vendredi 23 juin 2017

Un traitement martial en psychiatrie, y croire dur comme fer ?

 22/06/2017
Fait exceptionnel, l’étude évoquée ici n’émane pas d’une équipe de chercheurs rattachée à une (prestigieuse) institution hospitalo-universitaire, comme à l’accoutumée, mais elle découle d’une « observation de pratique libérale de ville (menée pendant 24 mois) » réalisée, à titre individuel, par un psychiatre exerçant en cabinet.
Partant du constat que « la majorité (81%) de ses patients (surtout des femmes) présentaient une carence martiale », ce psychiatre a donc cherché à évaluer l’effet d’une supplémentation orale en fer (associée éventuellement au traitement psychotrope habituel de l’intéressé) sur l’évolution de la symptomatologie psychiatrique.

Une étude forcément ouverte

La mise en place d’un tel traitement martial a été suivie chez ces patients carencés (âgés de 16 à 89 ans) d’une « régression ou d’une rémission des symptômes » chez 193 sujets sur 335 (≈ 58 % des cas). Cette action apparente du fer sur les troubles psychiatriques serait liée à  « l’implication de ce minéral dans la synthèse de nombreux neuromédiateurs. » En régulant notamment « la synthèse des neuromédiateurs mono-aminergiques », le fer pourrait ainsi diminuer notamment les niveaux « d’hyperémotivité, anxiété, irritabilité, agressivité, tristesse, anhédonie, apathie, asthénie, troubles du sommeil ou des conduites alimentaires. »
L’auteur constate aussi que l’apport de fer semble « réduire la probabilité du recours à l’hospitalisation en psychiatrie » et serait « susceptible de potentialiser l’effet des psychotropes, voire d’agir comme un véritable antidépresseur. » Il estime donc que cette étude ouverte doit inciter désormais à « prendre en considération le profil martial des patients psychiatriques » et à confirmer les résultats observés par la réalisation d’essais cliniques randomisés contre placebo « incluant des critères d’évaluation plus objectifs » sur le rôle du fer dans la psychopathologie. Ces nouvelles études pourraient accréditer cette proposition d’enrichir la panoplie thérapeutique du psychiatre avec un traitement martial. L’expression « avoir un moral d’acier » trouverait là sa pleine signification ! Et plus généralement, cette publication montre que la recherche ne constitue pas forcément la « chasse gardée » des professionnels hospitalo-universitaires, mais peut aussi concerner à l’occasion « l’amateur éclairé » sommeillant dans tout praticien, même dans une pratique de terrain a priori isolée.
Dr Alain Cohen
RÉFÉRENCE
Kassir A : Carence en fer : une perspective diagnostique et thérapeutique en psychiatrie. L’Encéphale, 2017 ; 43 : 85-89.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire