jeudi 24 octobre 2013

Evitera-t-on l'engorgement des services d'urgences cet hiver ?

Le Monde.fr | 
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Les responsables de SAMU-Urgences de France et de l'Association des médecins urgentistes de France (AMUF) avaient mis en garde dès le mois de février. A partir du 15 octobre, ils ne prendraient plus en charge les appels téléphoniques vers les autres services pour trouver un lit à leurs patients. Une activité administrative qui pouvait représenter, selon eux, environ 30 % de leur temps de travail.

Cet ultimatum était aussi façon de signifier que la question de l'engorgement des services d'urgences devait être assumée par l'hôpital dans son ensemble. Plus d'une semaine après la mise en application de cette décision, le quotidien dans les services d'urgences a-t-il changé ? 

"Les directions des hôpitaux ont pris en compte le mouvement, des efforts sont faits et les choses se passent plutôt mieux qu'avant", reconnaît Christophe Prudhomme, porte-parole de l'AMUF. "Une majorité d'établissements ont réorganisé l'algorythme des entrées et des sorties", juge lui aussi Marc Giroud, président de SAMU-Urgences de France. Il se félicite par exemple que l'APHP ait publié le 8 octobre une charte de l'hospitalisation en aval. "On ne se moque pas de ceux qui font leurs devoirs la veille au soir, dit-il. Même si les nouvelles méthodes ne sont pas complètement rentrées en pratique dans tous les hôpitaux parisiens, ce n'est pas grave, cela laisse un peu de marge avant l'hiver."
Dans les faits, aucun patient n'a été pénalisé par cette décision des urgentistes. "Dans les établissements où il y a eu une montagne d'incompréhension, les médecins ont continué à faire comme avant, explique Marc Giroud. Nous ne sommes pas là pour faire la guerre ou pratiquer la politique du pire !" En cas de blocage, la situation est signalée au ministère ou à l'agence régionale de santé (ARS) et "il y a une réaction immédiate".
"Globalement, sur l'ensemble des CHRU, il n'y a pas eu de difficulté majeure", se félicite, elle aussi, Véronique Anatole-Touzet, directrice générale du CHR de Metz-Thionville et représentante de la conférence des directeurs généraux de CHU et CHR. "Même si tout n'est pas réglé", il y a eu "une vraie prise de conscience collective" autour de ces questions "traitées depuis de nombreux mois".
NETTE DIMINUTION DU NOMBRE DE COUPS DE FILS
Depuis le 8 octobre, à l'hôpital intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne), une réunion a ainsi lieu chaque midi avec un médecin des urgences, un directeur adjoint de l'hôpital, des cadres et des médecins des services pour faire le point sur les lits disponibles et les personnes qui doivent être hospitalisées.
"Grâce à cette réunion, on a plus de facilité à trouver les lits, souligne Corinne Bergeron, chef du service des urgences et membre de l'AMUF. Cela permet à tout le monde de se rencontrer en une seule fois, il y a une nette diminution du nombre de coups de fils." Avec cette nouvelle organisation, la médecin dit gagner près d'une demi-heure par jour. "Pression de l'administration", mise en place d'un logiciel de gestion des lits, réouverture prochaine d'une unité de gériatrie aiguë... Pour elle, c'est tout un ensemble de facteurs qui permettent d'expliquer une amélioration de la prise en charge des patients.
Pas de triomphalisme pour autant. "De façon générale, il y a une réelle augmentation de l'embouteillage", assure la responsable."Les pics de forte fréquentation que nous avions auparavant cinq ou six fois dans le mois, nous les avons maintenant deux ou trois fois dans la semaine", assure-t-elle. Et avec l'arrivée de l'hiver,"on va passer d'un rythme sinusal à une tachycardie ventriculaire", c'est-à-dire à une nette augmentation des pics d'affluence. 
"IL FAIT BEAU ET ON EST DÉJÀ À FLUX TENDU"
Les deux associations de médecins urgentistes n'ont pas la même lecture des prochains mois. "Cet hiver, ce sera catastrophique", assure Christophe Prudhomme, le porte-parole de l'AMUF. Il prend l'exemple des services d'urgences dans les hôpitaux parisiens mercredi 23 octobre en début d'après-midi, "une période d'activité moyenne", selon le réseau interne Cyber-urgences.
Au vu du ratio entre le nombre de patients présents et la capacité du service, la plupart des établissements apparaissent déjà en surrégime. Lariboisière affiche 217 %, La Pitié-Salpétrière 154 %, Cochin, 108 %, Tenon, 168 %, Bicêtre 205 %, Avicenne 116%... "Il fait beau et on est déjà à flux tendu, en permanence en surcharge, explique Christophe Prudhomme. On l'a déjà dit à la ministre, s'il y a des dysfonctionnements cet hiver, nous témoignerons en faveur des familles qui souhaitent porter plainte."
Marc Giroud, le président de SAMU-Urgences de France, est plus"confiant" et se dit convaincu que "les urgences seront moins engorgées cet hiver". Il met actuellement en place des indicateurs pour mesurer les effets de la concertation d'octobre et repérer les mauvais élèves. "Et le 15 décembre, nous ciblons, nous n'aurons plus de réserves à donner les noms des hôpitaux où la direction ne joue pas le jeu."

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