mardi 29 octobre 2019

Fonction publique : toujours trop peu de médecins de prévention, estime la députée Charlotte Lecocq

PAR MARIE FOULT
  
PUBLIÉ LE 29/10/2019

Crédit photo : S. Toubon

Après avoir rendu un premier rapport en août 2018 sur la santé au travail pour les salariés du secteur privé, la députée du Nord Charlotte Lecocq (LREM) a commis un second rapport, cette fois tourné vers la santé, la sécurité et la qualité de vie au travail dans la fonction publique (hospitalière, territoriale, d'État).
Dans ce dernier, la mission (menée conjointement avec Pascale Coton, vice-présidente du Conseil économique social et environnemental, et Jean-François Verdier, inspecteur général des finances) appelle de ses vœux une évolution du système de prévention des risques professionnels dans la fonction publique, dont les agents sont souvent exposés à « la violence » et à « une image dégradée de leur métier ».

Pénurie de médecins
Si la mission souligne « le peu de données » en matière de sinistralité dans ce secteur, elle fait tout de même état d'un taux d’accidents de travail (déclaratif) d’environ 9,5 % en 2016, d'un taux d’absentéisme de 8,34 % (contre 4,72 % dans le privé) et de près de 42 millions de journées d’absence comptabilisées en 2015. Près d’un quart des agents se déclare victime d’agressions verbales (24,3 %) et trois fonctionnaires sur 10 déclarent avoir consommé des benzodiazépines au cours des 12 derniers mois.
Face à ces chiffres, la mission pointe une pénurie de médecins de prévention (de formation médecins du travail) « sans conteste le point le plus faible » du dispositif de santé au travail. « Les témoignages recueillis par la mission ainsi que les éléments rassemblés font part de l’extrême difficulté des employeurs publics de recruter des médecins de prévention », rapporte la mission.
Là encore, des chiffres font défaut. La fonction publique d'État, en 2017, comptabilisait 421 médecins de prévention (en ETP) dans les ministères, beaucoup moins qu'il y a cinq ans (651 ETP en 2013). Cela recouvre des situations diverses : le ministère des Finances comptabilise 113 médecins pour 140 000 agents, tandis que le ministère de l’Éducation nationale en recense 98 pour 1,1 million d’agents (soit un médecin pour 11 000 agents). « La pénurie de médecins de prévention est bien identifiée. Elle résulte de la diminution du nombre de médecins formés en médecine du travail, aggravée par la faible attractivité du secteur public », résume la mission.
Miser sur l'équipe de santé pluridisciplinaire
De ces constats découlent plusieurs nécessités. La mission recommande que le pilotage de la politique de santé et de sécurité au travail dans le public soit du ressort d'une délégation interministérielle. En termes d'organisation sur le terrain de la santé au travail, la mission ne propose pas de schéma unique, car la santé dans la fonction publique peut être très diverse « selon les trois versants ». Elle plaide plutôt pour des mutualisations de ressources.
« La pénurie de médecins du travail a entraîné une course concurrentielle au recrutement, dont les petites collectivités et certains métiers sont les grands perdants, occasionnant de fortes disparités d’accès au suivi médical et à la prévention des risques », pointent les auteurs. Cette offre de service mutualisée aurait un socle commun (suivi individuel obligatoire, accompagnement pluridisciplinaire en prévention, aide au maintien dans l'emploi…).
Une dizaine de recommandations sont par ailleurs formulées, dont l'une concerne directement l'équipe médicale. Pour garantir un suivi des agents de la fonction publique malgré la pénurie médicale, la mission insiste sur les équipes pluridisciplinaires et le rôle des infirmiers (déjà en place dans le secteur privé), la mise en place de la pratique avancée pour les infirmiers en santé au travail ou encore la télémédecine. Enfin, la mission préconise d'harmoniser les règles du suivi médical dans les trois versants, et de les aligner sur celles du secteur privé, et d'ouvrir le dossier médical partagé (DMP) à la santé au travail.

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