comment s’exprimer ? »

Radio Pinpon propose de le faire à travers la discussion, la lecture, l’écriture, la musique, le chant, la poésie… « Il y a parfois des patients qui enregistrent des émissions en état délirant, poursuit Eric Lotterie. Évidemment, il ne s’agit pas d’encourager ou de faire advenir le délire. Mais s’ils ne peuvent pas le déposer ici, alors où ? »

Pour Radio Pinpon, Cédric, 44 ans, s’est lancé dans les micro-trottoirs et les reportages. A Niort, le 30 mai 2022.

Pour les personnes hospitalisées, les séances de Radio Pinpon peuvent être prescrites par les médecins. Yves Ménétrier, psychiatre, chef de service à l’hôpital de Niort, y a parfois recours. « On a beaucoup de pathologies de la communication. La radio, c’est important pour la confiance en soi et le rapport à l’autre. Si l’on est dépressif, cela permet de sortir de sa dépression. Si l’on est psychotique, avec un trouble de la relation, elle aide à rétablir la vie sociale. Un psychotique ne sait pas si la personne en face de lui est agressive ou bienveillante, il la croit souvent menaçante… Ce qui explique les réactions inappropriées. La radio est un soutien pour reconnaître les sentiments que l’on éprouve et les sentiments des autres. »

Radio Pinpon est aussi un lien avec l’extérieur de l’hôpital, entre le dedans protecteur et le dehors parfois inquiétant. Cédric, 44 ans, s’est ainsi lancé dans les micros-trottoirs et les reportages. « On m’a diagnostiqué schizophrène à l’âge de 23 ans, raconte-t-il. Au moment de la création de Pinpon, j’étais hospitalisé, dans mon lit, je n’arrivais plus à me lever. Un médecin m’avait fait sortir de l’hôpital du jour au lendemain, après douze ans d’enfermement, ça m’avait fait un choc, j’étais retombé à zéro. »

Il a remonté rapidement la pente, notamment grâce à la radio. « Ça m’a motivé. J’ai toujours aimé rencontrer des gens. Eric m’a envoyé faire un reportage sur un festival de danse à Niort. J’ai interviewé le public sur leur ressenti des spectacles. Après, j’ai recroisé des personnes que j’avais interrogées et qui m’ont reconnu. Ça fait du bien, d’être reconnu pour ça, plutôt que d’être regardé en tant que malade. »

Cédric a ensuite couvert pour Radio Pinpon les championnats de France de boccia, un sport de pétanque adapté au handicap physique. « Eric m’a prêté le matériel, j’ai tout fait seul, ça a donné une émission de vingt minutes, avec de beaux témoignages. »

Un sentiment d’appartenance

« Démystifier la folie » est une des missions de Radio Pinpon, insiste Eric Lotterie. « La maladie mentale fait peur. Parce qu’une crise schizoïde peut être impressionnante, mais aussi en raison des préjugés, des représentations médiatiques. Une radio peut faire évoluer cette image, à la fois aux yeux du public et dans la perception que les patients ont d’eux-mêmes. Il y a une culpabilité à être malade, à ne pas travailler. “Je ne sers à rien” est une phrase que j’entends souvent, et ça me met en colère ; c’est la conséquence des discours sur l’assistanat. J’aimerais que les malades cessent de s’excuser. »

Ce mercredi midi, Nathalie, Luc, Thierry, Cédric, Rodolphe et Sébastien partagent un sandwich sur les tables en aluminium de la terrasse extérieure de La P’tite Cafète. Les locaux sont pourtant fermés, c’est l’heure de pause des infirmiers, mais les patients de l’hôpital de Niort ont l’habitude de s’y retrouver.

Rodolphe lit à l'antenne des extraits de lectures qui l’ont touché. A Niort, le 30 mai 2022.

« La radio, et l’énergie qu’Eric met dedans, ça crée un lien entre nous, dit Rodolphe, 49 ans. On a le sentiment d’une communauté. Moi, par exemple, je n’ai pas besoin de participer à Radio Pinpon, mais je le fais, car j’en ai envie. » L’après-midi, il enregistre un extrait d’une de ses lectures, La Peau et les Os, de Georges Hyvernaud. Sa voix grave, au timbre velouté, rend presque doux un texte qui ne l’est pas, récit de la captivité d’un français en Allemagne pendant la seconde guerre mondiale. « Je suis en déprime en ce moment, alors je vais vers des choses tristes. Ça me fait du bien. Ce sont des auteurs qui ont fait quelque chose de leur malheur. »

« On n’arrive pas par hasard en psychiatrie. On a tous des points communs. Pour faire court, je dirais : une enfance sans amour. » Luc, 61 ans

Rodolphe habite seul à la campagne. Il voit une psychologue à l’hôpital de Niort tous les quinze jours, un psychiatre tous les deux mois. Diagnostiqué bipolaire à tendance schizophrène, il a été hospitalisé une première fois au début de ses études supérieures, en 1995. « C’est le timing pour beaucoup d’entre nous, dit-il. On a des enfances cassées, des familles toxiques. Quand on nous sort de l’étau, ça explose. »

