mardi 21 juillet 2015

La sieste au travail : une idée qui fait son chemin

Le Monde.fr |  | Par 
Pratique taboue, ses bienfaits sont pourtant avérés. Quelques entreprises françaises ont osé lui dédier des espaces.
La sieste au travail serait un facteur de réduction du stress et d'accroissement de la productivité.


Malgré ses attraits évidents, la sieste, qu’elle soit micro, éclair ou royale, est perçue en France comme du temps volé à la journée de travail. « Dans notre culture, la sieste est discréditée et considérée comme une perte de temps », confirme le docteur Eric Mullens, somnologue et auteur d’Apprendre à faire la sieste (Ed. Trédaniel, 2009). Les dictionnaires Larousse et Robert accueilleront pourtant à bras ouverts le verbe « siester » dans leur édition 2016, qui prêtera désormais main-forte au « petit somme » et autre « roupillon ».

Si la sieste cohabite volontiers avec petite enfance, congés et retraite, elle fait désordre sur le lieu de travail. Et ce même si s’assoupir après le déjeuner semble être un bon moyen de récupérer avant de mettre les bouchées doubles dans son activité. Des études plaident d’ailleurs en faveur de la sieste. Plus d’un Français sur trois se dit en déficit de sommeil et siester permet de combler à moindre coût cette « dette ». Cette pause contribue à minimiser stress, sautes d’humeur et manque de concentration. Elle augmente même la créativité et la productivité – de 35 % selon une étude de la Nasa –, accroît les capacités d’apprentissage et réduit les risques d’accidents de la circulation ou du travail.


Un défenseur nommé Jacques Chirac


Comme le soulignait Jacques Chirac, dans sa préface d’Eloge de la sieste, de Bruno Comby, « notre humour populaire aime à railler la sieste et ceux qui la pratiquent ». L’ancien président de la République ajoutait qu’il trouvait « maladroit de confondre sommeil et paresse » et vantait les mérites de « cette recette d’équilibre à la portée de tous ». Malgré les louanges des études scientifiques et les pratiques assidues d’illustres émules parmi lesquels André Gide, Napoléon, Winston Churchill ou Léonard de Vinci, la sieste n’est toujours pas la bienvenue en entreprise. « Elle est un aveu de faiblesse », estime Christophe Chanhsavang, créateur du ZZZen à Paris, bar à sieste situé dans le quartier de l’Opéra. S’adonner à une sokète (sieste en wallon), « c’est se mettre hors du jeu social », poursuit le philosophe Thierry Paquot. « Il est scandaleux que l’homme ne dorme qu’une fois par jour alors que 90 % des mammifères s’accordent au moins deux sessions de sommeil par jour », explique-t-on sur le site The Nap Concept, qui a pour objectif de démocratiser la sieste au travail.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. En 2008, 30 % des 25-45 ans avouaient faire la sieste en semaine (BVA/Inpes). Selon l’Institut national du sommeil et de la vigilance, 19 % des salariés reconnaissent qu’ils s’assoupissent ou s’endorment au travail (étude réalisée 2014). D’ailleurs, sur Internet, les « tuyaux pour faire la sieste au bureau sans se faire pincer » abondent.



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