Communiqué du collectif nationalInter-collèges des psychologues hospitaliers« La vraie folie c’est quand la raison pense qu’elle a raison » 1
L’arrêté du 10 Mars 21 relatif à la « définition de l’expertise spécifique » des psychologues sur les « plateformes d’orientation – coordination » qui concorde avec la proposition de Loi d’une instance ordinale sans aucune concertation préalable avec les corps intermédiaires, s’inscrit dans l’orientation hautement contestable du remaniement de la loi santé 2022.
Il n’est pourtant pas difficile à ce jour de mesurer la responsabilité des prétentions réformatrices de la logique gestionnaire et managériale qui ont mené l’hôpital au bord du gouffre, la psychiatrie y tenant la place de laboratoire du désastre.L’inflation de structures de surplomb, les postures hiérarchiques outrancières, le contrôle social et moral ininterrompu cachent difficilement l’inculture qui détruit jusqu’au cœur des métiers le délicat travail de rencontre avec la souffrance psychique.Par cet arrêté dogmatique et autoritaire qui constitue en lui-même une atteinte frontale à la démocratie, cette logique affiche un peu plus au grand jour ses choix techniques afin de séparer son bon grain scientiste de « l’inutile ivraie » relationnelle.Définitivement sourde à l’expérience clinique des soignants, elle continue de s’appuyer exclusivement sur d’improbables normes de qualité définies à l’aune des promesses idéalisées des neurosciences et du comportementalisme.Lors de la première vague de la pandémie, n’entendait-on pas que les soignants, libérés de leur corset administratif, presque surpris de redécouvrir ce qui leur avait été subtilisé, avaient retrouvé le goût de l’engagement, de l’inspiration inventive et de la solidarité du collectif ? Autant de constats visiblement passés aux oubliettes !
Nous souhaitons rappeler vivement ici qu’il existe un titre unique de psychologue qui relève du souci démocratique de faire vivre et protéger une pluralité de recherches, orientations et méthodes de travail. Toute la noblesse de ce titre tient en ceci :Il invite au débat, permet le dissensus, s’oppose à la pensée unique et fait obstacle au poison de la cancel culture.En faisant obligation aux professionnels d’agréer et servir, sous contrôle médical, une conception techniciste, étroitement opératoire, d’un acte estampillé «bonnes pratiques », l’arrêté du 10 Mars 21, a contrario :. divise ouvertement le champ professionnel au bénéfice d’une volonté normative. dérobe et dénature ainsi la responsabilité du praticien vis-à-vis de son engagement. viole le pacte social de la liberté de choix des patients en induisant une logique offensive de marketing (désignation catégorielle, évaluation, intervention, ...). pervertit l’esprit de cohésion et d’articulation professionnelle des équipes de CMP, implicitement destinés à devenir des centres de tri... Comprendre qu’il faudra suivre la sortie vers le privé !Les psychologues cliniciens doivent fermement s’élever contre l’inclination terrifiante des humains à compartimenter et étiqueter leur semblable.En aucun cas ils ne sont les « experts » du vivant ; il leur revient de refuser que leur acte soit confondu avec la tyrannie mortifère de la prestation de service.Notre responsabilité est d’accueillir, de permettre l'émergence d'un récit chaque fois unique, et que reste ouverte la multiplicité des trajectoires. Il n’y a pas de prêt-à-porter clinique.Nous devons impérativement soutenir que l’hésitation, l’imprévisible, l’absence de jugements, le courage de la nuance et l’audace de l’incertitude, font l’intelligence et la poésie d’un acte qui - en soi - est toujours périlleux.Pour la CoordinationMarc Turpyn – Martine Vial-Durand1 Frédéric Gros
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