jeudi 12 septembre 2019

Réseaux sociaux : au-delà de 3 heures par jour, le risque de trouble du comportement augmente chez les ados

PAR DAMIEN COULOMB 
PUBLIÉ LE 11/09/2019

Crédit photo : PHANIE
À partir de 3 heures de temps passé sur les réseaux sociaux, les adolescents s'exposeraient à un surrisque de troubles du comportement dits « intériorisés », caractérisés par des symptômes anxio-dépressifs, un sentiment d'épuisement chronique et des difficultés adaptatives, selon les résultats d'une étude de cohorte longitudinale publiée dans le « JAMA Pyschiatry ».

Pour le Pr Ramin Mojtabai qui a dirigé ces travaux menés à l'université John Hopkins de Baltimore, « un grand nombre d'études sur ce sujet ont été menées, mais la plupart sont des études transversales qui, contrairement à la nôtre, ne font pas de description dans le temps du phénomène. » Ici, les 6 595 participants ont été recrutés au sein de la cohorte Population Assessment of Tobacco and Health Study. Ils ont été interrogés à 3 reprises entre septembre 2013 et octobre 2016 avec, à chaque fois, une année d'intervalle. Le premier et le troisième interrogatoire étaient consacrés à l'évaluation des troubles des comportements intériorisés et extériorisés (comportements agressifs, impulsivité, maque d'empathie…), et le deuxième à celle du temps passé sur les réseaux sociaux.
Troubles extériorisés et intériorisés du comportement
Les participants devaient évaluer leur temps quotidien passé sur les réseaux sociaux et ont été classés en 5 groupes : aucun usage des réseaux sociaux (1 125 adolescents), moins de 30 minutes par jour (2 082), entre 30 minutes et 3 heures (2 000), entre 3 heures et 6 heures (817) et plus de 6 heures (571).
Les adolescents qui passaient entre 30 minutes et 3 heures par jour avaient un risque de développer des troubles extériorisés et intériorisés du comportement de 19,6 %, soit 89 % de risque en plus que ceux qui n'utilisent pas les réseaux sociaux (10,7 %). Le risque était de 24,6 % entre 3 et 6 heures quotidiennes (risque relatif de 2,47) et 29,7 % au-delà de 6 heures (risque relatif de 2,83).
En analyse multivariée, le constat est sensiblement différent, puisque seule l'apparition de troubles intériorisés augmente significativement à partir de plus de 3 heures par jour sur les réseaux sociaux (risque relatif : 1,60). Au-delà de 6 heures, le risque relatif passe à 1,78. En revanche, aucune augmentation du risque de troubles extériorisé n'était observée, quel que soit le groupe considéré.
D'autres facteurs de risque pour expliquer la violence
Pour le Pr Ramin Mojtabai, les comportements agressifs observés chez les gros consommateurs de réseaux sociaux s'estompent quand on prend en compte d'autres facteurs de risque comme les antécédents de violences, de harcèlement ou le fait d'être issu d'une famille monoparentale. Pour ce pédopsychiatre, le respect des recommandations de l'académie de pédiatrie américaine — passer les repas en famille, interagir avec les membres d'une fratrie, pratiquer une activité physique — peut compenser en partie l'effet d'une forte consommation de réseaux sociaux.
Selon Kira Riehm, interne en psychiatrie et premier auteur de l'étude, à durée égale, les différents types d'utilisation des réseaux sociaux ne se valent pas : « Interagir avec ses amis n'est pas la même chose qu'interagir avec des inconnus », explique-t-elle. Des recherches supplémentaires seront nécessaires pour vérifier si l'imposition de limites de temps, l'éducation aux médias ou encore des changements de design des plateformes de réseaux sociaux ont un impact bénéfique sur la santé mentale de cette population.
« Il est intéressant de voir comment les plateformes réagissent aux campagnes d'accusations qui ciblent certains utilisateurs et proposent des outils pour en atténuer les effets », explique le Kira Riehm.

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