vendredi 16 août 2019

Petite histoire de la psychiatrie




    16 AOÛT 2019
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  • ÉDITION : POLITIQUE FICTION
    • Une petite fiction sur une histoire tortueuse, souvent douloureuse, celle de la psychiatrie. Une histoire encore trop peu connue qui est aussi celle des électrochocs, des lobotomies au pic à glace, de la violence machiste contre les femmes «hystériques», des stérilisations forcées... En soutien de tous ceux qui, aujourd'hui encore, luttent pour une autre psychiatrie.
      L'hôpital psychiatrique de N. était situé à quelques kilomètres du centre-ville, en bordure d'une petite route menant vers des villages de l'arrière-pays. Construit au XIXème siècle, partiellement détruit pendant la seconde guerre mondiale, durant laquelle une poignée de maquisards étaient venus s'y retrancher, puis reconstruit dans les années 50, le bâtiment s'élevait au milieu d'une forêt dense de chênes lièges, de frênes, de tilleuls, envahie par les sangliers et les écureuils. Il était composé de deux tours principales sur quatre étages, recouvertes de tuiles roses, qui pouvaient accueillir près d'une centaine de patients, en plus des espaces réservés aux bureaux de l'administration. Le parc, vaste, était entouré de hauts murs blancs qui dissimulaient à la vue des passants éventuels diverses structures d'agrément comprenant un terrain de sport goudronné, des massifs floraux mais aussi, d'une façon assez incongrue, un bac à sable et un toboggan, éléments qui donnaient aux jardin de l'hôpital des allures de cour d'école. Peut-être le concepteur du parc s’était-il convaincu, à tort ou à raison, que rien n'est plus semblable à un fou qu'un enfant. Autour de l'hôpital, quelques maisons hébergeaient des membres du personnel, notamment le directeur, le docteur Maynard, dont les filles jouaient souvent dans le jardin à la grande joie de quelques pensionnaires qui aimaient, assis sur l'un des bancs du parc, écouter leurs rires et leurs chants, symboles d'une vie simple et libre dont eux-mêmes s'étaient retranchés.
      Mais il y avait autre chose.
      C'est dans les années 1850, après que la loi française, sur une idée de Jean-Étienne Esquirol, eût rendue obligatoire la construction d'hôpitaux psychiatriques dans chaque département, que celui de N. fut construit. Jusqu'alors, comme c'était la coutume depuis Louis XIV, tous les fous des alentours, c'est à dire les mendiants, les pauvres et les invalides, en bref toute la fange de la société, étaient parqués dans les hôpitaux généraux que le bon roi avait demandé à créer dans chaque ville de France, afin de leur faire retrouver goût au travail ou, au minimum, de ne pas imposer à la vue des honnêtes citoyens modernes leurs perpétuelles, inesthétiques et amorales déambulations. Au début, ces mesures d'enfermement ne concernaient que Paris : mais comme beaucoup de pauvres avaient senti venir le coup et avaient fui la capitale, il fut aussi décidé de créer des hôpitaux généraux en province. Les directeurs de ces institutions, nommés à vie, avaient tout pouvoir, notamment en ce qui regardait les châtiments corporels et procédures de rétention, pour mener à bien cette noble tâche, ce dont ils ne se privèrent pas. Quelques médecins finirent cependant par pointer du doigt les limites du système et des hôpitaux psychiatriques, qui étaient encore des asiles, une différence sémantique peu importante pour les hôtes de ces locaux, furent créés un peu partout en France.

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