Il se souvient avec précision des hallucinations visuelles et auditives dont il souffrait à l’époque. « Mes poils poussaient à l’intérieur de ma peau. Je voyais des caméras, des micros partout, je démontais les tableaux, les téléphones pour les chercher, je me sentais sans cesse menacé. » Rodolphe a voulu arrêter son traitement plusieurs fois. A chaque tentative, les hallucinations sont revenues. « Je sais maintenant qu’il faut que je prenne mes médicaments à vie. » « Comme dit Rodolphe, appuie Luc, 61 ans, yeux bleu outremer et crinière blanche, on n’arrive pas par hasard en psychiatrie. On a tous des points communs. Pour faire court, je dirais : une enfance sans amour. »

Luc semble avoir fait tous les métiers du monde : garçon de café, électricien, comédien, convoyeur de chevaux en Uruguay… La maladie l’a rattrapé il y a vingt ans. Avec Rodolphe, il partage cette lucidité pour décrire les symptômes de la « folie »« Lors de ma première hospitalisation, raconte-t-il, ils m’ont attrapé comme un animal. Mais, franchement, ils ont eu raison. J’entendais des voix, c’était dur. Je voyais la Cène, avec Jésus, sur des tableaux qui n’avaient aucun rapport. Il y avait beaucoup de choses avec la religion dans mes délires, mon père était très croyant, c’est peut-être pour ça. J’étais persuadé d’être pourchassé, poursuivi par des caméras. Je me suis enfui en pleine nuit et caché sous un tronc d’arbre pour qu’il me protège des caméras. »

Luc écrit des poèmes et des nouvelles pour Radio Pinpon depuis sa création, en 2018.

Luc participe à Radio Pinpon depuis les débuts. « Quand Eric m’a parlé du projet, je me suis mis la pression. “Tu te souviens ?”, demande-t-il en souriant à l’infirmier. J’avais écrit dix textes, je suis arrivé avec. Et tu m’as dit : “Il va te falloir une émission.” » Luc écrit en binôme avec un autre patient, Kévin, 35 ans, rencontré à l’hôpital. « Kévin me donne des thèmes, comme des petits challenges, on se motive, explique-t-il. Enormément de choses ont découlé pour moi de Radio Pinpon. Je me suis mis à prendre des cours de français, d’informatique. Ça m’a aidé pendant le Covid. Alors que beaucoup de gens se sentaient entravés, j’avais l’impression d’avoir une liberté parce que j’écrivais. »

Les Brigades du rire

Entre poésie et nouvelles, les textes de Luc racontent un ours polaire dans un bal masqué, une serpillière qui vit un amour caché avec son manche à balai, une « seconde chance » qui permettrait de rejouer un moment de sa vie, mais un seul, attention au choix.

Avec Kévin, Nathalie, Jean-Pierre et Thierry, Luc a fondé une petite troupe, Les Brigades du rire de Radio Pinpon, et enregistré une série de sketchs désopilants. Les bras tatoués, une carrure d’ours et une douceur d’ourson à la voix murmurée, Thierry, 60 ans, évoque à quel point l’expérience lui a fait du bien. « Si j’arrive à parler un peu plus maintenant, c’est grâce à ça. Tu m’aurais vu il y a trois, quatre ans, je ne disais pas un mot. Les choses étaient stockées dans mon cerveau et n’en sortaient pas.

Assise à ses côtés, Nathalie, 49 ans, le regarde en hochant la tête. A 20 ans, elle a connu une période d’aphasie totale. « Trois années muettes », décrit-elle. Quand les mots sont revenus, elle a dit les viols que lui a fait subir, enfant, un ami de son père, le suicide de son grand-père le jour de son anniversaire, ses parents qui ne l’ont pas protégée… « Parce que, si on est malades, ça ne vient pas de rien. Ce n’est pas un virus qu’on a attrapé comme la grippe. »

Sur l’antenne de Pinpon, Nathalie apprécie de pouvoir parler « à la fois de la maladie et de totalement autre chose ». « Avant, j’avais besoin de tout contrôler. Maintenant, je fais des interviews improvisées, sans préparation. Depuis que je viens ici, j’ai énormément changé, progressé comme disent les médecins. Pourtant, mon traitement est resté le même. Ce n’est donc pas grâce aux médicaments mais à l’humain. »

Eric Lotterie sourit et ajoute que la vraie réussite de la radio thérapeutique arrive le jour où les patients n’en ont plus besoin. « Mon objectif, c’est de ne plus vous voir ! » Il se souvient d’une séance d’enregistrement de bruitages, un vendredi après-midi, où aucun des acteurs n’était d’accord. Chacun demandait sans cesse de refaire la prise. « Je pensais : “Ils vont me faire mourir, j’en peux plus.” Mais ce qui est remarquable avec cette radio, c’est que l’exigence vient des patients. L’inverse de ce qui se passe dans les services où ce sont les soignants qui ont des exigences vis-à-vis des soignés. J’avais lancé un projet, ils en ont fait quelque chose de précieux. »


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