vendredi 3 juin 2022

Troubles des conduites alimentaires : «Les confinements ont fait des ravages»




par Chloé Rabs  publié le 2 juin 2022 

Depuis la crise du Covid, la forte augmentation des cas d’anorexie mentale, de boulimie ou d’hyperphagie boulimique alarme les professionnels. Les listes d’attente s’allongent dans les centres spécialisés, laissant parfois les victimes sans possibilité de soins.

Sur son compte Instagram, Elisa, 17 ans, partage son quotidien parsemé de recettes healthy et d’entraînements à la salle de sport. Un mode de vie sain, mais qu’elle accompagne d’un message un peu particulier : «On va s’en sortir, ne lâchez rien ! #TCA». Comme 1 % des femmes, Elisa souffre d’anorexie, une forme de trouble des conduites alimentaires (TCA). Aujourd’hui sur le chemin de la guérison, tout bascule pour la jeune lycéenne lors du premier confinement de mars 2020. Enfermée chez elle, Elisa démarre des programmes sportifs faisant fureur à cette période. Seulement, très vite, le sport et son poids deviennent une obsession. «Au début c’était très confortable, j’étais contente de perdre du poids. Puis, ça a déraillé… J’ai complètement arrêté de m’alimenter, mon état s’est dégradé et, à la fin, je perdais carrément mes cheveux par touffes.» En août 2020, quatre mois plus tard, Elisa a perdu 15 kilos et n’en pèse plus que 56 pour 1m79.

En France, plus de 600 000 personnes souffrent de TCA, particulièrement des femmes âgées entre 17 et 25 ans. Anorexie mentale, boulimie nerveuse, ou hyperphagie boulimique : des pathologies qui peuvent s’exprimer par la restriction ou l’excès de nourriture, suivies ou non d’une activité compensatoire (se faire vomir ou consommer des laxatifs). Si l’on englobe toutes les formes de troubles des conduites alimentaires, les professionnels estiment que 10 % de la population pourrait même être concernée. Très préoccupants car très mortels − les TCA constituent la deuxième cause de mortalité prématurée chez les 15-24 ans, juste après les accidents de la route − ces troubles explosent depuis deux ans.

Les professionnels du secteur sont submergés par une «vague TCA» : +30 %, +40 %, voire +50 %, selon diverses estimations. Le CHU de Montpellier a ainsi affronté une augmentation de 53 % d’hospitalisations entre le premier semestre 2020 et le premier semestre 2021, et un boom de 234 % des demandes de prise en charge. «Stress psychologique, appauvrissement brutal des relations sociales, précarisation professionnelle, déstructuration du rythme journalier… La crise sanitaire a été le cocktail parfait mais malheureux pour déclencher des TCA», explique à Libération Pierre Déchelotte, chef du service nutrition du CHU de Rouen, où les demandes de consultations ont doublé depuis deux ans. Même si les causes des troubles alimentaires sont multifactorielles − facteurs biologiques neuro-hormonaux, génétiques, ou environnementaux − les spécialistes s’accordent pour imputer à la pandémie et ses conséquences l’aggravation ou l’apparition de cas de TCA.

La France ne fait pas exception. Aucune partie du monde n’est d’ailleurs épargnée. En partenariat avec l’université Monash, la Butterfly Foundation, ligne d’écoute australienne pour les TCA, a ainsi passé en revue 72 études internationales et révèle que le problème est aussi planétaire que la pandémie de Covid-19 elle-même. Ainsi, en Amérique du Nord, les visites aux urgences pédiatriques ont bondi de 62 % en 2020 par rapport aux années 2018-2019. De plus, la pression exercée sur les lignes d’assistance pour les troubles alimentaires a augmenté de 195 % au Royaume-Uni, de 67 % au Canada et de 57 % aux Etats-Unis durant cette même période. Des chercheurs australiens ont également montré que les patients souffrant de troubles de l’alimentation étaient près de neuf fois plus susceptibles d’être réadmis à l’hôpital dans les trente jours suivant le confinement, 33 % à 40 % des patients signalant l’apparition ou l’exacerbation des symptômes de troubles de l’alimentation étant directement liés à la pandémie ou au confinement.

