mardi 17 décembre 2013

Le rire thérapeutique et le rire qui tue

 17/12/2013
Crédit photo : S. Toubon
Le rire peut être le meilleur médicament, mais aussi le pire chez de rares patients, suggère une étude menée par un très sérieux groupe de chercheurs Britanniques. Robin Ferner et coll. (Universités de Birmingham et d’Oxford) ont soigneusement analysé les données de la littérature publiée entre 1946 et 2013, sur les bienfaits et les méfaits du rire.
Ils publient leurs résultats dans la célèbre et malicieuse « Christmas Édition » du BMJ, sous le titre : « Le rire : une investigation méthodique de la risibilité, effet thérapeutique et méfaits ».

Réduire les infarctus du myocarde

Les Britanniques identifient trois situations : des bienfaits tirés du rire, des méfaits causés par le rire et des états induisant un rire pathologique.
Au fil des lectures, ils découvrent des états pathologiques qui ont tiré un bénéfice d’un rire involontaire : le rire peut augmenter les seuils de la douleur (même si les clowns à l’hôpital n’ont pas d’effet sur les stress des enfants qui subissent de la petite chirurgie, notent-ils).
« Le rire diminue la rigidité de la paroi artérielle, ce qui selon les conclusions des chercheurs, peut améliorer la tension artérielle. Et réduire le risque d’infarctus du myocarde. » Aussi, la lecture du BMJ de Noël est-elle « à même de vous ajouter des années de vie », soulignent Ferner et coll.
Les clowns ont leur utilité dans un autre domaine : des études montrent une amélioration de la fonction ventilatoire objectivée chez des patients ayant une BPCO.

Brûler 2000 calories

Et, chez les diabétiques, « un bon rire franc permet, sur une journée, de brûler jusqu’à 2000 calories et de réduire la glycémie. »
Dans un tout autre domaine, le rire améliore la fertilité. Ainsi, dans une procédure d’AMP, 36 % des femmes ayant été diverties par des clowns après le transfert d’embryon ont obtenu une grossesse, contre 20 % dans le groupe témoin.
Les effets indésirables du rire sont également recensés. Une femme souffrant de tachycardie sévère (Wolff Parkinson White) après une période de rire intense est tombée en collapsus puis est décédée. Des« explosions de rire » ont été associées à des ruptures cardiaques et à des déchirures de l’œsophage.
Une inspiration rapide au cours d’un fou rire peut provoquer l’inhalation d’un corps étranger et/ou une crise d’asthme, observent Ferner et coll.
Une crise de rire provoque parfois une incontinence urinaire. C’est connu du public. Par ailleurs, des hernies ont débuté après un rire : « Rapture causing rupture » (jeu de mot non transposable, littéralement« le ravissement causant la rupture »).

Rire jaune et ictère

Les auteurs font une liste des états qui causent des rires pathologiques, le rire pouvant aider au diagnostic ; le plus fréquent est l’épilepsie gélastique ou épilepsie rieuse.
Les chercheurs reconnaissent que leur revue met en cause la notion habituelle du « rire tout bénéfice ». Mais ils observent que « l’humour sous toutes ses formes n’est porteur que d’un faible risque et peut être bénéfique ». Ils concluent en évoquant quelques domaines de recherches potentielles : le rire jaune provoque-t-il un ictère ? L’humour froid fait-il baisser la température ? Les blagues de mauvais goût entraînent-elles une dysgueusie ?
› Dr BÉATRICE VUAILLE

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