mardi 8 octobre 2019

«Nos défaites» explore le temps dans le rétroviseur du cinéma engagé

Slate.fr

Jean-Michel Frodon — 

En faisant interpréter par des lycéen·nes d'aujourd'hui des scènes de films porteurs de l'esprit révolutionnaire des années 68, le nouveau film de Jean-Gabriel Périot révèle des gouffres troublants.

Filmé·es par leurs camarades, des lycéen·nes d'aujourd'hui rejouent des scènes mémorables de La Salamandre ou Reprise du travail aux usines Wonder. | Via Météore Films
Filmé·es par leurs camarades, des lycéen·nes d'aujourd'hui rejouent des scènes mémorables de La Salamandre ou Reprise du travail aux usines Wonder. | Via Météore Films
Il est passionnant que le nouveau film de Jean-Gabriel Périot sorte une semaine après Alice et le maire, dont il est à la fois le symétrique et l'inverse.
Si la fiction de Nicolas Pariser se construisait sur la nostalgie d'une idée de la politique exercée depuis les sommets du pouvoir, le documentaire se développe à partir d'une mémoire politique populaire, venue d'en bas.

Réaction en chaîne

Nos défaites est née d'ateliers de réalisation auxquels le cinéaste a été invité dans une classe de terminale du lycée Romain-Rolland d'Ivry-sur-Seine –le même cadre qui avait déjà donné naissance à Premières Solitudes de Claire Simon, mais pas avec les mêmes élèves.
Périot a fait rejouer des extraits de films réalisés aux alentours de Mai 68 et témoignant de manières diverses des engagements révolutionnaires de l'époque.
Les séquences où une dizaine de lycéen·nes se mettent dans les gestes et les mots des personnages de La ChinoiseÀ bientôt j'espèreReprise du travail aux usines WonderAvec le sang des autres ou Camarades produisent des déflagrations à la fois instructives et troublantes, émouvantes et comiques.
La déflagration sensible entre les mots et les idées d'alors et les corps et les visages d'aujourd'hui déploie sans aucun besoin de paraphrase l'ampleur du bouleversement qui s'est joué au cours des décennies qui séparent les deux époques.

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