dimanche 29 mars 2020

Journal de crise des blouses blanches : « L’annonce d’un test positif au Covid-19 est vécue comme la fin du monde »

« Le Monde » donne, chaque jour, la parole à des personnels soignants en première ligne face au coronavirus. Ils racontent « leur » crise sanitaire, comme Claire Guil-Paris, 49 ans, infirmière à Nantes.
lIs travaillent à l’hôpital ou en médecine de ville, ils sont généralistes, infirmières, urgentistes, sages-femmes : une quinzaine de soignants, en première ligne face à la pandémie de Covid-19, ont accepté de nous raconter leur quotidien professionnel. Chaque jour, dans ce « Journal de crise », Le Monde publie une sélection de témoignages de ces « blouses blanches ».

« On a proposé à des patients d’entrer dans un protocole d’essai thérapeutique »

Claire Guil-Paris, 49 ans, infirmière au CHU de Nantes (Loire-Atlantique)
Claire Guil-Paris, infirmière au CHU de Nantes (Loire-Atlantique).
Claire Guil-Paris, infirmière au CHU de Nantes (Loire-Atlantique). Claire Guil-Paris
« Ce week-end, j’étais en médecine polyvalente urgente. Sur les sept patients, deux ont été testés positifs par prélèvement nasal. Ils ont la trouille du résultat. Quand on leur annonce que c’est positif, c’est la fin du monde, comme si on leur annonçait qu’ils avaient un cancer généralisé. On essaie de les rassurer.
On leur a proposé de rentrer dans un protocole d’essai thérapeutique. L’un a accepté. Le patient se posait beaucoup de questions, le fait de servir de cobaye lui faisait un peu peur, il a appelé sa famille. Finalement, le médecin du service des maladies infectieuses et tropicales est venu lui expliquer le contenu de l’étude et lui a proposé un protocole qu’il a accepté. De mon côté j’ai juste essayé d’expliquer que, souvent, ça se passe en double aveugle : le médecin ne sait pas si c’est le placebo ou le traitement qu’il prescrit, et le patient ne sait pas si c’est le placebo ou le médicament qu’il reçoit. Mais comme aucun traitement n’a encore été validé, pour l’instant, on navigue un peu à vue.
« Le Plaquénil a quand même des effets secondaires sur le cœur, on verra peut-être le résultat dans quelques années… »
Concernant l’hydroxychloroquine, je me renseigne un petit peu, j’ai regardé des études sur des sites fiables, parce que l’opinion publique s’enflamme vite dans un sens ou dans l’autre. Les critères d’étude du professeur Raoult laissent perplexes. Après, tant mieux si des gens ont pu en profiter et sont guéris grâce à ça.
Mais je n’oublie pas l’histoire du Mediator : c’était miraculeux, les gens maigrissaient et, quelques années après, on s’est rendu compte des dégâts. Le Plaquénil a quand même des effets secondaires sur le cœur, on verra peut-être le résultat dans quelques années… Sur Facebook, j’ai vu des choses passer à ce sujet, j’ai dit à mes amis : attention, ce ne sont pas des Smarties, il y a forcément des effets secondaires, donc il faut rester prudent. »
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