mercredi 20 octobre 2021

Comment l’imagerie révolutionne la biologie

 par Sebastián Escalón  19.10.2021

À l’occasion du lancement de l’Année de la biologie, le neurobiologiste Daniel Choquet nous explique comment les progrès en imagerie contribuent à l'explosion actuelle des connaissances en sciences du vivant. 

Peut-on dire que, grâce aux progrès des technologies d’imagerie, les sciences du vivant sont entrées dans une nouvelle ère ?

Daniel Choquet1. Tout à fait. L'imagerie fait partie du panel de méthodes révolutionnaires qui sont en train de faire exploser les connaissances en biologie. Il y a une phrase du biologiste Sydney Brenner que j’aime citer : « Les progrès de la science dépendent des nouvelles techniques, des nouvelles découvertes et des nouvelles idées, probablement dans cet ordre-là ». Ceci est particulièrement vrai en biologie : voir de nouvelles choses nous permet de nous poser de nouvelles questions. Grâce aux nouvelles technologies d’imagerie, nos capacités d'investigation se sont démultipliées.

Quels sont les jalons de cette révolution de l’imagerie ?

D. C. L’imagerie a une longue histoire puisque les premiers microscopes datent de la fin du XVIe siècle. Mais on peut dater cette nouvelle révolution aux années 1980, avec l’utilisation en biologie des protéines fluorescentes. Celles-ci permettent de marquer des protéines et d’étudier ainsi les mécanismes et les processus à l’œuvre dans les cellules. Un autre jalon est le développement de la microscopie confocale et multiphoton qui permettent d’obtenir des images en trois dimensions d’échantillons de tissus. Un autre grand moment est l’apparition des microscopes à super-résolution à partir de 2006, grâce auxquels on peut obtenir des images d’objets d’une taille au-dessous de 250 nanomètres dans des tissus vivants et en train de fonctionner.

   Caroline MEDIONI / IBV / MICA / CNRS Photothèqu

Cerveau vivant de drosophile observé au microscope à deux photons. En rouge, les axones d’une sous-population de neurones des corps pédonculés (marqueur membranaire fluorescent myr-Tomato), situés dans la partie centrale du cerveau, qui font partie du circuit olfactif et sont impliqués dans les processus de mémorisation.


À quels objets et processus ces nouvelles techniques nous donnent-elles accès ?

D. C. Je prends comme exemple mes cellules favorites, les neurones. Le corps cellulaire d’un neurone fait autour de 20 microns. Il est donc à la portée des microscopes conventionnels limités par la diffraction à une résolution d’environ un quart de micron. C’est d’ailleurs à la fin du XIXe siècle que Ramón y Cajal a découvert que le cerveau n’était pas une masse gélatineuse, mais qu’il était composé de cellules individuelles.

"La microscopie super-résolution,  permet d’observer non seulement les synapses en action, mais aussi les protéines individuelles à l’origine du signal nerveux."

Quant aux synapses, la connexion entre deux neurones, celles-ci font typiquement un micron. Là, on se rapproche des limites de la microscopie classique. Impossible d’obtenir ainsi une grande précision de mesure ou de décoder leur complexité d’organisation. La microscopie super-résolution, qui atteint une résolution d’un centième de micron, permet d’observer non seulement les synapses en action, mais aussi les protéines individuelles à l’origine du signal nerveux.

Avec ces techniques, on peut étudier leur dynamique lorsque les neurones sont en train de communiquer. Par exemple, mon équipe a montré que les récepteurs synaptiques ne sont pas fixes sur la membrane, mais se déplacent constamment.

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