lundi 8 mars 2021

La disparition de l’homme de Néandertal serait plus ancienne que ce que l’on croyait

Le Monde avec AFP Publié le 08 mars 2021

Des restes humains retrouvés dans une grotte située en Belgique, d’abord datés de 24 000 ans, seraient, en fait, vieux de 44 200 ou 40 600 ans.

La disparition de l’homme de Néandertal pourrait être liée à des causes climatiques, à une trop grande consanguinité ou à la compétition entre espèces.

Quand l’homme de Néandertal a-t-il disparu ? La question agite les scientifiques depuis longtemps. Les restes humains d’une grotte en Belgique contribuent aujourd’hui au débat en se révélant bien plus anciens que ce qui avait été précédemment envisagé.

Selon de précédentes datations par radiocarbone, les spécimens de la grotte de Spy, où de nombreux restes humains ont été retrouvés depuis le XIXe siècle, remontaient à seulement 24 000 ans. Mais, selon une étude publiée lundi 8 mars dans la revue scientifique PNAS, ils sont, en fait, vieux de 44 200 ou 40 600 années.

Une équipe multidisciplinaire de Belgique, de Grande-Bretagne et d’Allemagne a développé une méthode pour préparer les échantillons, permettant d’éviter toute contamination extérieure, a expliqué à l’Agence France-Presse (AFP) l’un des coauteurs de l’étude, Thibaut Deviese, de l’université d’Oxford et Aix-Marseille. L’étude conclut ainsi que les néandertaliens « ont disparu du nord de l’Europe (…) bien plus tôt que suggéré auparavant ».

Avoir une meilleure idée du moment où l’homme de Néandertal a disparu est considéré comme un premier pas important pour mieux comprendre sa nature, ainsi que pourquoi il a finalement laissé la place à l’être humain moderne.

Carbone 14

La méthode s’appuie toujours sur le radiocarbone (des variantes radioactives du carbone, comme le carbone 14), qui est considérée comme la meilleure méthode de datation, mais améliore la façon dont les échantillons sont traités. Tous les êtres vivants absorbent du carbone, depuis l’atmosphère ou la nourriture, dont du carbone 14, qui se désintègre avec le temps. Puisque les plantes et les animaux arrêtent d’en absorber lorsqu’ils meurent, ce qu’il reste dans la matière permet de déterminer à quel moment cet être a vécu.

Pour les ossements, les scientifiques extraient la partie faite de collagène pour l’analyser, car elle est organique. « Ce que nous avons fait va plus loin », explique Thibaut Deviese. En effet, l’environnement où les restes ont été trouvés peut contaminer les échantillons. Les chercheurs se sont donc concentrés sur des molécules appelées « acides aminés », dont ils étaient absolument certains qu’elles faisaient partie du collagène.

Les auteurs ont également daté des restes de deux autres sites en Belgique, Fonds-de-Foret et Engis, avec des résultats comparables. Des preuves existent qu’il a pu survivre plus longtemps dans d’autres régions qu’en Belgique, note, toutefois, l’étude.

« La datation est cruciale en archéologie, car, sans un cadre fiable de la chronologie, on ne peut être sûrs de comprendre les relations entre le néandertalien et Homo sapiens », souligne Thibaut Deviese. Certains outils en pierre ont été attribués aux néandertaliens, ce qui a été interprété comme un signe de leur développement cognitif, détaille-t-il. Or, s’il se révèle qu’ils n’ont pas existé aussi longtemps que prévu, alors ces objets doivent être réexaminés pour déterminer s’ils étaient vraiment leur œuvre.

La disparition de l’homme de Néandertal pourrait être liée à des causes climatiques, à une trop grande consanguinité ou à la compétition entre espèces, rappelle l’étude – mais il s’agit là d’une autre brûlante question à laquelle elle ne répond pas.


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