lundi 11 janvier 2021

Lin, chanvre, bambou, cuir végétal… Comment trouver la bonne fibre écologique

« La Matinale » vous propose une série de gestes à adopter pour réduire votre impact sur la planète. Cette semaine, on examine à la loupe les étiquettes. 

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Publié le 04 janvier 2021 

LA LISTE DE LA MATINALE

Pull en pulpe de bois d’eucalyptus, sous-vêtements en fibres de bambou, baskets en cuir végétal… Les marques de mode multiplient les propositions de matériaux innovants pour verdir nos vestiaires. Mais que valent toutes ses nouvelles matières premières présentées comme moins nocives pour l’environnement ? Quelles sont les fibres textiles à privilégier pour moins polluer ?

L’impact écologique des vêtements pèse lourd : 4 % de l’eau potable disponible dans le monde est utilisée pour produire notre garde-robe. La fabrication d’un tee-shirt équivaut à 70 douches ; pour un jean, c’est 285 douches. Pour faire baisser la facture, à l’heure où, en moyenne, une personne achète 60 % de vêtements en plus qu’il y a quinze ans et les conserve moitié moins longtemps, regardons de plus près l’envers des étiquettes.

Dans la famille des fibres utilisées dans l’industrie textile, on distingue les matières naturelles, synthétiques ou artificielles. Qui dit naturelle, signifie issue d’une plante (coton, lin, caoutchouc…) ou d’un animal (cuir, fourrure, laine, soie). Matières nobles par excellence, respirantes, douces et confortables, elles ne sont pas pour autant toutes écologiques.

Le coton est le glouton de la famille. C’est aussi la matière naturelle la plus produite au monde (un quart de la production mondiale). Son régime de croissance : eau, soleil et pesticides. A la clé, selon l’Agence de l’environnement (Ademe), « pollution agricole » et « risque pour les cultivateurs ».

Il est si gourmand en liquide que dans certains pays, on détourne des rivières ou des lacs pour irriguer les champs. L’exemple le plus tristement célèbre est celui de la mer d’Aral, en Asie Centrale qui a perdu les trois quarts de sa surface, avant d’être protégée depuis 2006. Son traitement (blanchissement ou teinture) nécessite par ailleurs l’utilisation de chlore et de métaux lourds.

On préférera donc les vêtements en coton biologique certifié Global Organic Textile Standard (GOTS). Représenté par un tee-shirt blanc sur un rond vert, ce label garantit que les fibres utilisées sont issues a minima, à 70 % de l’agriculture biologique. Il bannit également les substances toxiques dans la fabrication ou l’impression du textile, et le respect basique de conditions de travail décentes. En revanche, il n’a pas d’exigences quant à l’irrigation des cultures. L’idéal est de trouver une alternative, en privilégiant les fibres recyclées ou celles dont la culture n’a pas besoin de beaucoup d’eau ou d’engrais, comme le lin ou le chanvre.

Le lin coche toutes les cases de la sobriété. Pas d’irrigation, peu d’entrants chimiques, aucun déchet au sol, et en plus, il est biodégradable. Très résistant, il est majoritairement cultivé en Europe de l’Ouest, notamment en France, premier producteur mondial !

Seule ombre au tableau vert, 80 % de cette production part en Chine ou en Inde pour être filée avant de revenir en Europe, laissant derrière elle une empreinte carbone élevée. Jusqu’en 2020, il n’y avait plus de filature de lin en France. L’an passé, une unité 100 % française s’est créé en Alsace. D’autres projets sont en cours, notamment en Normandie et dans le Nord de la France.

Le chanvre, dont la culture elle aussi a peu d’impact, représente une fibre intéressante, mais encore peu de marques l’utilisent seul. On le trouve plus facilement associé avec d’autres fils.

Nos vêtements peuvent aussi être fabriqués à partir de matières naturelles animales. On pense à la fourrure mais moins à d’autres matériaux qui posent des questions de bien-être animal et d’environnement. L’angora présent dans certains lainages provient du pelage vaporeux d’un petit lapin. Les poils sont tondus, épilés au peigne ou arrachés à vif. L’arrachage est la méthode la plus utilisée en Chine, qui produit 90 % de la laine angora. Les conditions d’élevage sont aussi régulièrement dénoncées. A éviter.

Gros plan sur pile de tissus en lin et chanvre brut sur coussin blanc

La laine mérinos la plus courante est issue d’élevages de moutons. L’Australie fournit 75 % du mérinos utilisé par l’industrie de la mode. Or ce pays est l’un des seuls à pratiquer encore le museling,une pratique qui consiste à retirer une large bande de peau autour de la queue des bêtes, sous prétexte d’éviter les infections de parasites. Le geste se fait souvent sans anesthésie et laisse les chairs à vif. En réaction à cette technique cruelle, privilégiez la laine originaire d’autres pays (Europe, Nouvelle-Zélande ou Amérique du Sud) ou des marques qui s’engagent à travailler seulement avec des fournisseurs labellisés excluant cette méthode.

