mardi 2 juillet 2019

Le comité national d'éthique appelle à intégrer l'enseignement de la démarche éthique dans les études médicales

Coline Garré
| 02.07.2019



  • etude ethique
Crédit Photo : S. Toubon

Le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) et la Conférence nationale des espaces de réflexion éthique régionaux (CNERER) demandent l'intégration de la réflexion éthique dans la formation médicale, via un appel envoyé ce 2 juillet aux présidents de centres hospitaliers, des commissions médicales d'établissements, des universités et aux doyens de médecine. « La modification importante en cours des études médicales constitue une opportunité pour impulser une nouvelle dynamique collective dans la formation à l'éthique et dans l'éthique du soin », font-ils valoir. 

L'enseignement de l'éthique est actuellement insuffisant et loin d'être prioritaire au sein des facultés de médecine, déplorent le CCNE et la CNERER - un constat partagé par les étudiants et professeurs. Seulement 13 % des universités dispenseraient une formation en éthique entre la 2e et 6e année de médecine*. Et aucun état des lieux n'existe pour le 3e cycle.
Pourtant, le questionnement éthique est nécessaire à plus d'un titre, soulignent les auteurs de l'appel : il permet de comprendre la complexité des problématiques soulevées par les progrès scientifiques, il forme à la délibération collégiale, et il permet de concilier deux piliers indissociables d'une médecine holistique, que sont les approches bio-technomédicale et psycho-socioéducative. 
Des compétences, plus que des connaissances  
La formation à l'éthique appliquée aux soins doit avoir l'ambition de développer des compétences plus que des connaissances, lit-on. Certes, l'enseignement doit évoquer les grands principes de l'éthique (autonomie, bienfaisance, non nuisance, équité, justice), les lois de bioéthique, et les débats sociétaux. 
Mais il doit surtout « privilégier l'acquisition d'un questionnement éthique du "quotidien" » afin de pouvoir réfléchir sur des conflits de valeur au cœur du soin (par exemple, entre liberté individuelle et solidarité, priorisation personnelle et nuisance potentielle à autrui, etc.) et acquérir des compétences comme le « tact » dans le soin (on parle alors d'éthique relationnelle). 
Cet enseignement obligatoire pourrait prendre la forme d'ateliers multidisciplinaires de pratique clinique, et s'appuyer sur des mises en situation, la médecine narrative, les jeux de rôle, les vidéos, ou l'échange avec des patients-partenaires. Il devrait se déployer sur plusieurs années, y compris au cours du 3e cycle, où chaque discipline pourrait aborder des cas cliniques spécifiques. Son évaluation ne doit pas valider l'acquisition d'un savoir, mais d'une démarche réflexive ; elle doit s'intégrer notamment dans le certificat de compétences cliniques prévu en fin de 2e cycle, avant les ECN, lit-on.
Enfin, le CCNE et la conférence des espaces éthiques considèrent que cet enseignement doit être porté par plusieurs professionnels (médecins, soignants, patients, philosophes, spécialistes des sciences humaines et sociales, voire théologiens) et s'enrichir des compétences des espaces de réflexion éthique et des comités d'éthique des établissements.  
L'occasion de redire que les facultés de médecine doivent parvenir à nommer des maîtres de conférences dans ces disciplines, soulignent les deux instances. 
*Selon une thèse de doctorat en médecine générale, Poitiers 2016 (Manon Correc), citée dans l'appel.

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