vendredi 3 décembre 2021

Individualisation de l’allocation handicapés : nouveau rejet par les députés

Le Monde avec AFP  Publié le 2 décembre 2021

Réclamée par les oppositions au nom de la « justice sociale », la mesure a été repoussée par la majorité, qui a évoqué des visées électoralistes.

L’Assemblée nationale a de nouveau dit non, jeudi 2 décembre dans la soirée, à une individualisation de l’allocation adultes handicapés (AAH), réclamée par les oppositions au nom de la « justice sociale », mais repoussée par la majorité, qui a évoqué des visées électoralistes.

La proposition de loi contenant cette mesure sensible était examinée en troisième lecture lors d’une « niche » consacrée aux textes du groupe Parti communiste français (PCF). La « déconjugalisation » de l’allocation adultes handicapés consiste à calculer l’AAH sans tenir compte des revenus du conjoint, contrairement à ce qui est fait aujourd’hui.

Ses tenants, de la gauche à la droite en passant par le groupe Agir, allié de la majorité, ont rappelé que certaines personnes handicapées sont amenées à choisir entre vivre en couple, au risque de voir leur allocation diminuer, ou la conserver, mais en renonçant sur le plan légal à leur union. « Ce prix de l’amour est inacceptable » et la règle en vigueur « contraire à la plus élémentaire humanité », a martelé le rapporteur, Stéphane Peu (PCF).

« Nous ne lâcherons pas », a assuré Aurélien Pradié (Les Républicains, LR), qui avait aussi porté le sujet en octobre devant l’Assemblée.

« Impasse »

La majorité La République en marche-Mouvement démocrate (LRM-MoDem) s’est interrogée sur « le sens » de cette proposition sur l’AAH « à quelques mois de la présidentielle », et a invité ses opposants à la porter dans la campagne.

Le gouvernement est contre la « déconjugalisation », qu’il juge inéquitable, car bénéficiant aux modestes comme aux fortunés. Il la présente aussi comme une « impasse » de nature à remettre en cause « l’ensemble du système de protection sociale français fondé sur la solidarité familiale et nationale », une position répétée dans l’Hémicycle par Sophie Cluzel, la secrétaire d’Etat aux personnes handicapées. « Je ne vois nulle part de justice sociale », a-t-elle répété, évoquant par exemple les personnes handicapées assumant financièrement leur famille et qui pourraient perdre l’allocation en cas de déconjugalisation.

La majorité a voté dans le budget 2022 une formule jugée « plus redistributive » : un abattement forfaitaire de 5 000 euros sur les revenus du conjoint, soit un gain moyen estimé à 110 euros mensuels pour 120 000 couples à partir du 1er janvier 2022. « Ce gouvernement met en place des droits réels, non de l’incantatoire », selon Mme Cluzel.

La proposition de loi, vidée de sa mesure-phare, peut retourner pour une troisième lecture devant le Sénat, à majorité de droite, qui avait voté en octobre très largement en faveur de la « déconjugalisation ». Mais il faudrait un accord de l’Assemblée pour une adoption définitive de la mesure. D’un montant maximal de 904 euros mensuels, l’AAH, destinée à compenser l’incapacité de travailler, compte aujourd’hui plus de 1,2 million de bénéficiaires, dont 270 000 en couple.


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