Le cachemire, symbole de douceur et de luxe s’est démocratisé. La fibre provient du poil des chèvres cachemire, qui vivent sur les hauts plateaux de Mongolie ou de Chine. La demande explosant, les élevages intensifs se sont développés, notamment dans les plaines. Or ces animaux arrachent les racines des herbes, et participent à la désertification des sols. Leurs poils, de moindre qualité que celles qui vivent en altitude, alimentent une production souvent de piètre qualité, moins durable.

Evitez le cachemire bon marché et à la provenance non identifiée. Préférez l’alpaga, un cousin du lama, originaire d’Amérique latine. Elevés un peu partout, notamment en France, ces animaux ont peu d’impact environnemental et produisent beaucoup de laine dans une gamme de couleurs assez large qui limite l’utilisation de colorants. Autre option, le mohair, fourni par le poil de la chèvre angora (ne pas confondre avec le lapin angora cité plus haut), originaire d’Asie mineure. On trouve là encore des élevages en France, dont certains garantissent un environnement adapté et sans mauvais traitement.

Le cuir est un sous-produit de l’industrie de la viande, qui permet d’utiliser la peau des bêtes abattues. Sa production entraîne les mêmes problématiques en termes de pollution et de déforestation que l’élevage.

Il existe aujourd’hui une offre croissante de matériaux d’origine 100 % végétale (feuilles d’ananas, peau et graines de raisins…), appelés improprement « cuir végan », avec peu d’impact environnemental. Pour tous ceux qui ne sont pas acquis au véganisme, choisir une peau de qualité et un tannage végétal (cuir transformé par des tanins à base de végétaux ou d’écorces), beaucoup moins polluant. Les teintures et traitement chimiques au chrome, utilisés et autorisés dans des pays à bas coûts, sont toxiques pour les travailleurs comme pour la faune et la flore. Optez pour des articles fabriqués en Europe, à la réglementation beaucoup stricte.

Les matières synthétiques, comme le nylon, le polyester et l’élasthanne sont produites à partir de dérivés de l’industrie pétrochimique. En raison de leur résistance, leur facilité d’entretien et leur coût bas, elles sont très largement utilisées, notamment dans la « fast fashion ». Pourtant elles polluent énormément tout au long de leur cycle de vie, de la production à l’entretien.

Selon la fondation Ellen Mac Arthur, une association environnementale britannique, lors du lavage de tissus synthétiques, 500 000 tonnes de microparticules de plastiques sont relâchées chaque année dans l’océan, soit l’équivalent de plus de 50 milliards de bouteilles en plastique ! Seules les fibres provenant du recyclage de bouteilles en plastique en PET, utilisées dans la fabrication de textiles dits polaires peuvent passer la frontière verte. A condition toutefois qu’ils soient de bonne facture et d’une marque reconnue, engagée dans des processus de production innovants pour limiter les rejets plastiques.

Dernière catégorie : les fibres artificielles, créées à partir de végétaux, puis transformées de manière chimique. Le matériau de base n’est donc pas du pétrole mais de la cellulose, tirée de diverses sources naturelles végétales (bois divers, soja ou maïs).

Sur le portant, l’idée est séduisante. Mais végétal ne veut pas toujours dire écologique. La viscose par exemple, est fabriquée avec de la pulpe de bois (bambou ou autre). Mais le processus chimique pour la transformer est à base de soude caustique polluante. Lui préférer le Lyocell, vendu entre autres sous la marque déposée Tencel du groupe autrichien Lenzing. Extraite elle aussi de feuillus, eucalyptus, bambou, la pulpe de Lyocell est produite en circuit fermé et avec des solvants non toxiques et recyclables. Les végétaux fournissant l’ingrédient principal sont issus de forêts gérées durablement et certifiées. Enfin, les fibres obtenues sont biodégradables. On trouve de plus en plus de vêtements qui en proposent en mélange avec d’autres matières ou dans des vêtements près du corps, à cause de leur effet « soie ».

Une fois les étiquettes décryptées, reste à se poser la question de la qualité, des conditions de fabrication, mais aussi de l’usage. Avez-vous vraiment besoin de ce énième tee-shirt en soldes ? Chaque année, un Français achète en moyenne 9 kg de vêtements. S’alléger de plusieurs centaines de grammes permet déjà d’agir dans le droit fil de ses convictions vertes.



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