lundi 17 février 2020

Drogues: "contre la dépression" ou pour "l'énergie", le LSD revient en microdoses

Par AFP le 16.02.2020

Un buvard de LSD en avril 2017 à Washington
AFP/ARCHIVES - PAUL J. RICHARDS

Deux fois par semaine, Laurent et Victor* prennent de l'acide au petit-déjeuner. Ces deux consommateurs de LSD ne cherchent pas un trip psychédélique: ils absorbent des "microdoses", l'un pour "mieux se concentrer", l'autre pour "faire face à une dépression".
Venue des États-Unis, cette tendance commence à faire des émules en France malgré des "syndromes d'hallucination persistante" parfois observés et même si les effets sur le cerveau d'un usage aussi fréquent de LSD restent inconnus.
"Le +microdosing+ remplace très avantageusement le café. Ca m'en donne l'énergie, sans la nervosité", affirme Laurent, 42 ans, qui loue "l'effet antiprocrastination" de cette drogue hallucinogène lorsqu'elle est consommée en petites quantités.
Adepte depuis plus de cinq ans, cet universitaire parisien se dit "plus éveillé, plus concentré" grâce au LSD et à "dix minutes de méditation quotidienne".
Chaque lundi et jeudi, il sort ses buvards de LSD commandés sur le darknet et en avale un mini-morceau. En général, les "microdoseurs" absorbent environ 10 microgrammes, soit un dixième de la quantité "récréative". L'effet semble assez éloigné des voyages transcendantaux popularisés dans les années 60.
"C'est une expérience moins forte qu'un café bien serré", assure Laurent qui évoque l'effet d'un "lubrifiant social". "Ca me rend plus tolérant face aux comportements irritants de mes enfants ou des inconnus."
S'il se dit parfois qu'il ferait mieux de "dormir plus plutôt que de +microdoser+", le père de famille assure qu'il n'y a pas de "dépendance".
"Le LSD, qui n'engendre aucun syndrome physique de manque, provoque une légère augmentation de la tolérance lorsque les usages sont répétés à moins de trois semaines d'écart, mais pas sur le long terme", note toutefois l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT).
"Le microdosage est souvent utilisé comme un outil au service de la compétitivité individuelle, notamment chez les cadres de la Silicon Valley depuis les années 2000", observe l'anthropologue David Dupuis, spécialiste des substances psychédéliques.
- Effet antidépresseur ? -
Loin des appels à expérimenter le LSD pour inventer une société alternative, "on l'utilise aujourd'hui fréquemment pour s'adapter au monde, être plus productif, plus créatif. L'influence croissante de l'imaginaire du management pousse les individus à toujours se dépasser", résume-t-il.
"Le problème, c'est qu'on en sait pour l'instant très peu sur les effets à long terme sur le cerveau d'un usage chronique de psychédéliques", ajoute-t-il.

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