samedi 27 octobre 2018

« Nous n'avons pas qu'une vision comptable ! », clame le président de la 6e chambre de la Cour des comptes

| 24.10.2018


Les recommandations de la Cour des comptes sur la Sécu et le système de santé servent-elles à quelque chose ? Invité à débattre autour de ce sujet provocateur, ce mercredi lors des Contrepoints de la santé*, le président de la 6e chambre de la Cour des comptes, Denis Morin, a défendu le dernier rapport des magistrats de la rue Cambon sur la Sécu et, plus largement, la philosophie qui inspire les « sages ».

Denis Morin a rappelé que la mission de la Cour (définie dans la Constitution) est de contrôler la bonne gestion des deniers publics mais aussi de faire des propositions argumentées, à la lumière le cas échéant des exemples étrangers. La Cour, une annexe de Bercy ? « Notre vision n'est pas que comptable, s'est défendu le magistrat. Elle porte aussi sur la qualité de prise en charge des patientsL'important pour nous est de contribuer au débat, mais nous ne prenons pas de décision et notre avis n'est pas toujours suivi par le gouvernement… »
De fait, cela fait des années par exemple que la Cour réclame des mesures pour réguler les dépassements d'honoraires, remettre en cause la liberté d'installation par le conventionnement sélectif ou encore la prédominance du paiement à l'acte. « La France est un des pays en Europe où l'on pratique le plus le paiement à l'activité, à l'hôpital ou en ville, assume Denis Morin. Cela demande à être plus équilibré. »    
Il a défendu la méthode de la Cour – des auditions réalisées par les conseillers – même si, régulièrement, les représentants des médecins libéraux ou des internes estiment que leurs avis n'ont pas été entendus, a fortiori pas pris en considération. « Les acteurs de la santé ne sont pas toujours bien pris en compte, a déploré Jean-Baptiste Bonnet, ex-président de l'Intersyndicale nationale des internes (ISNI), également invité à débattre. Par exemple, sur la taxe sur les boissons sucrées (que la Cour des comptes préconise d'augmenter, NDLR), je pense que les jeunes auraient eu des choses à dire. »
Délégations : pas besoin de s'alarmer 
S'agissant des nouvelles communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), dont la Cour juge qu'elles ne sont pas assez identifiées, structurées et coordonnées avec les établissements, Denis Morin a souligné que le problème ne résidait pas dans les moyens mais dans l'organisation et la lisibilité. « Il faut laisser au système le temps de s'organiserMais j'ai le sentiment que les jeunes qui veulent s’installer en ville cherchent des structures de pratiques collectives. Ils exprimaient déjà ce vœu il y a dix ans, et il faut y répondre maintenant si on ne veut pas que ce soit pollué par des débats sur la liberté d'installation. »
Le président de la 6e chambre est revenu aussi sur les propositions fortes du dernier rapport concernant la filière de soins visuels, qui ont soulevé le courroux des ophtalmos. « Nous avons recommandé que certains actes simples puissent être réalisés par les opticiens ou les orthoptistes, comme c'est fait au Royaume-Uni avec les infirmières. Je ne suis pas sûr qu'il faille s'alarmer là-dessus plus que de raison », tacle l'ancien directeur de cabinet de Marisol Touraine. Et de souligner que les délais de prise en charge des urgences par les ophtalmologistes sont très inégaux, avec une délégation de tâches encore « insuffisante »
Le prochain rapport de la Cour des comptes pourrait porter sur la psychiatrie… La spécialité est déjà prévenue. 
* Organisé par Ortus

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