jeudi 28 août 2014

Cyberélèves, super-progrès

LE MONDE | Par 

"La Fin de l'école", par François Durpaire et Béatrice Mabilon-Bonfils, Presses universitaires de France, 288 pages, 19 euros.

Sortir l’école de l’âge de pierre. L’idée n’est pas nouvelle et revient en cette rentrée avec l’ouvrage coécrit par l’historien François Durpaire et la sociologue Béatrice Mabilon-Bonfils. Leur regard est original et futuriste. Le vieux schéma de l’instruction républicaine est révolu : niveau général décroissant, méritocratie en berne, absentéisme, qualité déplorable de l’anglais, écart dramatique entre Nord et Sud à l’échelle mondiale.
Pour y remédier, il faut s’adapter à l’ère numérique, suggèrent ces deux universitaires. Aujourd’hui, la connaissance n’est plus l’apanage de l’école. Depuis une vingtaine d’années, une encyclopédie appelée Internet est à portée de clic : Wikipédia, livres audio, jeux interactifs sur tablette sont autant d’outils qui rendent obsolètes les manuels scolaires entassés dans ces cartables trop lourds. L’accès au savoir est libre et illimité.

ENTITÉ NOMADE
Qu’est-il encore utile de stocker dans le cerveau humain ? Nos enfants auront-ils une mémoire différente de la nôtre ? Seront-ils pris en charge par un outil numérique ? Sans tomber dans la science-fiction, l’image d’un cyberélève – cet écolier assisté par la technologie – est à prendre au sérieux. Faut-il se réjouir de l’émergence d’une génération d’élèves machines, aussi performants qu’aliénés ?
Difficile de savoir si le professeur d’aujourd’hui parviendra à jouer le même rôle demain. Pour les auteurs, enseignants, c’est une nouvelle fonction qui s’offre à eux. Il s’agira, à l’avenir, de former le professionnel de l’enseignement capable de procurer à ses élèves des solutions pour hiérarchiser la connaissance, apprendre à maîtriser la machine et à partager l’information sans la dénaturer.
Le travail à distance, en Wi-Fi, les MOOC (e-formations en libre accès) et les plates-formes de partage permettront d’entrevoir l’école non plus comme un espace clos mais comme une entité nomade. Pourquoi ne pas imaginer des écoles sans murs ni chaises, où la mobilité est telle qu’on pourrait connecter deux classes en visioconférence autour d’un projet commun ? Un tel modèle répondrait à l’aspect souhaitable de la mondialisation en ce qu’elle contient de partage, d’exploration culturelle et de découverte de l’autre.
Utopie ou pas, ce programme remet en cause deux principes fondateurs de l’école républicaine : une éducation exclusivement nationale, difficile à envisager dans un contexte global, et une séparation entre éducation (vivre ensemble) et instruction (construire ensemble). Sans doute faudra-t-il plus d’un ouvrage du genre pour faire consensus.


La Fin de l’école  
par François Durpaire et Béatrice Mabilon-Bonfils
Presses universitaires de France, 288 pages, 19 euros.

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