jeudi 13 novembre 2014

Baisse inédite du nombre de césariennes en France

LE MONDE | Par 
La Haute Autorité de santé (HAS) se garde de crier victoire, mais la tendance est inédite. Le nombre de césariennes programmées à terme – quand l’opération est décidée à l’avance – est en baisse pour la première fois en France. L’organisme, qui a pour tâche d’améliorer la qualité et la sécurité des soins, et le ministère de la santé ont lancé en 2012 des recommandations nationales et une expérimentation visant cet objectif dans 165 maternités volontaires, soit un tiers des établissements français.

Ses premiers résultats devaient rendre publics jeudi 13 novembre. La baisse est observée dans les maternités participant à l’expérimentation (de 7,7 % de l’ensemble des accouchements en 2011 à 7,3 % en 2013) et dans une moindre mesure dans les autres (de 7,6 % à 7,4 %). Dans le même temps, l’ensemble des césariennes (effectuées à terme et en urgence) se stabilise autour de 19 % des accouchements, alors que la tendance était auparavant à la hausse.
« Ces chiffres doivent encore être confirmés, souligne Marina Martinowsky, chef du projet à la HAS. Nous ne cherchons pas une baisse à tout prix, mais à réduire l’hétérogénéité des pratiques. Certaines maternités font trop de césariennes, d’autres pas assez. » Le taux de césariennes programmées varie de 2 % à 20 % en fonction des régions et des maternités. C’est bien un recours trop important à ce geste qui inquiète au premier chef. Près de 30 % des césariennes programmées seraient évitables, selon une étude publiée en mai 2014 dans la revue Acta obstetricia et gynecologica scandinavica par une équipe de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). « Tous les pays développés se posent la même question et lancent des expérimentations comparables », affirme Mme Martinowsky.
Certaines césariennes sont indispensables, en particulier dans des situations d’urgence, lorsque l’état de la mère ou du bébé le nécessite. « Il ne s’agit pas de prendre des risques », affirme Martinowsky. Ce n’est donc pas sur ces dernières que porte l’effort de réduction, mais sur les césariennes programmées. Car le geste n’est pas anodin. Pas toujours bien vécu par les femmes, il entraîne des suites de couches plus difficiles, une cicatrice sur l’utérus, donc un risque de rupture lors d’un accouchement ultérieur, et plus de complications éventuelles pour la mère lors de la grossesse suivante. Pour l’enfant à naître, c’est le terme qui importe. Le programme a donc insisté sur la nécessité de réaliser les césariennes programmées après 8,5 mois de grossesse, et non dès 8 mois. Ces dernières ont légèrement régressé sur la période entre 2011 et 2013.

« Décisions à plusieurs »

L’étude de l’Inserm a mis en évidence plusieurs facteurs favorisant les césariennes programmées : en avoir eu une lors d’un précédent accouchement, un âge de la mère supérieur à 35 ans, avoir eu une surveillance médicale intensive pendant la grossesse, et accoucher dans une clinique privée. « Nos résultats suggèrent que les obstétriciens sont plus susceptibles de programmer une césarienne quand les femmes présentent des caractéristiques connues pour accroître les risques de césarienne d’urgence », écrivent les auteurs de l’étude Inserm.
Dans les cliniques privées, les obstétriciens ont pour habitude d’accoucher les patientes qu’ils ont suivies. La programmation faciliterait l’organisation de leur travail. Parmi l’échantillon de quelque 14 600 naissances françaises examinées, les césariennes opérées à la demande expresse de la mère étaient « rares par rapport à la fréquence rapportée dans d’autres pays », observe l’Inserm.
Pour Mme Martinowsky, l’enjeu pour les professionnels de santé est de « mieux gérer les tentatives d’accouchement par voie basse », avant d’en arriver à la césarienne. « Une première césarienne d’urgence ne débouche pas forcément sur une deuxième, affirme- t-elle. Un bébé qui se présente par le siège peut également être délivré par voie basse. »

Pour faire évoluer leurs pratiques, les maternités qui participent à l’expérimentation ont bénéficié de l’accompagnement de la HAS et des agences régionales de santé. Les équipes engagées ont elles-mêmes fixé leurs objectifs. Selon Mme Martinowsky, le principal levier de changement est de « prendre les décisions à plusieurs ». L’information de la patiente et la prise en compte de ses souhaits doivent également progresser.

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