Etudiants fortement touchés

Comme Elisa, en 2020, Maxence a vu sa vie basculer. Le jeune homme de 24 ans, féru de course à pied, est passé d’un jour à l’autre, avec l’arrivée de la pandémie de Covid-19, «d’une vie en extérieur à une vie confinée». Il l’avoue : «Je n’ai pas supporté.» Seul chez lui, il est alors en proie à des crises de boulimie nocturne. «Un paquet de glace, 1 kilo de carottes, tout ce que j’avais dans le frigo y passait.» Au début, il dédramatise («Je me levais juste pour manger, ce n’est pas si grave.») De toute façon, il n’a jamais entendu parler de TCA. Mais après dix mois de crise, et 20 kilos en plus sur la balance, il décide d’aller consulter un psychologue qui va mettre un mot sur sa maladie.

Une prise de poids fulgurante pouvant résulter de TCA, Pierre Déchelotte alerte sur l’augmentation de la prévalence de l’obésité en France, que l’Organisation mondiale de la santé qualifie «d’épidémie». En 2020, 17 % de la population en était atteinte, un chiffre qui a doublé depuis 1997, selon la dernière enquête épidémiologique nationale Obépi-Roche publiée en juin 2021 par la Ligue nationale contre l’obésité. «Or 50 % à 60 % des patients obèses ont un trouble du comportement alimentaire», prévient le nutritionniste de Rouen. Cette montée des cas de TCA, Pierre Déchelotte l’observe aux travers d’études menées avec d’autres confrères depuis 2009 auprès de 3 000 étudiants normands. Selon leurs résultats, parus dans la revue Nutrients, «la prévalence des TCA était stable entre 2009 et 2018 puis a augmenté de manière significative en 2021». En 2018, 31 % des filles et 13 % des garçons souffraient de TCA. Trois ans plus tard, les chiffres ont quasiment doublé pour atteindre «près de 51 % des filles et 31 % des garçons interrogés», s’alarme l’expert.

Une hausse inquiétante sur cette population cible et fortement à risque qu’observe tous les jours Xavier Pommereau, psychiatre au sein de la clinique Béthanie, en Gironde. Situé à quelques mètres du campus de Bordeaux, le service accueille majoritairement des étudiantes. «Les confinements ont vraiment fait un ravage. En deux ans, nos demandes de consultation ont doublé», révèle le psychiatre. Et malgré l’espoir proche d’un retour à une forme de normalité après la parenthèse désenchantée de la pandémie de Covid-19, Xavier Pommereau ne se montre pas optimiste pour autant. Ses patients lui font désormais part de leur «désarroi» et de leur «angoisse» face à la guerre en Ukraine et les risques de troisième guerre mondiale brandis par le régime russe. Ou, plus prosaïquement, devant l’emballement de l’inflation qui pénalise un peu plus une population jeune déjà précarisée et gagnée par la paupérisation. Un climat anxiogène qui alimente ou déclenche des TCA.

Patients plus jeunes et plus malades

L’utilisation intensive des réseaux sociaux, notamment pendant les périodes de confinement, est également pointée du doigt par les professionnels. En cause : la propagation de comptes fitness, menés par «des coachs qui se prétendent nutritionnistes parce qu’ils ont eu quatre heures de cours», attaque Nicolas Sahuc. Diététicien spécialisé dans les troubles alimentaires, il assure recevoir de plus en plus de patients déplorant le rôle destructeur d’Instagram ou de TikTok. Les nombreux challenges mis en avant par ces applications, comme l’objectif de faire 10 000 pas par jour ou de s’entraîner cinq fois par semaine, peuvent en effet contribuer à faire basculer les plus vulnérables dans la spirale infernale des TCA. Selon Amandine Rochedy, maîtresse de conférences en sociologie à l’Université de Toulouse, cette aspiration à un mode de vie sain, voire hygiéniste, basé sur des idéaux de repas et d’entraînement, «est devenue une norme sociale». Cela «crée une stigmatisation pour ceux qui n’arrivent pas à l’atteindre et peut déclencher des troubles alimentaires».

