mercredi 16 juin 2021

Vaccination des 12-18 ans : «Le plus important, c’est le temps de la réflexion et de la discussion»

par Cassandre Leray   publié le 14 juin 2021

Interview

Les mineurs de plus de 12 ans seront éligibles à la vaccination dès ce mardi. Daniel Marcelli, pédopsychiatre, revient sur la façon dont le sujet peut être abordé en famille.

Plus que quelques heures. La vaccination contre le Covid s’ouvre mardi à tous les jeunes de 12 à 18 ans. Pour recevoir une dose de vaccin, l’accord oral de l’adolescent et l’autorisation des deux parents (ainsi que la présence de l’un d’eux) sont nécessaires. Ce qui veut dire que le sujet va être abordé au sein des familles dans les jours et les semaines qui viennent. Daniel Marcelli, ancien président de la Société française de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, évoque les points essentiels pour ouvrir le dialogue avec les jeunes.

En tant que parent, comment lancer le sujet de la vaccination avec son enfant ?

Je pense que les parents ont tout intérêt à aborder ce sujet et à demander l’avis de leur enfant eux-mêmes, en ouvrant un espace de réflexion et de dialogue. En tant que parent et professionnel, si je parle à des adolescents de la vaccination, je leur dirai que s’ils ont des maladies particulières qui peuvent entraîner des formes graves, ça ne se discute pas. La vaccination est nécessaire. Sinon, s’ils n’ont pas de problèmes de santé particuliers, il est vrai que dans leur tranche d’âge, le Covid entraîne généralement des formes bénignes même si ce n’est pas une maladie complètement innocente.

Ceci dit, quand on décide de se faire vacciner, c’est un peu pour soi et beaucoup pour les autres. C’est à chaque famille, chaque parent, chaque adolescent, de discuter de cette balance. Dire : «Bien sûr, tu ne te vaccines pas pour toi car tu es en bonne santé, mais tu te vaccines pour tes grands-parents, les personnes fragiles autour de toi, pour moins faire circuler le virus…» L’acte de vaccination est important dans la solidarité sociétale et les vaccins qui sont utilisés actuellement ont prouvé leur grande innocuité. En tant que parent, je dirai à un adolescent que, s’il n’hésite pas à fumer la cigarette d’un copain, il peut aller se faire vacciner sans crainte. Les risques sont largement inférieurs.

Que faire en cas de désaccord ?

S’il y a un désaccord, que les parents veulent que leur enfant aille se faire vacciner alors que lui ne le souhaite pas, la question est de savoir comment le formuler. Est-ce que les parents donnent l’injonction d’aller se faire vacciner ? Je pense qu’il est préférable de proposer de donner plus d’informations à l’enfant, en l’envoyant vers une personne extérieure, par exemple un médecin ou un personnel d’un centre de vaccination, pour élargir l’horizon des possibles.

Si c’est l’inverse, c’est très compliqué. L’enfant ne pourra pas faire grand-chose et devra attendre ses 18 ans pour se faire vacciner, comme l’autorisation des parents est nécessaire avant la majorité. Si un adolescent a des parents antivaccins, il ne pourra donc pas se faire vacciner.

L’influence des parents est donc considérable ?

Evidemment. En réalité, ce que j’ai dit précédemment peut s’appliquer aussi bien à un jeune majeur qu’à une personne de 12 à 18 ans. La seule différence, c’est que l’avis des parents compte dans la possibilité ou non d’être vacciné. Mais c’est bien parce que des adultes tiennent des discours conspirationnistes que parfois les adolescents les reprennent. Le plus important, c’est le temps de la réflexion et de la discussion, quel que soit l’âge.

Je pense que les jeunes à partir de 12 ans qui sont d’accord et ont l’autorisation de leurs parents méritent un petit entretien de cinq à sept minutes avec la personne qui va les vacciner et recueillir leur consentement. La vaccination est un acte d’engagement citoyen qui devrait être honoré par cette attention qui leur serait consacrée pendant quelques minutes. Arrêtons de stigmatiser les adolescents : eux aussi, ils sont prêts à participer à l’effort collectif.


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