mardi 31 mars 2015

Détenus de scène à l’Odéon

ANNE DIATKINE

Ils sont dehors. Onze détenus de Fleury, 20 ans et des poussières, sur la terrasse du théâtre de l’Odéon. Ils sont dehors, et des cris s’échappent lorsqu’ils découvrent le ciel dégagé, la vue sur les toits, l’air «qui caresse le visage, ce n’est pas le même air qu’on a en promenade, c’est un air qui étouffe, celui-là !» Walid (1) fait mine qu’une main invisible s’approche de lui. «Quelle douceur !» Les garçons hèlent un groupe de jeunes filles en foulard sur le parterre du théâtre. Des passantes. Elles rient avec ces acteurs inconnus qui les encouragent à monter. Impossible, l’entrée est réservée aux professionnels ! Pas de surveillants ici, encore moins de «pinces», mais cinq conseillères pénitentiaires d’insertion et de probation, qui entourent la sortie. Ils sont dehors, donc, dans ce haut lieu de la culture qui n’était, il y a peu, qu’«une station de métro sur la ligne 4» pour la plupart. Aucun ne risquerait le moindre geste qui mettrait en péril cette sortie. Car que fait-on dans un théâtre, lorsqu’on y a pénétré par l’entrée des artistes ? Eh bien, on y joue !

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