jeudi 2 novembre 2017

"Je les ai trouvés fatigués"... Une trentaine de généralistes auscultés par une journaliste




Sylvie Dellus
DR

"J’entends dire depuis toujours qu’on a le meilleur système de santéau monde, la France s’en vante pas mal. À force de travailler dans le domaine de la santé, je n’ai pas du tout l’impression que ce soit vrai", estime Sylvie Dellus, journaliste dans la presse médicale depuis 25 ans. "J’ai plutôt le sentiment que les choses ont tendance à se dégrader. Des voyants virent au rouge". Et qui d'autre que des médecins généralistes pour en témoigner ? "Ce sont les personnes les mieux placées. Ils suivent les gens sur de longues années, des fois sur plusieurs générations. Ils sont des témoins extrêmement précieux de la santé des Français."
À l'été 2016, la journaliste s'est donc lancée dans l'écriture de son dernier ouvrage "Qu'est-ce qui vous amène ?", aux éditions Les Arènes et qui sera disponible mercredi 8 novembre. Pendant un an, elle est partie à la rencontre de confrères pour dresser le diagnostic des Français. Avec la trentaine de généralistes interrogés, Sylvie Dellus a abordé de nombreuses thématiques : des inégalités sociales à la défiance à l'égard des médicaments, en passant par l'impact des attentats de ces dernières années. Elle a notamment été frappée par le thème de la souffrance au travail. "Quel que soit l'endroit ou le contexte économique, quasiment tous les médecins que j'ai interrogés m'en ont parlé, confie-t-elle. Pas mal d'entre eux m’ont dit qu’ils ont vu des patients fondre en larme dans leur cabinet en parlant de leur chef, ou des difficultés qu’ils ont dans leur travail", se souvient Sylvie Dellus. "Cette souffrance monte et j'ai le sentiment que les généralistes sont démunis par rapport à cela. À part mettre les gens en arrêts longs, ce qui ne plaît pas à la sécurité sociale, ils n’ont pas tellement de solutions", complète-t-elle.
 
Des médecins "surbookés" mais passionnés
Et vous dans tout ça ? Si Sylvie Dellus n'a pas élaboré de "panel scientifiquement représentatif", elle assure s'être attachée à varier au maximum les profils des médecins avec lesquels elle s'est entretenue. "J’ai essayé d’avoir des jeunes et des vieux, des médecins proches de la retraite et d’autres qui démarraient dans le métier, des hommes des femmes. J’ai aussi cherché à varier les lieux, avoir des médecins de la campagne, de la banlieue, des grandes villes, des praticiens installés depuis longtemps au même endroit, d'autres plus récents dans leur secteur ", détaille la journaliste. Ces entretiens étaient donc également l'occasion de prendre le pouls des médecins généralistes.

"Je les ai trouvés complètement surbookés, avec énormément de travail, souvent très fatigués", diagnostique la journaliste. Et d'ajouter, "quand on parle du burn-out des médecins, ce n’est pas une vue de l’esprit". Malgré cela, l'amour du métier est toujours présent. Les médecins de famille sont, selon Sylvie Dellus, "très impliqués dans leur boulot""Ils apprécient énormément de suivre leurs patients dans le temps. Ça fait partie des plaisirs de leur métier. J’ai rencontré des gens qui aiment leur métier, qui ne le font pas toujours dans de bonnes conditions et qui le regrettent. Ils ne sont pas très optimistes sur l’avenir de leur profession mais ils ont envie de s’accrocher vraiment. Ils croient à la médecine générale", confie-t-elle.
Quant à sa réflexion sur le système de santé français, "les généralistes ont pour beaucoup le sentiment que les choses se dégradentassure Sylvie Dellus. À travers leurs témoignages ils m’ont montré qu'on est globalement bien soigné en France mais qu’il y a quand même des points d’inquiétudes".

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