dimanche 27 octobre 2019

Prise en charge de la douleur : d'après les spécialistes, ça se passe mal !

26.10.2019


Douleur
Garo/Phanie

Tous âges confondus, une personne sur trois en France souffre de douleurs chroniques, plus ou moins invalidantes, qui s’éternisent au-delà de trois mois. Pour 20 % des Français, ce sont même des douleurs d’intensité modérée à sévère. Un mal qui cloue 45 % des patients douloureux chroniques chez eux, en arrêts maladie dont la durée moyenne cumulée dépasse 4 mois par an.

Face à ce mal, les années passent et le constat demeure : alors que le traitement de la douleur relève du problème de santé publique, la prise en charge est toujours loin du compte, a rappelé lors d’un point presse conjoint, la fondation Apicil et les spécialistes de la Société Française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD), qui tiendra son congrès annuel fin novembre à Strasbourg. Plus de 70 % des patients qui souffrent ne reçoivent en effet pas un traitement approprié pour leur douleur, ni de suivi psychologique lorsqu’il est nécessaire.
La douleur chronique est sous-évaluée
Les raisons de ce défaut de traitement sont multiples, explique le Pr Frédéric Aubrun, anesthésiste-réanimateur et président de la SFETD. D’abord la douleur chronique et sa prévention sont sous-évaluées. Alors que la douleur aiguë fait partie des motifs de consultation pour plus de 60 % des patients qui arrivent aux urgences, seul un sur deux y reçoit un traitement antalgique à l’admission. De même, « 20 à 50 % des personnes qui subissent une intervention chirurgicale développent une douleur chronique post opératoire », souligne le Pr Aubrun qui rappelle « une douleur aiguë mal prise en charge est un facteur de chronicisation ». Difficile d’en venir à bout lorsqu’elle s’est installée, alors que ni l’attention ni les moyens ne sont suffisamment au rendez-vous. « Pendant des années, les Plans douleurs successifs ont permis de faire avancer les choses", constate le président de la SFETD.
Côté médical, « en vingt ans, le progrès ont été indéniables » souligne la Pr Nadine Attal, neurologue à l’hôpital Ambroise-Paré, de l’AP-HP. La douleur fait désormais l’objet de quelques questions aux ECNi et figure au programme des études médicales à partir de la quatrième année, même si une vingtaine d’heures seulement y sont spécifiquement consacrées. « Mais depuis 2010, il n’y a plus de Plan, déplore Frédéric Aubrun. Résultat : plus de sensibilisation du public. Quant aux acteurs de la prise en charge de la douleur, ils sont démotivés. » Centres de recours à même de proposer un traitement bio-psycho-social de la douleur, les 243 structures pluridisciplinaires (simples consultations ou centres d’évaluation) labellisées, qui maillent le territoire ne sont pas toujours connus des médecins libéraux et ne reçoivent aujourd’hui que 5 % des patients douloureux chroniques. Avec une file active de 400 000 patients bon an mal an, ils affichent des délais moyens de 6 à 8 mois d’attente, faute d’effectifs suffisants. Par ailleurs, leur financement, pour partie assuré par une dotation nationale de mission d’intérêt général, n’est jamais assuré de pérennité.
Claudine Proust

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