Cette vague TCA, particulièrement ravageuse chez les adolescents, déferle sur les services hospitaliers comme le montrent les derniers points mensuels sur la santé mentale établis par Santé publique France. Ainsi, pendant la première semaine de février (par rapport à la semaine précédente), les passages pour troubles de l’alimentation avaient bondi de 53 % chez les 15-17 ans (soit +8 passages) tandis que pendant la première semaine de mars (par rapport à la dernière de février), ils étaient à nouveau en hausse chez les enfants de 0-10 ans (+44 % soit +8 passages) et 11-14 ans (+33 % soit +4 passages). L’augmentation se poursuit la dernière semaine de mars (par rapport à celle précédente) chez les 11-17 ans, avec 16 passages supplémentaires (soit +50 %) mais ceux-ci sont restés stables la dernière semaine d’avril.

En clair, même si la vague semble avoir atteint son sommet fin 2021, elle ne perd, depuis, rien de son ampleur. Un nombre toujours élevé de patients présentant des TCA se présentent aux urgences, mais on note surtout un élargissement du spectre des patients. «Alors que le patient type est une adolescente ou une femme, on est confronté de plus en plus à des adultes, des hommes, mais surtout des enfants très jeunes», dépeint à Libération Philip Gorwood, chef de la Clinique des maladies mentales et de l’encéphale du centre hospitalier Sainte-Anne à Paris.

Très rares avant l’âge de 15 ans, les troubles des conduites alimentaires se sont pourtant immiscés dans cette tranche d’âge vulnérable. C’est d’ailleurs la communauté des pédiatres et des pédopsychiatres qui a alerté en premier, à l’automne 2021, le gouvernement. «On a été très étonné de ce phénomène tout à fait inattendu et qui reste très mystérieux», réagit Frank Bellivier, délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie, contacté par Libération. Il l’assure : cette augmentation est à prendre en compte dans un ensemble de manifestations nouvelles chez les très jeunes. «Davantage de tentatives de suicide, d’anxiété et de dépression», dit-il. Pour tenter de répondre à cette urgence, une coopération entre pédiatres et pédopsychiatres s’est mise en place. Et «jusqu’à 70 % des lits de pédiatrie ont été occupés par des situations de pédopsychiatries», détaille Frank Bellivier, nécessitant des renforts inédits d’infirmiers, de psychologues et de médecins.

Ces nouveaux profils s’accompagnent également de pathologies plus sévères, avec surtout une modification de symptômes qui laisse les spécialistes pour l’instant désarmés. «Les anorexiques sont d’ordinaire des adolescentes très perfectionnistes et très bonnes élèves, détaille Sébastien Guillaume, responsable de l’équipe TCA au CHU de Montpellier. Désormais, on a affaire à de jeunes filles très instables émotionnellement, à haut niveau de risque suicidaire, et ne présentant pas forcément des poids très bas.» Mais elles développent, poursuit-il, des aphagies et le médecin se retrouve face à des «patientes qui refusent de s’alimenter et qui peuvent donc perdre du poids extrêmement rapidement». Un tableau plutôt inhabituel qui alarme et met en difficulté les professionnels, contraints de repenser les modalités de soin.

Médecins débordés

Plus inquiétant encore, cette situation périlleuse s’immisce dans des services spécialisés déjà sous hypertension avec la crise structurelle des soins médicaux en France, et singulièrement dans les hôpitaux, où les professionnels ne peuvent désormais répondre aux besoins de tous les patients. Il faut ainsi attendre deux mois pour consulter à la clinique Béthanie et patienter sur une liste de 200 noms pour obtenir un rendez-vous au service spécialisé de Saint-Anne à Paris. Les délais de prise en charge s’allongent comme jamais. Et ni les professionnels, ni les patients n’entraperçoivent la moindre sortie du tunnel. «Depuis quatre mois, je cherche sans relâche une place en hospitalisation pour une patiente, sans résultat», déplore à Libération Nathalie Godart, présidente de la Fédération française anorexie boulimie (FFAB). Pédopsychiatre au centre Colliard dans Paris, elle a dû complètement fermer ses portes aux nouvelles consultations. «Le suivi de nos patients est déjà altéré : au lieu de les voir une fois toutes les deux semaines, on ne les voit plus qu’une fois tous les deux mois.» Et de s’alarmer : «On ne peut pas continuer comme ça !»

