samedi 6 juin 2020

Un journal intime gravé à même les murs de l’hôpital psychiatrique

24 heures

SUISSE

Florence Millioud-Henriques le 6 juin 2020

Après une exposition en 2011 à la Collection de l’art brut à Lausanne, Lucienne Peiry poursuit son immersion dans l’œuvre de l’Italien Fernando Nanetti (1927-1994) en publiant «Le livre de pierre».

Fernando Nannetti dessinait d’abord les limites de sa page comme ici pour  «Il Mangiatore di Pastasciutta Spaghetti al sugo».
Fernando Nannetti dessinait d’abord les limites de sa page comme ici pour «Il Mangiatore di Pastasciutta Spaghetti al sugo».
PIER NELLO MANONI

Le format est vraiment mini, 77 pages, pour dire la trajectoire poignante de Fernando Nannetti, auteur d’un journal intime courant sur les murs de l’hôpital psychiatrique où il est enfermé. Mais tout y est, de l’attrait magnétique pour l’œuvre gravée à l’aide d’un ardillon (cette pointe de la boucle de ceinture) aux contours de l’existence cabossée, chiche et rebelle qui a pourtant ordonné ce travail avec une rare opiniâtreté.

L’intensité déborde de chacune de ces 77 pages signées Lucienne Peiry. Elle y décode, et le terme n’est pas galvaudé, l’épopée scripturale de ce patient diagnostiqué schizophrène, placé à 10 ans dans un établissement psychiatrique pour mineurs, arrêté pour outrage à agent à 29 ans puis interné jusqu’à sa mort à 67 ans, sans jamais avoir reçu de visite. Avec «Le Livre de pierre», l’ancienne directrice de la Collection de l’Art brut à Lausanne plante une nouvelle banderille sur les terres de l’oubli, elle qui n’en est pas à sa première salve pour éviter que l’œuvre de l’Italien, gravée dans la pierre d’un établissement aujourd’hui désaffecté, ne disparaisse. Avalée par le temps qui passe, altérée par ses intempéries, guettée par ses pertes de mémoire.

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