jeudi 20 février 2020

Dépression des personnes SDF souffrant de pathologies mentales : enseignement d’un programme français

Univadis


Par Caroline Guignot    17 févr. 2020

Messages principaux
  • Les données d’une importante cohorte française de sujets en grande précarité, schizophrènes ou bipolaires, montrent que si près de la moitié présentent un épisode dépressif caractérisé, une minorité sont traités et une minorité de ceux sous traitement sont en rémission.
  • Ces données doivent inciter les praticiens prenant en charge ces patients à mieux évaluer le risque ou l’épisode dépressif. Certaines approches thérapeutiques pourraient améliorer ce constat (adaptation des prescriptions, interventions sociales complémentaires…).
Le programme « Un chez soi d’abord » est un dispositif national qui propose aux personnes en situation de grande précarité et présentant des troubles psychiques sévères un accès à un logement stable et à un accompagnement étroit par une équipe médico-sociale pluridisciplinaire. Il rassemble une population dans laquelle la schizophrénie et les troubles bipolaires sont fortement prévalents. La survenue d’épisodes dépressifs caractérisés peut compliquer ce lourd tableau clinique. Parce que les contours de leur prise en charge et de leur rémission restent imprécis, a fortiori dans une population aussi vulnérable, il était intéressant d’évaluer les données du programme pour en tirer de nouvelles pistes de réflexion sur les pratiques.
Une cohorte de 700 adultes issus de 4 villes
Déployé à Lille, Marseille, Paris et Toulouse, ce programme a fait l’objet d’une évaluation scientifique à travers une étude randomisée comparant les sujets intégrés au dispositif à d’autres personnes dans une situation sociale similaire et prises en charge selon les dispositifs habituels. Ici, les données exploitées sont celles des patients ayant bénéficié du programme, soit 700 patients (âge moyen 38 ans, 82,5% d’hommes atteints de schizophrénie ou de troubles bipolaires dans 68,9% et 31,1% des cas respectivement). L’objectif était de déterminer la prévalence des épisodes dépressifs chez ces patients, leur prise en charge et les facteurs qui y sont associés.
Un sujet sur deux souffre d’un épisode dépressif
Parmi les 700 sujets, 55,4% ont été diagnostiqués pour un épisode dépressif, soit 51,3% des sujets schizophrènes et 63,8% des sujets bipolaires, et seuls 10,4% étaient traités par antidépresseurs.
Les patients présentant un épisode dépressif avaient plus de risque d’avoir été récemment victime de violence, de présenter une consommation de substances (droques, abus d'alcool). Ces deux facteurs étaient aussi associés au fait d’être traité par antidépresseurs.
Les sujets qui étaient traités par antidépresseurs (10,3% de la cohorte) n’étaient pas en rémission pour la plupart (71,2%). Ceux qui ne l’étaient pas étaient plus souvent bipolaires ou consommateurs de substances. Aucune classe thérapeutique n’a été associée à une rémission plus fréquente de la dépression. Cependant, certaines molécules n’étaient pas prescrites (lithium, carbamazépine, lamotrigine, clozapine) et pourraient être évaluées dans ce contexte, malgré les précautions associées à l’usage de ces molécules.

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