Sans oublier que l’hospitalisation étant souvent très longue, entre quatre à six mois, les places sont «bloquées» pendant un certain temps. «Plus on tarde à prendre ces pathologies en charge, moins on a de chances de parvenir à les guérir», prévient Philip Gorwood, de Saint-Anne. Passé le cap de l’entrée dans la vie adulte, les TCA commencent à s’installer durablement et peuvent devenir chroniques. Une situation dramatique, plaide le diététicien Nicolas Sahuc qui consulte notamment à Nîmes, et avoue être obligé de faire du «triage». «On ne garde plus que les patients dont l’état est le plus dégradé et où les situations vitales sont engagées.» Les patients jugés «moins graves» sont donc tout bonnement renvoyés chez eux.

Morgane, 28 ans, en est l’illustration. Et la victime. Etudiante en BTS, la jeune femme est «tombée», dit-elle, dans l’anorexie à 21 ans et souffre également de boulimie et d’hyperphagie. Après deux hospitalisations, dont la plus grave à 33 kilos pour 1m71, elle est alimentée par sonde naso-gastrique depuis huit mois. Avec désormais un IMC de 23, dans la norme, elle peine à trouver une place en clinique. «Je demande de l’aide, mais on me la refuse, s’attriste-t-elle. Je ne suis pas assez malade pour eux. Ça fait sept ans que je me traîne des TCA, je voudrais m’en sortir. Seulement, on ne m’en donne ni les moyens ni les possibilités.» En «colère» contre le système, elle confesse avoir eu l’impression d’être «plus un chiffre qu’un être humain» lors de ces précédentes prises en charge : «Leur seul objectif était de me faire reprendre du poids, d’augmenter mon IMC. Maintenant que c’est fait, je n’ai plus le droit à un suivi.»Morgane a beau avoir multiplié les demandes, mais, face aux refus, elle se voit contrainte de s’éloigner de chez elle pour avoir une chance d’être prise en charge médicalement.

Inégalité géographique

Comme pour les généralistes, les TCA sont victimes d’importants déserts médicaux. Selon un rapport commun entre la FFAB et la Direction générale de l’offre de soins réalisé en 2019, sur les 2 694 établissements de santé interrogés, seuls 8 % − soit 219 établissements − déclarent prendre en charge des patients souffrant de troubles alimentaires. Parmi eux, ils sont seulement 70 à disposer d’une unité d’hospitalisation temps plein spécialisée dans la prise en charge de ces pathologies. Encore plus restreint, le rapport ne compte que six pôles de «niveau 3» pour les patients les plus sévères, situés en Ile-de-France, à Saint-Etienne, Montpellier, Nantes, Rouen et Lille.

Une inégalité géographique et territoriale qui engorge les services et complique un peu plus une recherche de soins déjà ubuesque des patients. «Les personnes venant des Landes ou de Dordogne sont particulièrement démunies, observe ainsi Xavier Pommereau de la clinique Béthanie. Plus de la moitié de nos patients viennent de plus de 150 kilomètres d’ici.» Même constat partout en France et particulièrement dans le Sud où il n’y a, assure un expert, «rien entre Saint-Etienne et Montpellier». Résultat : le CHU de Montpellier a décidé d’arrêter d’accueillir des patients de toute la France. «On limite les soins aux personnes de la région», admet Sébastien Guillaume. Un tri éthiquement discutable. Et qui rend «dingue» Morgane. La jeune femme originaire de Brive-la-Gaillarde s’est ainsi vue refuser une place à l’hôpital Sainte-Anne, à la clinique Caradoc à Bayonne, et envisage de rejoindre celle de Castelviel, à près de 200 kilomètres de chez elle.

