mercredi 5 décembre 2018

Menacée par 14 suppressions de postes, la maternité des Bluets (Paris) en grève illimitée

Martin Dumas Primbault
| 04.12.2018



bluets
Crédit Photo : S. Toubon

Vêtus de gilets blancs flanqués des inscriptions « en grève » ou « CGT = patron », une soixantaine de soignants de la maternité des Bluets, à Paris (secteur privé à but non lucratif), ont investi hier matin, mégaphone hurlant, le hall de leur établissement. Ce lundi 3 novembre marquait le premier jour d'une grève illimitée votée vendredi en assemblée générale.

Les personnels mobilisés s'opposent à un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) prévoyant la suppression de 14 postes afin d'éviter le scénario d'un redressement judiciaire. « Plus de 70 personnes ont voté en faveur de la grève, ce qui est très rare », s'est félicitée Virginie Gossez, sage-femme et déléguée syndicale Sud-Santé de la maternité qui emploie environ 200 personnes. La mobilisation prendra la forme d'un « débrayage », d'une heure tous les jours et ce jusqu'au 12 décembre, date à laquelle le PSE doit être examiné par le Tribunal de Grande Instance de Paris.
Perte de compétences
La crise ne date pas d'hier. Depuis 2012, cet établissement pionnier en France de l'accouchement sans douleur dans lequel naissent environ 3 000 bébés par an connaît une situation financière dégradée. En 2016, un premier plan de sauvetage avait conduit à la perte de la certification délivrée par la Haute Autorité de santé (HAS) et à la chute de l'activité.
Deux ans plus tard, la situation sanitaire s'est améliorée selon les grévistes. L'établissement a retrouvé son niveau de certification initial, le nombre d'accouchements est à la hausse et le personnel porte même des projets de développement. « Nous avons la volonté d'obtenir le statut de maternité de type 2A afin de prendre en charge certaines grossesses prématurées », prévoit Virginie Gossez.
Mais les licenciements prévus par le PSE pourraient remettre en cause ce projet. « Ce serait une perte de compétences assez douloureuse », alerte le Dr Michel Heisert, chef du service de maternité et soutien du mouvement comme beaucoup de médecins de l'établissement. Le personnel dénonce ainsi un plan qui coûterait plus cher que les économies attendues.
Mais derrière la crise financière se cache aussi une crise de gouvernance dans cette maternité gérée par l'Association Ambroise Croizat, filiale sociale de la fédération CGT de la métallurgie. « Les gens qui nous dirigent ne sont pas à la hauteur », dénonce Virginie Gossez, qui accuse la CGT de recycler ses anciens permanents au détriment d'une « gestion rigoureuse de l'hôpital ».
En désaccord avec la direction de l'association, l'ancien directeur Pascal Bénard, arrivé début 2017, a été remplacé par Nathalie Gamiochipi, ancienne secrétaire générale de la CGT santé.
Ultimatum
Ce lundi après-midi, une réunion avait lieu entre le personnel mobilisé et le directeur l'agence régionale de santé (ARS) Île-de-France. À son issue, le Dr Évelyne Petroff, présidente de la commission médicale d'établissement (CME) évoquait l'« ultimatum » lancé par Aurélien Rousseau. « Il veut qu'on accepte le PSE et une série de propositions qu'il va nous faire sur la gouvernance, faute de quoi, il refuserait de nous soutenir financièrement », explique la gynécologue, qui chiffre à 5 millions d'euros le déficit de son établissement. Une telle situation conduirait inévitablement à la prononciation d'une liquidation judiciaire le 12 décembre.
Une nouvelle assemblée générale est prévue mercredi midi pour décider de l'avenir du mouvement après cette mise en demeure qui divise les grévistes. Si le choix est fait de ne pas céder, le Dr Évelyne Petroff n'envisage qu'une option : « Écrire un courrier à Macron, Buzyn, Pénicaud et tout le gouvernement s'il le faut. »

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