mercredi 1 décembre 2021

Allongement du délai de l’IVG : les députés favorables à une extension à quatorze semaines de grossesse


 



Le Monde avec AFP  Publié le 1er décembre 2021

Après des débats parfois houleux, la proposition de loi « visant à renforcer le droit à l’avortement » a été votée en deuxième lecture à l’Assemblée, mardi. Son adoption définitive sous l’actuelle législature reste incertaine.

L’Assemblée nationale a de nouveau approuvé, mardi 30 novembre, l’extension du délai légal pour pratiquer une interruption volontaire de grossesse (IVG) à quatorze semaines de grossesse, au lieu de douze précédemment. Les députés ont néanmoins refusé de supprimer la clause de conscience spécifique des médecins.

La proposition de loi « visant à renforcer le droit à l’avortement », examinée en deuxième lecture, a été adoptée en fin de soirée par 79 voix contre 36 et 8 abstentions, après des débats souvent houleux. Le texte avait été adopté en octobre 2020 à l’Assemblée, avant d’être rejeté au Sénat, et la suite de son parcours législatif, et donc son adoption définitive sous l’actuelle législature, reste incertaine.

Le gouvernement, pour sa part, ne s’est pas prononcé, émettant seulement un « avis de sagesse » sur l’ensemble des dispositions du texte, sans engagement ferme de le faire examiner à nouveau au Sénat. Le ministre de la santé, Olivier Véran, médecin de formation, s’est toutefois dit favorable à titre personnel à l’extension du délai légal.

« L’acte d’IVG change de nature »

Les adversaires de la mesure, à l’instar de Fabien Di Filippo (Les Républicains, LR) ont multiplié les interventions pour souligner qu’avec la croissance du fœtus entre douze et quatorze semaines « l’acte d’IVG change de nature », avec « des conséquences gynécologiques qui peuvent être graves ». Plusieurs députés de droite ont plaidé pour un meilleur accès des femmes à l’IVG dans le délai actuel, plutôt que la prolongation de celui-ci.

La corapporteuse Albane Gaillot (non inscrite, ex-LRM) a répondu que cette mesure n’était « pas une lubie de militante féministe », mais qu’elle était inspirée par « des rencontres sur le terrain »« Le sujet n’est pas technique, le sujet, c’est le droit des femmes à disposer de leur corps », a-t-elle plaidé.

Les députés ont également supprimé le délai de quarante-huit heures entre l’entretien psychosocial et le recueil du consentement à une IVG, une disposition qui a provoqué de nouveaux affrontements. « Il n’y a pas d’atteinte à la liberté de choix. On ne supprime pas la possibilité de réflexion pour celles qui le souhaitent », a plaidé la corapporteuse socialiste Marie-Noëlle Battistel. A l’inverse, Philippe Gosselin (LR) a soutenu ce « délai de sérénité, ce temps de recul » et estimé qu’en le supprimant « on s’éloigne de l’esprit et de la lettre » de la loi Veil instituant le droit à l’avortement.

Une autre disposition adoptée permet l’extension de la compétence des sages-femmes, déjà autorisées à pratiquer des IVG médicamenteuses, aux IVG par voie chirurgicale.

Un point pour les opposants au texte

Les opposants au texte ont néanmoins réussi à marquer un point en faisant passer des amendements LR vidant de sa substance l’article 2 de la proposition de loi, qui faisait disparaître la clause de conscience des médecins spécifique à l’IVG, tout en maintenant leur clause de conscience générale pour tout acte médical auquel ils seraient opposés.

Cette clause de conscience spécifique à l’IVG « n’a pour seul impact que de stigmatiser » les femmes désireuses d’avorter, a estimé Annie Chapelier (groupe Agir, allié de la majorité). Mais à droite, Patrick Hetzel (LR) a développé que les deux clauses n’étaient pas identiques : réglementaire, donc soumise au gouvernement, pour la clause « générale » ; législative, donc gravée dans la loi, pour la clause « spécifique »« La rayer d’un trait de plume est très inquiétant pour les libertés », a-t-il dit.

Cette suppression « est massivement contestée par la profession »et contribuerait à faire de l’IVG un « acte anodin », a estimé Emmanuelle Ménard (non inscrite, proche du RN). M. Véran lui-même s’est montré réservé quant à cette mesure : « il n’est pas exclu qu’il y ait une mauvaise interprétation de cette suppression [de la clause spécifique], qui puisse semer le trouble dans la communauté médicale », a-t-il dit.


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