mardi 27 novembre 2018

Où la dépression chronique mène au long séjour

Publié le 22/11/2018

Les symptômes dépressifs au long cours pourraient avoir un effet cumulatif et augmenter la probabilité d’être placé dans une unité de soins de longue durée (USLD). Cette hypothèse a fait l’objet d’une étude de cohorte prospective menée sur deux décennies dans trois régions des États-Unis, situées autour de Baltimore (Maryland) de Minneapolis (Minnesota) ou encore de Pittsburg (Pennsylvanie).

La cohorte étudiée se compose initialement de 3 646 femmes âgées d’au moins 65 ans vivant au sein de la communauté. Les données ont été recueillies à partir des dossiers déposés auprès du système Medicare. Le poids de la dépression au long cours a été déterminé au moyen d’une échelle spécifique, en l’occurrence la Geriatric Depression Scale, qui a été utilisée de manière itérative pour calculer l’effet cumulatif.

C’est le modèle des risques proportionnels compétitifs ou concurrents de Fine-Gray qui a été utilisé pour estimer le risque d’être placé en USLD en fonction des troubles dépressifs cumulés. Les hazard ratios (HRs) et leurs intervalles de confiance à 95 % (IC) ont été ainsi estimés en intégrant en tant que covariables les éléments suivants : caractéristiques démographiques, comorbidités et antécédents médicaux, gêne fonctionnelle et notion de dépression récente. Le risque compétitif de décès a également été pris en compte.

Les enseignements du suivi pendant 20 ans d’une cohorte de femmes âgées

Le groupe de référence a été constitué par les sujets dont la charge dépressive a été considérée comme minime, voire négligeable. Par rapport à ce dernier, l’existence de troubles dépressifs légers a été associée à un risque majoré d’admission en USLD, le HR étant en effet de 1,92 (IC= 1,16-3,20). Pour des troubles jugés modérés, le HR a atteint 2,62 (IC = 1,59-4,31) pour culminer à 3,08 (IC = 1,87-5,08) en cas de charge dépressive cumulée élevée. La prise en compte d’un traitement antidépresseur éventuel n’a guère modifié ces résultats qui ont été obtenus après ajustement en fonction des facteurs de confusion potentiels précédemment évoqués.

Chez la femme âgée (> 65 ans), la charge cumulée des troubles dépressifs en près de deux décennies est associée à un risque élevé de devoir entrer dans une USLD. Ce risque est indépendant de toute dépression récente, des comorbidités médicales, du handicap fonctionnel et du risque compétitif de décès. De ce fait, il importe de détecter précocement la dépression du sujet âgé, de surveiller son évolution et, bien sûr, de la traiter pour retarder le plus longtemps possible l’heure de la maison de retraite et des autres lieux de long séjour.

Dr Philippe Tellier
RÉFÉRENCES
Byers AL et coll. : Burden of Depressive Symptoms Over 2 Decades and Risk of Nursing Home Placement in Older Women. J Am Geriatr Soc., 2018 ; 66 
:1895-1901. 

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