mardi 13 juin 2017

Bruno Gravier : «Le crime n'est pas une maladie»



Le récent procès de Fabrice A. a placé les experts au cœur des débats. Responsable du Service de médecine et psychiatrie pénitentiaires vaudois, le professeur Gravier porte un regard critique sur cette évolution
Les experts psychiatres deviennent les acteurs toujours plus incontournables des grandes affaires criminelles. Le récent procès de Fabrice A., condamné à Genève à la prison à vie ainsi qu’à un internement simple, a réservé une place centrale, et parfois mouvementée (dans sa première édition avortée), à l’audition de ces spécialistes. Le professeur Bruno Gravier, responsable du Service de médecine et psychiatrie pénitentiaires du canton de Vaud, analyse cette évolution problématique.
Le Temps: Avec l’internement et surtout sa version «à vie», des exigences de plus en plus lourdes pèsent sur les épaules des experts. Faut-il y voir une dérive?
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Bruno Gravier: Le scénario qui se dessinait au moment du vote de l’initiative sur l’internement à vie s’est vérifié. On pousse les experts à se prononcer au-delà des limites de leurs compétences sans accepter qu’un pronostic à vie relève de l’art divinatoire et non d’une démarche scientifique valide. L’expertise, qui doit fondamentalement statuer sur la responsabilité pénale, devient maintenant une expertise de dangerosité où l’évaluation du risque de récidive violente et les attentes liées aux vertus hypothétiques d’un traitement, ou à son échec, prennent une place prépondérante. On assigne un rôle démesuré à la psychiatrie.

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