jeudi 21 janvier 2021

Pour ne pas déprimer, bougez. Et si vous l’êtes, bougez quand même !


Pascale Santi  Publié le 20 janvier 2021

CHRONIQUE

En temps de Covid-19, propice à la morosité, il n’est pas facile de maintenir une activité physique régulière. Or, celle-ci prévient et combat la dépression. 

C’est une évidence : le sport, c’est bon pour le moral. Marcher en forêt, faire une séance de yoga, dévaler une piste de ski… goûter ces plaisirs fait du bien. L’universitaire anglais Robert Burton n’écrivait-il pas dans son livre Anatomie de la mélancolie, publié en 1621, que le manque d’activité constituait l’une des causes de celle-ci ? « Il est impossible de préserver sa santé sans exercice physique »,disait-il. Une référence citée dans une étude parue le 5 janvier dans le British Journal of Sports Medicine, qui confirme cette intuition.

Car, cinq cents ans plus tard, les preuves sont là. Rodney Dishman, chercheur en sciences de la santé et kinésiologie à l’université de Géorgie, Etats-Unis, qui a coordonné l’étude, a recensé une centaine d’articles sur les effets de l’activité physique en prévention de la dépression.

« Les données suggèrent que tout niveau d’activité physique réduit le risque de dépression, mais plus le niveau d’activité augmente, plus le risque est faible », écrivent les auteurs. Au vu de la littérature étudiée, « les personnes qui respectent ou dépassent les recommandations de l’OMS [150 à 300 minutes par semaine d’activité d’intensité modérée à soutenue pour tous les adultes, y compris les malades chroniques et les personnes en situation de handicap] ont moins de risque de dépression », soulignent ces travaux. En revanche, s’il y a une relation dose/effet, pas simple d’être plus précis à ce stade.

Du sport sur prescription

« Cette étude n’apporte pas de connaissance nouvelle, on sait que l’activité physique prévient la dépression », explique le professeur Grégory Ninot, de l’université de Montpellier, qui a participé à une expertise collective sous l’égide de l’Inserm, publiée début 2019, sur le rôle de l’activité physique pour prévenir et traiter les maladies chroniques.

Quant à la prévention d’un épisode dépressif, il importe de « maintenir une activité physique régulière et soutenue », conseille l’Inserm.

Qu’en est-il pour les personnes souffrant déjà de dépression, une condition qui touche ou touchera environ une personne sur cinq au cours de sa vie ? « Pour un trouble dépressif léger à modéré, il faut proposer en première intention un programme supervisé d’activité physique adaptée à visée curative comportant au minimum trois séances de trente minutes par semaine de pratique mixte (aérobie + résistance) durant trois mois », préconisent les recommandations de l’Inserm, fondées sur la littérature scientifique. Pour un trouble sévère, c’est plus complexe. « Il faut distinguer l’effet du sport en prévention primaire ou secondaire », soulignait dans nos colonnes Antoine Pelissolo, chef du service de psychiatrie à l’hôpital Henri-Mondor (Créteil). « L’activité physique doit être associée aux autres thérapeutiques », préconisent les experts.

En pratique, peu de médecins prescrivent de l’activité physique lors d’épisodes dépressifs, beaucoup préfèrent les médicaments, pilules « miracle » souvent demandées par les patients. « L’activité physique est bien un traitement à visée curative, qui ne marche certes pas à tous les coups – comme tout traitement – mais qui doit être prescrite en première intention pour les troubles légers », insiste Grégory Ninot. Son message est clair : « Il faut bouger plus quand on n’est pas malade, et dès qu’on le devient, ce n’est plus une recommandation mais une prescription. »

Pas si simple de s’y soumettre, car un trouble dépressif augmente le risque d’adopter un mode de vie sédentaire et de réduire le niveau d’activité physique. Aujourd’hui, les contraintes liées à l’épidémie de Covid-19 restreignent les activités sportives, en raison du couvre-feu, de la fermeture des centres sportifs, des lieux de socialisation… La sédentarité progresse, ce qui renforce la dépression : gare au cercle vicieux !


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