vendredi 26 mai 2017

Max Dorra désenchevêtre l’angoisse

LE MONDE DES LIVRES |  | Par 
Angoisse. Le double secret, de Max Dorra, Max Milo, « Voix libres », 190 p.
Le médécin et essayiste Max Dorra.
Le médécin et essayiste Max Dorra. LUCILLE CABALLERO
Et contre l’angoisse, docteur ? Contre l’angoisse, écoutez et rêvez. C’est en substance la réponse de Max Dorra dans un nouvel essai, Angoisse. Le double secret. L’homme est un professeur, un clinicien qui se dit versé dans la « médecine d’écoute ». Tout est personnel dans ce livre – comme dans les précédents –, le ton, le contenu, les schémas qui ponctuent la réflexion. Membre du comité de rédaction de Chimères, la revue fondée par Gilles Deleuze et Felix Guattari, Max Dorra convoque Freud mais aussi Proust, Spinoza et Eisenstein.


Elle nous est précieuse plus qu’elle n’est odieuse


L’angoisse, alors ? Elle s’agrippe, elle maltraite, elle transperce, mais elle est aussi parfaitement banale, attestant la « force d’exister », courageux combat contre la « stase désespérée de la déprime ». Elle nous est précieuse plus qu’elle n’est odieuse. De cette première partie qui diagnostique on retient l’idée centrale que la source de cette pesante étreinte se trouve dans un « enchevêtrement retors » : « La crainte d’être rejeté si nous n’acceptons pas le rôle qu’un groupe nous destine. Et, dans le même temps, la perte de notre regard, l’insupportable resserrement des possibles que cette soumission réveille. » L’angoisse jaillit quand le regard de l’autre ou son attente à notre égard nous fait revivre un événement traumatique, menaçant : « Ce que cache l’angoisse, c’est un morceau d’enfance mal oublié, du passé déguisé en futur. » Quand le jeu social nous mine, quand il nous accule, le temps est soudainement aboli et il nous désaxe.

Il faut alors parvenir à identifier le montage réducteur (et ravageur) qui nous fait vaciller et, pire, revivre sans fin ce vacillement. L’angoisse recule à la condition d’en repérer le « double fond », c’est-à-dire de procéder précisément à son « démontage » par deux prises de conscience : celle de la réalité sociale dans laquelle nous sommes plongés et celle de notre histoire individuelle. Procédant par intuition et collage, la pensée de Max Dorra se coule alors dans une forme moins aisée à suivre. C’est qu’il est question de la puissance émotive du montage à l’œuvre dans les arts (cinéma, musique) mais aussi dans les rêves. Une chose est sûre : la libération viendra bel et bien de notre capacité à recoller les morceaux, car « un autre montage est possible ».

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« Les vertiges de l’angoisse ». Entretien avec Max Dorra et Valter Hugo Mãe, animé par Julie Clarini. Subsistances, mardi 30 mai, 21 heures.

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