mercredi 3 mai 2017

Plus on monte dans la hiérarchie, moins on stresse

LE MONDE SCIENCE ET TECHNO  • Mis à jour le  | Par 

La réponse hormonale au stress est un phénomène à double tranchant. Cette réponse est régulée par le cortisol, qui est la principale sortie de l’axe hypothalamo-pituito-surrénal. La sécrétion de cortisol stimule la production de glucose de ­manière à fournir un supplément d’énergie aux muscles et inhibe le système immunitaire pour freiner la réaction inflammatoire en cas de blessure. Cette cascade métabolique est très utile à la survie en cas de stress aigu, comme lorsque l’on doit fuir un tsunami ou affronter un débat d’entre-deux tours…


Différentes formes de violences


En revanche, la stimulation constante de ce système par un stress psychologique ou social chronique a des effets délétères sur de nombreuses fonctions : cardio-vasculaire, reproductive, digestive, immunitaire, et aussi cérébrale. Si le cortisol favorise la neurogenèse au sein de l’hippocampe, l’hypersécrétion de cette hormone provoque une diminution du volume de l’hippocampe ainsi que des altérations de la mémoire.

Il existe également une forme de vulnérabilité génétique à la dépression qui se manifeste uniquement en cas d’exposition à un stress durable. L’anomalie héréditaire en cause porte sur un gène lié à la synthèse de la sérotonine (un neurotransmetteur impliqué dans la dépression), gène dont l’expression est régulée par les glucocorticoïdes.

Le taux basal de cortisol est fréquemment utilisé comme marqueur biologique d’exposition au stress. Parmi les nombreux ­facteurs, le rôle de l’environnement social est souvent mis en avant. De façon peu étonnante, les niveaux de cortisol sont plus élevés et les maladies liées au stress plus fréquentes dans les couches ­socio-économiques inférieures. L’explication est simple : plus on est bas dans l’échelle sociale, moins on a accès aux ressources vitales et plus on est exposé aux ­différentes formes de violences.


Un contexte stable serait primordial


Qu’en est-il au sommet de la hiérarchie ? ­Contrairement à une idée reçue sur le « stress des manageurs », il semble qu’un statut élevé confère une certaine immunité. Une étude menée par Jennifer Lerner, de l’université Harvard (Massachusetts), sur plus de ­300 officiers de l’armée et cadres de la fonction publique a montré des corrélations ­inverses entre le niveau hiérarchique et les mesures de cortisol et d’anxiété. Les auteurs mettent cependant un bémol à leurs conclusions, notant que tous les participants jouissaient d’une position stable et peu susceptible de changer au sein de leur groupe.

Tous les primates organisent leur société de façon verticale au moyen de mécanismes complexes. Accéder à la position dominante et conserver le pouvoir nécessitent de former des alliances, d’entretenir des divisions et, si nécessaire, de recourir à l’intimidation. Un biologiste de renom, Robert ­Sapolsky, de l’université Stanford (Californie), a longtemps étudié les effets de la hiérarchie ­sociale sur la santé des babouins des savanes africaines. S’il a montré qu’un rang élevé est fréquemment synonyme de cortisol bas, comme chez les militaires, cette ­relation ne vaut que pour les groupes de ­primates où la position du mâle alpha est peu contestée.

En revanche, durant les périodes d’instabilité et chez les espèces où le dominant doit perpétuellement lutter pour son rang, c’est alors lui qui a le cortisol le plus haut. Le ­niveau de stress au sommet dépendrait donc du contexte.

En va-t-il de même pour notre espèce ? La période électorale que nous vivons en ce moment ferait un excellent laboratoire pour mettre cette hypothèse à l’épreuve si seulement nous pouvions recueillir quelques échantillons de salive… Pas sûr que les intéressés acceptent. Alors, puisque c’est de saison, autant faire un sondage : d’après vous, lequel de nos leaders possède la glande ­surrénale la moins hypertrophiée ?

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