mardi 8 janvier 2019

Violences sexuelles : des pistes pour «agir contre une épidémie»

Par Virginie Ballet — 
A Paris, le 24 novembre dernier, lors d'une manifestation contre les violences sexuelles, sous le mot d'ordre «Nous toutes».
A Paris, le 24 novembre dernier, lors d'une manifestation contre les violences sexuelles, sous le mot d'ordre «Nous toutes».Photo Marie Rouge pour Libération



L'association Stop aux violences sexuelles organise ce lundi et mardi à Paris ses sixièmes assises internationales sur les violences sexuelles.

Identifier blocages et tabous, débattre, échanger, pour mieux combattre. Tels sont les objectifs des sixièmes assises internationales sur les violences sexuelles, organisées ce lundi et mardi à Paris par l’association Stop aux violences sexuelles. Pendant deux jours, une quarantaine d’intervenants (médecins, sages-femmes ou encore juristes) se succèdent pour aborder les pistes possibles d’amélioration en matière de lutte contre les violences sexuelles de tous types, et ce dans le sillage de la vague planétaire de libération de la parole via le mouvement #MeToo. Pour Violaine Guérin, gynécologue et endocrinologue, qui préside l’association, il y a urgence : «Une femme sur quatre et un homme sur six est concerné au cours de sa vie, souligne-t-elle. Il semblerait par ailleurs qu’on ait du mal à regarder en face le nombre d’enfants touchés, qui s’élève à un sur cinq en Europe.» Alors pour cette professionnelle, il est grand temps d’agir contre ce qui relève en son sens d'«une épidémie».

«L’image de la mère nourricière» 

«Au sein de l’association, on souhaite porter une véritable stratégie de santé publique pour guérir les victimes, mais aussi les auteurs de ces violences», poursuit la docteure. Pour y parvenir, il faut aussi savoir faire fi de certaines idées reçues, comme celle du genre des auteurs de violences sexuelles. «Les femmes aussi peuvent commettre ce genre d’actes, même s’ils sont moins révélés et moins poursuivis, car cela touche à l’inimaginable, l’image de la mère nourricière qui prend soin des enfants. D’où l’immense tabou», précise Jean-Louis Thomas, membre de l’unité de recherche médicale de Stop aux violences sexuelles. Alors que le ministère de l’Intérieur évalue à environ 2% le pourcentage de femmes auteures de violences sexuelles (1), Stop aux violences sexuelles avance plutôt un taux pouvant aller jusqu’à 20%, sur la base de travaux menés par l’association en 2014, qui s'appuient sur des questionnaires aux victimes.

«Amnésie traumatique»

Outre leur impact psychologique et psychiatrique, les «atteintes corporelles et sensorielles des violences sexuelles ne sont pas à négliger», déroule Violaine Guérin, pour qui certaines pathologies comme l’endométriose, la fibromyalgie ou encore les maladies digestives sont surreprésentées chez les victimes. D’où son exhortation à réviser les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) pour que soient systématiquement intégrées des questions sur les antécédents éventuels de violences sexuelles des patients atteints de ces maladies. En ligne de mire, deux objectifs : un meilleur dépistage et davantage de prévention. «Il est essentiel de former les personnels médicaux aux signaux qui doivent alerter en périnatalité, car la grossesse peut s’avérer un déclencheur de remontée d’amnésie traumatique», insiste Nicole Andrieu, sage-femme. Ainsi, en un an, l’association a déjà formé plus de 140 sages-femmes, en milieu hospitalier ou non.
(1) Rapport insécurité et délinquance, janvier 2018.




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