mardi 28 juin 2022

Chronique «Aux petits soins» Pour les patients atteints du cancer du pancréas, les résultats encourageants de l’activité physique adaptée

par Eric Favereau   publié le 28 juin 2022 

Une étude menée par l’institut Curie montre les bienfaits cliniques d’un suivi encadré pour les personnes atteintes de cette maladie, pour lesquelles les chances de survie sont faibles.

Quoi de neuf sur le front du cancer après le congrès de l’Asco (American society of clinical oncology), grand-messe annuelle où d’ordinaire se font quelques annonces spectaculaires ? Il y a bien eu la présentation d’un essai, le premier à montrer les effets bénéfiques d’un traitement sur les personnes souffrant d’un lymphome non hodgkinien. Mais aussi quelques avancées concernant les cancers du sein, avec des essais prometteurs dans de nombreux profils tumoraux, ainsi que pour les cancers digestifs. Il a également été question de nouvelles stratégies dites «agnostiques» ou «pan-tumorales», fondées sur des traitements établis en fonction d’une anomalie génétique.

Sans oublier une annonce choc par un laboratoire sur un médicament anticancéreux, totalement expérimental, qui semble avoir guéri tous les patients à partir d’un anticorps monoclonal qui permettrait d’éliminer les tumeurs dans le cancer colorectal. Mais, au final, rien de bouleversant. On peut même s’alarmer de l’absence d’études sur les retards en chaîne dans les prises en charge de cancers dans le monde, en raison de l’épidémie de Covid-19.

«Un résultat clair»

Revenons donc sur terre en nous attardant sur une étude réalisée par l’institut Curie et présentée à l’Asco sur l’activité physique au cours de traitements contre le cancer du pancréas. La problématique est connue. D’un côté, ce cancer souvent accompagné de mauvais pronostics, avec une espérance de survie limitée. Et de l’autre, le bienfait de l’activité physique lors d’une chimiothérapie. Mais lesdits bienfaits reposent sur des études limitées et pas toujours convaincantes. La Dr Cindy Neuzillet, gastro-entérologue et spécialiste des cancers digestifs à l’institut Curie, a présenté les résultats finaux d’une étude inédite, la plus importante jamais menée, coordonnée avec le Pr Pascal Hammel (AP-HP) depuis huit ans. Une étude randomisée, avec deux groupes – l’un avec chimiothérapie seule et l’autre avec chimiothérapie et activité physique adaptée. Elle a inclus plus de 300 malades.

Les patients du groupe activité physique adaptée étaient évalués«par des tests de condition physique réalisés avec un enseignant spécialisé afin d’établir un programme personnalisé d’exercices d’endurance (marche, vélo) et de renforcement musculaire (élastique) en complément des activités de la vie quotidienne». Ils étaient ensuite suivis pendant seize semaines pour réajuster le programme. En complément, un accompagnant de leur entourage (famille ou ami) était désigné pour encourager les patients à pratiquer les activités et entretenir leur motivation. «Il y avait un vrai enjeu d’évaluation de l’activité physique, explique Cindy Neuzillet. Car s’il y a un décret qui parle de l’activité physique dans la prise en charge du patient, pour autant cette prise en charge n’est pas remboursée. Et là, on apporte un résultat clair, avec un bénéfice cliniquement parlant. En plus, sur des patients qui sont dans des situations cliniques les plus délicates, avec un cancer du pancréas non opérable», insiste-t-elle.

Médiane de survie qui passe de douze à quinze mois

D’abord, on ne peut être qu’admiratif devant ces patients qui acceptent d’entrer dans une étude alors qu’ils ont une espérance de vie d’à peine un an. «Nos résultats sont encourageants. La médiane de survie est de quinze mois, et non plus de douze mois. La qualité de vie est meilleure, celle-ci étant mesurée par le patient qui s’auto-évalue en répondant à trente questions, raconte Cindy Neuzillet. Des améliorations autant sur le plan physique qu’émotionnel, avec moins de douleurs, moins d’insomnie.» Puis, la médecin de synthétiser :«Nous confirmons ainsi que l’activité physique adaptée est faisable et qu’elle est sans risque chez ces patients. Une seule conclusion à retenir : recommander la pratique d’activité physique adaptée aux patients atteints de cancer du pancréas avancé.»

Des résultats loin d’être anodins pour des patients, confrontés au pire des cancers. «Ce qui est important, dit Cindy Neuzillet, c‘est que cela leur donne un objectif, un but, et une activité. Bien souvent, ce sont des patients qui ont une fin de vie bien difficile, avec des douleurs et beaucoup de fatigues. Souvent faute de prise en charge clinique, ils se lancent dans des programmes alternatifs, notamment sur l’alimentation, et cela n’a pas beaucoup de sens. Là au moins, on leur propose quelque chose.»


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