vendredi 16 septembre 2016

L'appétit de l'hospitalisation privée pour les CDD d'usage constitue de "graves dérives" pour l'Igas

HOSPIMEDIA  
En 2014, l'hospitalisation privée à but lucratif ou non a enregistré 60 551 embauches en contrats à durée déterminée dits d'usage (CDDU), soit 20 785 salariés et 2 537 équivalents temps plein (ETP). Par rapport aux autres embauches effectuées par ces deux branches, ces CDDU représentent 3,7% des contrats, 6,8% des salariés et 3,2% des ETP. Soit un ratio de 8,19 salariés en CDDU par ETP contre 3,90 pour les autres embauches. Telles sont les données fournies par l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) dans son évaluation du CDDU, rendue publique ce 12 septembre (à télécharger ci-dessous)*.

Ce travail est une première depuis la création de ces CDD très spécifiques par une ordonnance de février 1982. Objectif affiché à l'époque : permettre la succession éventuellement ininterrompue de CDD. Pour cela, le texte supprime les quatre régulations censées encadrer le pratique du CDD : la définition des cas de recours (remplacement d'un salarié absent, augmentation temporaire d'activité) ; la limitation dans le temps (dix-huit mois) ; la limitation du nombre de renouvellements possibles (deux depuis 2015, un auparavant) ; l'interdiction de la succession du CDD pour la même personne ou pour le même emploi avant l'expiration d'un délai de carence et l'octroi d'une indemnité de fin de contrat égale à 10% des salaires versés. En théorie, trente secteurs d'activités sont juridiquement éligibles au CDDU. S'agissant de la santé et de l'action sociale, il s'agit des intervenants à domicile œuvrant dans des services à la personne, notamment pour l'accompagnement de personnes dépendantes, relevant d'entreprises à but lucratif.

Mais la réalité est tout autre et cette liste foncièrement "non respectée", constate l'Igas. Celle-ci a même "parfois eu le sentiment que la liste des secteurs et des métiers éligibles au CDDU était un des secrets les mieux gardés de notre droit social". Et ces "dérives", qui amènent à voir des CDDU au-delà des listes réglementaires et conventionnelles admises, s'observent sur un plan "particulièrement significatif" dans l'hospitalisation privée à but lucratif ou non, bien que ce secteur et ses métiers (agents de service, aides-soignants, auxiliaires de vie, infirmiers, formateurs, directeurs) "n'aient strictement rien à voir avec les secteurs éligibles", insiste l'Igas.

Dans ses recommandations, l'inspection incite donc à "définir (enfin) de façon stricte et claire le champ d'application" du CDDU, qu'il serait bon au passage de renommer "contrat à durées déterminées successives" (CDDS). L'idée est de parvenir à définir "la liste des organisations productives types [...] au niveau de la négociation de branche" selon "qu'elle apporte une réponse adaptée aux nécessités économiques de celle-ci et à l'existence d'autres types de contrat de travail disponibles". En parallèle, divers outils de régulation doivent entre autres voir le jour au profit du salarié en matière de conditions de travail, de stabilisation de l'emploi, etc.
Thomas Quéguiner

* Dans un bref communiqué, la FHP a tenu à préciser qu'"elle n'est pas signataire d'un accord de branche permettant la conclusion de CDDU". Et d'ajouter : "À notre connaissance, il n'y en pas dans les cliniques et hôpitaux privés".
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