samedi 23 novembre 2019

Saint-Alban, lieu d’hospitalité (1/2) Un asile à l’abri de la folie du monde

23/11/2019
28 MIN

1943. Perdu au milieu des montagnes de la Margeride, en Lozère, l’hôpital de Saint-Alban-sur-Limagnole est un asile psychiatrique. Un lieu de refuge, pour les fous mais pas seulement.
L'Hôpital psychiatrique de Saint-Alban en 1950
L'Hôpital psychiatrique de Saint-Alban en 1950 Crédits : François Teste - Radio France
Pendant la seconde guerre mondiale, des juifs et des résistants vont venir s’y cacher, se faisant passer pour des malades mentaux, ou intégrant les équipes soignantes. Parmi eux, Denise Glaser, qui deviendra plus tard une vedette de petit écran grâce à son émission "Discorama", mais aussi le poète, résistant et membre du groupe surréaliste Paul Eluard, accompagné de sa seconde épouse Nusch. 
Paul Eluard, qui a commis l'imprudence de signer alors qu'il utilise pas mal de faux noms, de pseudonymes. Il a signé Liberté, son poème Liberté, de son propre nom. Et ce poème Liberté est diffusé partout, mais il est surtout diffusé par l'aviation anglaise quand elle livre des armes par parachutage.  Dans les containers, il y a des milliers et des milliers d'exemplaires de Liberté signés Paul-Eluard et sa vie est véritablement en danger et il va trouver refuge lui aussi à Saint-Alban.  Didier Daeninckx 
Vue de l'hôpital Saint-Alban
Vue de l'hôpital Saint-Alban Crédits : François Teste - Radio France

1er épisode : Un asile à l’abri de la folie du monde

Eluard, membre du comité de lecture des Editions de Minuit clandestines, artisan du Comité national des écrivains, mais aussi, auteur de "Liberté", ce poème devenu l’hymne de la Résistance, dont les copies sont parachutées par les avions anglais en même temps que les armes et les munitions destinées aux maquis. C’est pour cette raison-même que le poète est recherché, et qu’il doit lui aussi trouver refuge à l’hôpital de Saint-Alban. Ce refuge, et d’une certaine manière son salut, il le doit à deux psychiatres charismatiques et engagés : d’abord son ami résistant communiste Lucien Bonnafé ; et l’ancien membre du POUM et réfugié politique catalan François Tosquelles. A eux deux, ces médecins hors normes transforment l’asile en lieu de refuge pour la résistance, mais préparent aussi une révolution psychiatrique en faisant émerger un mouvement majeur : la psychothérapie institutionnelle. Celle-ci prône un modèle de psychiatrie humaniste, où il s’agit de soigner les patients, mais aussi l’hôpital, l’institution psychiatrique elle-même.
Une personne pouvait être délirante, mais elle n'en était pas moins humaine.  Marie-Rose Oura-Bah
Ici, parmi les patients, Paul Eluard va composer "Souvenirs de la maison des fous", un recueil de poèmes- portraits de malades. C’est là aussi que le poète va rencontrer le sculpteur Auguste Forestier, interné à Saint-Alban depuis plusieurs années déjà, et qu’il présentera après la guerre à Dubuffet, futur théoricien et collectionneur de "l’art brut".

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