lundi 7 mai 2018

Auvers-sur-Oise : art et psychiatrie s’entremêlent dans la maison du Dr Gachet

Marie Persidat|07 mai 2018



Auvers-sur-Oise. L’exposition « Melancholia, art et psychiatrie au XIXe siècle » rappelle que le Dr Gachet était spécialiste de la dépression mélancolique. Il a notamment suivi le caricaturiste André Gill. LP/Marie Persidat

La nouvelle exposition « Melancholia » évoque l’intérêt du célèbre médecin pour la psychiatrie et l’art. S’il n’avait pas été spécialiste de la mélancolie à son époque, Vincent Van Gogh ne serait peut-être jamais venu dans la commune.


On connaît le Paul Gachet médecin généraliste et amateur d’art… On connaît moins la passion qu’avait l’Auversois pour la psychiatrie. C’est cet aspect méconnu et pourtant fondamental de sa personnalité qui est développé avec « Melancholia ». La nouvelle exposition de la maison du Dr Gachet tisse un lien indélébile entre art et psychiatrie. Un parti pris qui prend tout son sens, particulièrement à Auvers-sur-Oise. « Si le Dr Gachet n’avait pas été spécialiste de la mélancolie à son époque, Vincent Van Gogh ne serait jamais venu à Auvers », rappelle Delphine Travers, commissaire de l’exposition.

Dès ses débuts dans la profession, Paul Gachet s’intéresse à un phénomène que l’on n’avait encore jamais vraiment considéré comme une pathologie jusque-là : la mélancolie. « On parlerait plutôt de bipolarité de nos jours », souligne Delphine Travers. L’étudiant consacre même sa thèse de médecine, en 1858, à l’étude d’un cas de mélancolie. Même à cette époque, l’art s’invite dans sa conception de la médecine. Il suffit, pour s’en convaincre, de contempler la série de croquis que Paul Gachet a réalisés lorsqu’il travaillait comme externe à la Salpêtrière (Paris XIIIe). On y voit, d’un trait de crayon, immortalisées des postures assez caractéristiques de patientes. Ces « études de cas » font partie des pièces émouvantes prêtées par le musée d’histoire de la médecine et le musée Sainte-Anne. Au même titre que la trousse d’homéopathie de Paul Gachet, qui a utilisé très tôt cette médecine parallèle. Dans l’ancien salon du docteur, est aussi présentée une « machine à induction de Duchenne », qui donnait de légères décharges électriques aux patients.
-
Eugène Delâtre, La Mort en fourrures, allégorie de la syphilis, vers 1897, eau-forte et aquatinte en couleurs, collection particulière/null Gérard Jouhet
De l’art-thérapie avant l’heure
Si la psychiatrie apparaît bien dans toute sa dureté, il se dégage également un profond humanisme de ces souvenirs d’un autre temps. Notamment dans la relation qui s’est nouée entre Paul Gachet et ses patients. Le médecin a suivi en particulier trois artistes en proie à des difficultés de l’ordre de la psychiatrie. A travers des dessins et une correspondance fascinante, est évoqué le triste destin d’André Gill, caricaturiste célèbre à son époque et qui sombra dans la folie. Jusqu’au bout, l’artiste continuera de dessiner avec la même et impressionnante dextérité. Un peu comme un certain Vincent Van Gogh qui n’a jamais lâché son pinceau… « Pour extraire Van Gogh de sa mélancolie, Gachet le pousse à peindre sans relâche », explique Delphine Travers. « C’est un peu l’art-thérapie avant l’heure. »
Exposition « Melancholia, art et psychiatrie au XIXe siècle », à la maison du Dr Gachet, 78, rue Gachet à Auvers-sur-Oise, tous les jours de 10h30 à 18h30 sauf lundi et mardi. Entrée libre.
-
DR

Bientôt une plaque « maison des illustres »

Depuis son ouverture (gratuite) au public en 2003, la maison du Dr Gachet propose à la fois une collection permanente et des expositions temporaires à la fois accessibles et originales. Le bâtiment, niché sur la falaise, a été habité par le célèbre médecin à partir de 1872 et jusqu’en 1909. Il a été racheté par le département en 1996. La maison, entretenue par les enfants Gachet puis par des amateurs d’art, est restée quasiment en l’état. C’est ce qui fait tout son charme et lui a permis d’obtenir il y a quelques mois le prestigieux label « maison des illustres ». Ce titre décerné par le ministère de la Culture a également été remis à une autre demeure auversoise, située non loin de là, l’atelier d’Emile Boggio. Les deux plaques doivent être posées très prochainement.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire