lundi 14 novembre 2016

Stress et compétition : « J'arrête médecine en 4e année », le témoignage poignant d'une étudiante Youtubeuse


   Sophie Martos    14.11.2016

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Laura, une étudiante rémoise de 21 ans en 4e année de médecine, connue pour ses vidéos conseils sur les études médicales publiées sur sa chaîne Youtube, explique dans sa dernière publication les raisons qui l'ont poussée à mettre entre parenthèses son cursus carabin.  
Dans un argumentaire (d'une quarantaine de minutes quand même…), la jeune femme évoque l'esprit de compétition permanent et un rythme trop soutenu ne permettant pas de s'épanouir dans d'autres activités. Sa décision a eu un écho certain sur les réseaux sociaux. La vidéo « J'arrête médecine en quatrième année », postée le 16 octobre 2016 a déjà été visionnée plus de 213 000 fois.
« En 2e et 3e année, il n'y a pas de concours donc vous êtes plus détendue mais les étudiants restent des compétiteurs dans l'âme. Il y a toujours une compétition de vouloir être le meilleur (...) En 3e année, un tiers de la promo avait créé un groupe secret pour s'échanger les corrections des annales. C'était étrange. La compétition perdure en 4e, 5e et 6e année lorsque vous préparez les ECN », témoigne-t-elle encore. « Malgré ce que les gens peuvent dire, la première année n'est pas la plus dure », résume-t-elle.
Enfermée 
La charge de travail est considérable et laisse peu de place aux activités personnelles, explique Laura, passionnée de fitness et de musculation. « On bosse, on bosse, mais le temps pour les autres passions est réduit. Moins de temps pour voir mes amis et mes proches. C'était un sacrifice, j'avais le sentiment qu'il fallait que je me coupe de tout pour faire médecine (..) je n'avais pas envie de m'enfermer dans un domaine », poursuit-elle.

La volonté de se sortir de ce carcan l'a donc emporté. « J'étais censée repartir pour l'externat où on enchaîne stages au CHU, conf', cours, gardes, etc. Ayant toujours la tête dans le guidon et ayant toujours fait ce que je devais faire ou ce qui est "normal " je me retrouve avec une envie énorme de découvrir autre chose », détaille-t-elle.
Sacrifices
La jeune femme juge que ce sacerdoce ne colle pas avec la construction d'une vie de famille épanouie. « C'est rare d'avoir des enfants lors de l'internat. On a un rythme de fou. J'aimerais avoir une vie de famille stable, être présente et leur accorder du temps », rêve-t-elle.
La pression et les humiliations sont pointées du doigt. « Vous êtes encore étudiant et certaines personnes se réservent le droit de vous traiter comme des "merdes". C'est inconcevable pour moi. Cela va à l'encontre du principe d'être médecin. Où est l'humanité ? », ajoute-t-elle.
Son dernier stage lui a laissé un goût amer… « J'allais à la salle, je rentrais, je mangeais, je préparais ma gamelle, puis je me couchais pour me lever 6 heures plus tard. J'étais épuisée. Il fallait aussi bosser les items sur son temps libre. (...) Je me suis dit que ce n'était plus possible. Je ne veux pas avoir ce genre de vie ».
Après un entretien avec le doyen de sa faculté, elle décide donc de mettre son année sur pause. Si elle le désire, elle pourra se réinscrire en 4e année dès la prochaine rentrée. Pour le moment, elle consacre ses journées à rattraper le temps perdu.
Études standardisées
Pour l'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF), ce témoignage illustre « le cas de nombreux étudiants ayant des résultats excellents et un grand intérêt pour le monde de la santé mais pour qui des études de médecine trop autocentrées et standardisées ne sont pas adaptées ».
Il montre aussi « un manque profond d'accompagnement à l'orientation » et « une sélection à l'entrée sur des critères inadaptés ». L'externat reste une des périodes « les plus difficiles de nos études par le manque de reconnaissance, le stress et la charge de travail ». Néanmoins, l'association souligne que de nombreuses initiatives de soutien personnalisé existent pour aider les étudiants en difficulté ou en souffrance. 

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