Une enquête menée par l'Observatoire citoyen des restes à charge en santé révèle ce 22 mai l'imprévisibilité des restes à charge hospitaliers et pointe des inégalités "très préoccupantes", en raison notamment de l'opacité des modalités de fixation des tarifs journaliers de prestation, pouvant être très différents d'un établissement à l'autre.
Une enquête menée par l'Observatoire citoyen des restes à charge en santé*, dont les résultats ont été publiés ce 22 mai, révèle l'imprévisibilité des restes à charge hospitaliers et pointe des inégalités "très préoccupantes", en raison notamment de l'opacité des modalités de fixation des tarifs journaliers de prestation (TJP) pour les différents établissements. L'Observatoire rappelle dans un dossier de presse en préambule qu'avec une dépense globale de 85 milliards d'euros (Md€), soit 1 300 € par Français et par an, le secteur hospitalier public et privé, hors soins de longue durée, a représenté 46% de nos dépenses de santé en 2012. L'enquête a donc porté sur les restes à charges (RAC) qui portent principalement sur quatre postes de dépenses : la participation au coût des soins, le coût de la chambre particulière, la participation aux frais d'hébergement et le coût des honoraires du praticien. Des restes à charge concentrés sur une minorité
"La plupart du temps, le coût de l'hospitalisation est heureusement très bien pris en charge par l'Assurance maladie et les complémentaires", souligne l'Observatoire. Ainsi, la somme restant à la charge du patient n'est en moyenne que de 26 € par séjour, dès lors qu'il dispose d’une couverture complémentaire. Elle est en revanche supérieure à 500 € avant intervention de l'assurance complémentaire, précise l'organisme, qui a examiné les portefeuilles de complémentaires santé de patients liés à la société Santéclair – filiale de plusieurs complémentaires santé – portant sur 240 000 hospitalisés en 2012 ayant un contrat haute ou moyenne gamme. Cependant, ce résultat moyen de RAC ne doit pourtant pas "masquer des inégalités très préoccupantes", pointe-t-il. Il dénonce en premier lieu des inégalités entre les patients : "Si les dépenses sont très bien remboursées la plupart du temps, certains patients mal couverts peuvent se retrouver avec des restes à charge de plusieurs milliers d'euros en fin de séjour". Avant intervention de la complémentaire santé, plus des trois quarts des patients hospitalisés en 2012 ont eu un reste à charge total inférieur à la moyenne de 511 € par séjour. Le reste à charge a dépassé 500 € dans 24% des séjours, en s’affichant supérieur à 1 300 € pour 10% d’entre eux et même à 5 190 € pour le dernier pourcentage des séjours ayant le plus gros RAC. Après intervention de la complémentaire, la répartition des RAC est encore plus concentrée sur 10 % des séjours hospitaliers, signale l'Observatoire, puisque près de 88% d'entre eux affichent un RAC à 0 euro après remboursement par la complémentaire. 10,2% des séjours présentent un RAC final supérieur à 20 €, celui-ci montant à 119 € dans 5% des séjours et à 588 € dans 1% d'entre eux.
Écarts tarifaires considérables et "incompréhensibles"
Des inégalités entre les hôpitaux publics sont également pointées. Ainsi, "le "tarif journalier de prestation" [TJP], qui sert de base au calcul du ticket modérateur à la charge du patient ou de sa mutuelle, est défini de manière totalement opaque", dénonce l'organisme. La base des TJP de différents hôpitaux, que publie l’Observatoire, révèle en effet "des écarts considérables et des situations totalement incompréhensibles". Ainsi, pour les soins qualifiés de "médecine", le tarif journalier de prestation, parmi l’ensemble des hôpitaux publics en France en 2013 est en moyenne de 817 €, mais il monte jusqu'à 2 230 € "sans qu’on puisse comprendre les raisons de ce surcoût". Au nombre des CHU ayant les TJP en médecine les plus chers, l'on trouve le CHU Rouen (1 476 € / jour), les Hospices civils de Lyon (HCL, 1 470 €) et l'Assistance publique-hôpitaux de Marseille (AP-HM, 1 444 €). Parmi ceux ayant les TJP en médecine les moins chers, se trouvent l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP, 862 € / jour), le CHU de Nantes (871 €) et le CHU d'Angers (935 €). Parmi les CH ayant les TJP en médecine les plus élevés, on recense le CH de Luneville en Meurthe-et-Moselle (2 230 € / jour), le CH de Villefranche-sur-Saône (Rhône, 1 634 €), le CH de Montélimar (Drôme, 1 594 €), le CH de Giens (Var, 1 470 €) et le CH de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine, 1 468 €). Enfin, hors hôpitaux locaux, les TJP les moins élevés se trouvent au CH de Nogent-le-Rotrou (Eure-et-Loir, 358,83 € / jour), le CH de Saint-Flour (Cantal, 435,35 €), le CH de Guéret (Creuse, 436,18 €), le CH de Cholet (Maine-et-Loire, 553 €), le CH de Bourges (Cher, 598,25 €). "Or, c'est en particulier sur l'existence de ces TJP parfois très onéreux que reposent les cas de patients sortant de l'hôpital avec des dettes de plusieurs milliers d’euros lorsqu'ils n’ont pas de complémentaire !", commente l'Observatoire.
Les pouvoirs publics interpellés
En dernier lieu, sont pointées des inégalités entre les hôpitaux publics et les cliniques : "La tarification opaque et fluctuante de la participation au coût des soins dans le cadre de l’hôpital public aboutit à des tarifs qui y sont souvent plus élevés en la matière, alors qu’en cliniques privées ce sont davantage les coûts liés à la chambre particulière et aux honoraires des praticiens qui salent la facture pour l’usager et/ou sa complémentaire". S'agissant des coûts moyens liés aux chambres particulières, il est estimé, sur la base d'un millier de structures, à 55 €/jour toutes structures confondues, 68 € dans les cliniques et 46 € à l'hôpital public. Enfin, "face à de telles distorsions, et à l’imprévisibilité des dépenses qu’elles entraînent", l'Observatoire indique apporter des conseils pratiques aux patients sur les points de vigilance à avoir pour limiter leur participation à leurs frais hospitaliers. Il demande aussi aux pouvoirs publics de "prendre les mesures nécessaires pour réduire les distorsions de tarifs constatées qui accentuent les inégalités d’accès aux soins".
Caroline Cordier
* Il a été créé début 2013 par le Collectif interassociatif sur la santé (Ciss), le magazine 60 Millions de consommateurs, et la société Santéclair, filiale de plusieurs complémentaires santé.
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