lundi 5 juillet 2021

Vu des États-Unis Affaire Mila : un tournant pour la loi contre le cyberharcèlement ?

THE CHRISTIAN SCIENCE MONITOR (BOSTON)








En France, l’affaire Mila est devenue le symbole du drame caché qu’est le cyberharcèlement, écrit le Christian Science Monitor. Alors que treize personnes sont jugées pour “harcèlement” et “menaces de mort” contre la jeune fille, le verdict pourrait donner une idée de l’efficacité de la nouvelle législation en la matière.

Comment la France punit-elle le cyberharcèlement, ce fléau caché des réseaux sociaux ? Le procès contre treize personnes dans l’affaire Mila, dont le verdict sera prononcé le 7 juillet pourrait nous donner une idée, rapporte l’hebdomadaire américain The Christian Science Monitor.

Mila est devenue un symbole, celui d’une adolescente qui, à 18 ans, vit sous protection policière depuis la publication sur les réseaux sociaux d’une vidéo dans laquelle elle critiquait l’islam, en janvier 2020. À l’époque, elle recevait des milliers de messages d’insultes, d’appels au viol ou de menaces de mort. Quelques mois plus tard, en novembre 2020, elle devenait de nouveau victime d’un “raid” numérique pour avoir publié une nouvelle vidéo accusant ses détracteurs sur TikTok.

“Ce n’était guère plus au départ que les divagations en ligne d’une ado en colère, mais l’affaire a provoqué une tempête médiatique qui a duré plus d’un an et tourné au débat politique explosif sur le thème ‘islamophobie contre liberté d’expression’, dans lequel tout le spectre politique français s’affronte”, écrit le titre, poursuivant :

Parce que le droit au blasphème est défendu par la loi française et que la justice ne brille guère par ses sanctions dans les cas de cyberharcèlement, l’’affaire Mila’ s’annonce comme un procès décisif pour la définition des infractions (et des sanctions) liées au harcèlement en ligne.”

Le caractère répétitif est déterminant

Treize personnes, entre 18 et 30 ans, se trouvaient devant le juge pour harcèlement en ligne. Le parquet a requis entre trois et six mois de prison avec sursis contre douze des treize prévenus. Et le verdict a toutes les chances d’être appelé à “faire jurisprudence en matière de cyber-intimidation”. Car cette affaire représente le premier cas amplement médiatisé depuis l’adoption en France, en 2018, d’une nouvelle législation contre le cyberharcèlement, qui punit le fait de poster des commentaires participant intentionnellement à un “raid” numérique contre un individu, explique le journal.

“La nouvelle législation a en partie clarifié les choses sur la rhétorique qui peut constituer un délit de cyberharcèlement, et ce alors que les réseaux sociaux peinent à trouver le bon équilibre entre défense de la liberté d’expression et lutte contre les discours haineux.” Gérard Haas, un avocat parisien spécialisé dans les nouvelles technologies et la cybersécurité, explique au journal : “Auparavant, il fallait démontrer en quoi tel ou tel propos constituait du harcèlement, aujourd’hui, nous avons quelque chose de novateur avec cette loi. Le caractère répétitif des actes est déterminant.”

L’importance de la prévention

Faire peur aux harceleurs est une bonne chose, estime le juriste. Car depuis une décennie, la France voit une accélération du cyberharcèlement, écrit le CSM, notamment pendant la crise sanitaire – le nombre de cas enregistré durant le premier confinement aurait bondi de 30 % chez les plus jeunes. Selon l’Institut Montaigne, la moitié des 11-20 ans ont déjà été victimes de cyberharcèlement. Les appels à l’aide auprès de l’association e-Enfance ont augmenté de 54 % en 2020. Les filles, de leur côté, font face à une menace particulière : “Les sextos et le revenge porn [messages et diffusion de photos à caractère sexuel sans le consentement de la victime]”les visent en priorité.

En France, indépendamment des peines prononcées, nombreux sont ceux qui comptent sur la médiatisation de l’affaire pour sensibiliser toute la société à ce problème trop souvent oublié et que la police a encore du mal à traiter, écrit le Christian Science Monitor. Selon les professionnels de santé mentale, mieux vaut prévenir que guérir, observe la journaliste, qui rapporte que de nombreuses associations ont vu le jour pour contrer les harceleurs. La psychologue Catherine Verdier, cofondatrice de l’association Amazing Kids, indique : “Les adolescents ont une grande capacité à cacher leurs émotions, d’où les difficultés que peuvent rencontrer les parents lorsqu’il s’agit de repérer des problèmes de harcèlement.” 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire