jeudi 2 avril 2020

Les auxilliaires de vie sont en première ligne dans le soin aux personnes handicapées

Publié le 31/03/20

L'observatoire national Covid-19 piloté par l'espace éthique de la région île-de-France a constitué un groupe de travail dédié au handicap. Ses premières réflexions pointent la lourde tâche qui repose désormais sur les professionnels du domicile.
Difficulté d'accès aux soins accrue en cette période de pandémie, manque de formation des personnels de l'aide à domicile pour bien faire comprendre les règles sanitaires, épuisement des familles confrontées au handicap et aux angoisses liées au confinement, grandes difficultés des personnes handicapées psychiques qui se retrouvent seules, manque de dispositifs adaptés pour assurer la continuité pédagogique pour tous les élèves en situation de handicap... l'observatoire national Covid-19 piloté par l'espace éthique de la région île-de-France pointe, à partir des premiers retours d'expériences, des "lignes d'action utiles aux réflexions préparatoires aux futurs risques sanitaires d'ampleur".

L'espace éthique a mis en place, avec l’Espace national de réflexion éthique maladies neurodégénératives et le département de recherche en éthique de l'université Paris-Saclay, différentes réflexions thématiques en soutien au suivi de l'accompagnement des conséquences du Covid-19 dans les pratiques professionnelles, avec un groupe de travail dédié au handicap. Ce dernier, pour nourrir ses réflexions, propose deux questionnaires en ligne : le premier est destiné aux structures médico-sociales et le second aux personnes en situation de handicap. ll s'associe, par ailleurs, à l'enquête de satisfaction Handifaction qui a été conçue pour savoir si les personnes vivant avec un handicap ont bien été soignées.

Dépendance = perte de chance ?

Dans le compte rendu de la réunion du 20 mars, l'observatoire estime que l'analyse des dernières données d'Handifaction "fait craindre aux personnes vivant avec un handicap de ne pas bénéficier des meilleurs soins possibles et d’être mis de côté (pour cause de comorbidité trop élevée)". De nombreuses personnes en situation de handicap n'ont pas de médecin traitant, rappelle l'observatoire. Elles cherchent actuellement un médecin généraliste et n'en trouvent pas. En Alsace, certaines personnes se sont rendues aux urgences parce qu'elles n'avaient pas été prises en charge chez un médecin généraliste. "Or, à travers le questionnaire Handifaction, nous constatons 25% de refus aux urgences" contre 2% habituellement, précise l'observatoire. Il pose également la question de l'accompagnement des personnes qui nécessitent une attention particulière et observe que le niveau d'autonomie et de dépendance commence à être un critère de réponse à l'admission pour une personnes en situation de handicap en détresse respiratoire.

Les auxiliaires de vie en première ligne

Parallèlement, à domicile, les auxiliaires de vie jouent un rôle central dans l'accompagnement. L'observatoire estime qu'il est urgent de mieux les protéger et les former aux gestes barrières pour eux-mêmes et les personnes qu'ils accompagnent avec, par exemple, des tutuoriels vidéo efficaces. Ces auxiliaires ne se considèrent pas comme des professionnels du soin et de la prévention alors qu'ils le deviennent de fait dans cette crise majeure. L'observatoire pose aussi la question d'une filière de prise en charge spécifique à domicile pour les malades atteints de Covid-19 afin d'éviter que les professionnels passent d'un domicile à risque à un domicile sain.

L'observatoire pose clairement la question du droit au répit pour les familles épuisées, surtout pour les parents âgés de plus de 70 ans. Il pose aussi la question de l'isolement, voire de la fugue pour les personnes psychotiques. Il rappelle que la solitude est un facteur très important de décompensation auquel il faut être attentif. En établissement, il observe une incompréhension des résidents notamment sur le fait de devoir prendre leur repas dans leur chambre alors qu'ils ne sont pas malades et souligne le besoin de psychologues qui se fait sentir dans les maisons d'accueil spécialisées (Mas). Concernant la question de la continuité des enseignements pour les élèves handicapés, l'observatoire note une grande diversité des solutions locales et rappelle que, pour ces publics fragiles, la continuité pédagogique à la maison est une source d'inégalités sociales. Il rappelle qu'enseignants et élèves sont en attente d'une solution pérenne adaptée.

Emmanuelle Deleplace


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