Sauf qu’à cette distance, difficile d’imaginer un suivi adéquat en sortie d’hospitalisation. Une double peine pour ces patients qui, une fois convalescents, se heurtent à un nouveau mur et ne parviennent pas à dégoter l’aide escomptée. Elodie a dû ainsi batailler pendant trois ans avant de pouvoir traiter son anorexie et sa boulimie. A 33 ans, difficile de trouver une prise en charge pour adulte, là où les cliniques s’arrêtent majoritairement à 24 ans. Encore plus délicat aussi de trouver des professionnels compétents.«Sur quinze médecins, la moitié ne connaissait même pas les TCA»,déplore-t-elle. Loin de prendre son cas au sérieux, certains lui ont même tout naturellement dit d’arrêter de se faire vomir, de manger davantage et d’aller faire du sport. «Un psychiatre m’a même avoué qu’il ne pouvait rien faire pour moi, qu’il se sentait démuni. Ça m’a vraiment fait mal. J’ai commencé moi-même à me demander si je ne jouais pas la comédie.»

Allouer plus de moyens

Si ce déficit chronique de prise en charge des souffrances alimentaires a de multiples causes, la première concerne le défaut de formation des professionnels. «Des médecins traitants ne savent pas qu’il faut vérifier la kaliémie − le taux de potassium dans le sang − des patients boulimiques, qui se font vomir, exemplifie Xavier Pommereau. Or un taux trop faible de potassium peut être fatal. Certains patients meurent de se faire vomir à outrance et les collègues ne le savent pas.» De plus, il regrette que les patients souffrants de TCA aient toujours «mauvaise réputation». «Des médecins traitent les jeunes filles de manipulatrices et pensent que si elles faisaient un effort, elles s’en sortiraient d’elles-mêmes.» Nombre de spécialistes interrogés l’assurent : certains services non spécialisés refuseraient de prendre en charge ces pathologies.

Face aux alertes des professionnels du secteur, et à l’urgence sanitaire qui tient de plus en plus à une crise sanitaire majeure, les pouvoirs publics commencent à investir très modestement pour une meilleure prise en charge des TCA. «Avant, c’était un angle mort des politiques publiques mais ça change doucement», se félicite Nathalie Godart. En 2020, un premier timide soutien à la filière de… 3 millions d’euros a été versé aux agences régionales de santé. Ce soutien est depuis renouvelé, néanmoins, de manière moins importante, déplore la présidente de la FFAB : «2 millions d’euros en 2021 et plus que 1 million en 2022.» Une baisse arbitrée «avant que l’on ne détecte l’augmentation des cas», souligne néanmoins Frank Bellivier. Le délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie veut croire que, face à la situation actuelle, des investissements plus importants seront consacrés dans les prochaines années pour traiter les inégalités territoriales.

Cependant, dans cette course contre les TCA, les pouvoirs publics ont bien un train de retard. Et les solutions apportées, plus de deux ans après le début de la crise sanitaire, ne sont pas encore satisfaisantes. «Ce qui remonte du terrain, c’est que la situation reste inexorablement difficile, admet Frank Bellivier. Les agences régionales de santé peinent à mettre au point des dispositifs efficaces.» Pour Philip Gorwood, de Saint-Anne, ces réponses restent en effet assez «superficielles». Et surtout beaucoup trop cosmétique. Il détaille : «Il nous faut surtout des moyens pour recruter des soignants, des psychologues, des médecins spécialisés, etc.»

Comme dans les autres services, et peut-être plus encore dans cette spécialité, le recrutement n’a rien d’une tâche facile. «Dans mon équipe, il manque 4 personnes sur 20», met en garde Nathalie Godart présidente de la FFAB. Pourtant, elle se considère tout de même chanceuse. Ailleurs, en moyenne, un tiers des postes restent non pourvus : «Plus de 30 % des postes d’infirmiers sont vacants au sein de l’APHP», affirme ainsi Frank Bellivier qui fait valoir la difficulté d’apporter des réponses en urgence lorsque la ressource médicale et paramédicale manque. «Ce n’est même plus une question d’argent, c’est une question de ressources humaines.»

Ce 2 juin, à l’occasion de la journée mondiale des TCA organisée pour la deuxième année, Nathalie Godart souhaite sensibiliser sur une urgence aussi majeure que sous diagnostiquée et sous-médiatisée. «L’objectif est désormais de couvrir toute la France avec un à deux centres de niveau 3 par région pour permettre à tout le monde de se faire soigner.» Une urgence dans l’état d’urgence médicale français : malgré les chiffres déjà alarmants, seul un patient sur sept souffrant de TCA serait identifié.

 

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