lundi 23 décembre 2019

Lycanthropie : avoir la conviction délirante d’être un loup 






© Pixabay
C’est l’histoire de deux hommes, âgés de 41 et 52 ans, admis dans un service de psychiatrie. Tous deux ont la conviction délirante de s’être transformés en loup et se comportent comme tel. Ces patients sont atteints de lycanthropie, du grec lykos (loup) et anthropos (homme). Ces deux cas sont rapportés par un psychiatre portugais dans le numéro daté de novembre 2019 de la revue The primary care companion for CNS disorders.

Le premier patient est un homme obèse de 41 ans, diagnostiqué schizophrène depuis l’âge de 20 ans. Il souffre d’insomnie, d’agitation nocturne, d’agressivité accompagnée d’hallucinations auditives. Il présente un délire de lycanthropie. Entendant des voix qui lui disent qu’il se transforme en loup, il se réveille au milieu de la nuit et hurle. Lors de ces épisodes, il se regarde dans le miroir et ne se reconnaît pas. A sa place, il voit un loup. Lorsqu’il est examiné par le Dr João Gama Marques du Centre hospitalier psychiatrique de Lisbonne, cela fait six mois qu’il est lycanthrope. Sa famille est épuisée, d’autant qu’il présente également un très bruyant ronflement. Le patient est également diabétique. Son scanner cérébral et son électroencéphalogramme ne montrent rien d’anormal. Cependant, la polysomnographie, examen permettant chez un patient endormi l’enregistrement de plusieurs paramètres physiologiques, détecte une extrême fragmentation de son sommeil. Celle-ci étant la conséquence d’un syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil d’intensité modérée.
A la suite de ces constatations, le traitement de son trouble schizophrénique est ajusté. Des conseils sont prodigués en matière d’observance thérapeutique et des mesures hygiéno-diététiques sont recommandées. Le patient est par ailleurs adressé à un pneumologue pour la mise en place d’un traitement par ventilation nasale à pression positive continue (PPC). Mais il le refuse. Après une perte de poids significative, le ronflement disparaît. Enfin, aucun nouvel épisode de lycanthropie ne se reproduit.

Apnée du sommeil
Le second patient, âgé de 52 ans, souffre de dépression depuis l’âge de 37 ans. Il est admis en psychiatrie pour agitation, agressivité et hallucinations kinesthésiques (sensation de mouvements passifs), grognements bruyants et délire de lycanthropie. Il explique qu’il sent des bestioles grouillant sur son abdomen et a terriblement envie de mordre d’autres loups pour se débarrasser de ces parasites. Ces symptômes, qui sont apparus au cours des quatre années précédentes, ont fini par épuiser ses proches qui se plaignent également de son ronflement chronique. L’homme est par ailleurs diabétique. L’électroencéphalogramme est normal. Comme le patient précédent, il souffre d’un syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil, mais d’intensité sévère. Celui-ci entraîne également une fragmentation du sommeil. Le traitement psychiatrique est ajusté et les médecins recommandent une meilleure hygiène de vie. Le patient refuse le traitement par pression positive continue (PPC). Après ajustement de son traitement, le ronflement s’estompe et l’homme cesse de se prendre pour un loup.


Ces deux cas de lycanthropie associés à un syndrome d’apnée du sommeil sont les seuls rapportés à ce jour dans la littérature médicale. Selon les auteurs, les réveils et les hypoxies (manques d’oxygène) associées aux apnées pourraient avoir contribué au symptôme psychiatrique, une altération de la perception ayant pu se produire lors d’un état de transition entre veille et sommeil.

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